C'est maintenant officiel et définitif. «La Tunisie déclare la guerre totale aux terroristes et nous ne ménagerons aucun effort matériel, moral ou logistique pour vaincre les semeurs de mort». Béji Caïd Essebsi, président de la République, l'a réaffirmé, hier, lors de la réunion commune du Conseil de sécurité nationale et du Conseil supérieur des armées après l'avoir annoncé, mercredi soir, dans son adresse au peuple tunisien, en réaction à l'attaque terroriste qui a visé, le jour même, le musée national du Bardo. Certes, les réactions d'indignation exprimées par les Tunisiens, toutes sensibilités politiques confondues, ont montré que les citoyens savent maintenant que la seule réponse à opposer aux terroristes est bien de les éradiquer, dans leurs racines. Mais ce qui réconforte la Tunisie dans ses choix, c'est bien ce mouvement de solidarité internationale manifesté pour soutenir notre pays dans sa guerre contre les terroristes. Au-delà des messages traditionnels dénonçant l'assassinat de personnes innocentes venues rendre un hommage à la mémoire civilisationnelle de la Tunisie en découvrant ses richesses et sa diversité jalousement préservées au musée du Bardo, ce sont le contenu de ces messages et les engagements qu'ils véhiculent qu'il importe de mettre en valeur. Hier, le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, a fait parvenir au chef de l'Etat un message écrit de sa propre main. Il comporte «un soutien inconditionnel à la Tunisie», ce qui revient à dire que la coopération sécuritaire et militaire tuniso-algérienne va gagner en qualité et en intensité et que les Algériens mettront à la disposition de la Tunisie leur expertise et leur expérience en matière de traque des terroristes là où ils se terrent et d'anticipation en vue de les anéantir avant qu'ils n'agissent. Les propos du message de Bouteflika revêtent, comme tout le monde le sait, la dimension diplomatique d'usage. Mais, il n'est pas difficile d'y voir une volonté claire de trancher définitivement avec les hésitations ou les attentes ayant caractérisé une époque qui n'est pas très lointaine. Ils traduisent également la détermination à concrétiser le principe selon lequel «la sécurité de l'Algérie est celle de la Tunisie et la sécurité de la Tunisie est celle de l'Algérie». Et la solidarité active du monde avec notre pays d'apparaître à travers la phrase de François Hollande qui clame dans son message : «Nous sommes tous concernés quand il s'agit de vies humaines effroyablement broyées par la machine terroriste». Le président français visait juste et savait que les terroristes ne ciblaient pas uniquement les innocents touristes mais ils s'attaquaient en réalité à un projet de société démocratique et ouverte que le monde libre soutient de toutes ses forces. Et ce monde libre qui s'est déjà frotté aux œuvres des semeurs de mort tuant à la pelle n'est plus en mesure de se contenter de sentiments de compassion ou d'appui politique aux victimes là où elles tombent. Aujourd'hui, on attend des actes, des armes, des équipements sophistiqués, un appui en matière d'expertise dont se prévalent les pays de cet Occident qui hésite toujours et n'arrive pas à trancher à l'encontre de ces hordes dont il a favorisé l'éclosion mais qu'il n'est plus en mesure de contenir. Il n'est en aucune manière productif de continuer à dénoncer les errements du passé ou à échanger les accusations comme l'ont fait certains de nos députés, mercredi soir, sous la coupole du Bardo, au moment où trois personnes (un couple de touristes espagnols et un employé du musée) se cachaient dans une salle fermée. Il est, toutefois, important de souligner que le mouvement de solidarité s'est déjà enclenché puisque l'on apprend que quelque 30 personnalités internationales de renom se mobilisent dans le cadre d'un comité de soutien appelant à l'organisation dans les prochains jours d'une grande manifestation internationale à Tunis avec la participation des défenseurs de la liberté et de la démocratie qui viendront du monde entier dire non à la violence, à la haine et au terrorisme. Mesures urgentes Sauf que cet élan de solidarité ne peut porter qu'à la condition qu'il soit épaulé par une mobilisation populaire soutenue elle aussi par une série de mesures urgentes qui rassurent les Tunisiens et ravivent la volonté et l'engagement de nos forces armées et de sécurité intérieure à vaincre le terrorisme. Et c'est bien ce qui a sous-tendu les décisions annoncées hier par le chef du gouvernement à l'issue de la réunion conjointe des conseils de la sécurité et des armées. On a décidé, en effet, d'ouvrir une enquête qui aura à déterminer les lacunes et les responsables qui sont derrière le carnage survenu au musée, d'intensifier la protection sécuritaire des zones touristiques et des institutions de souveraineté, de consacrer de nouveaux crédits dans le cadre du budget complémentaire aux ministères de la Défense et de l'Intérieur et de renforcer les opérations de contrôle sécuritaire dans l'ensemble des régions du pays. A. DERMECH