Par M'hamed JAIBI L'Institut national de la statistique (INS) nous annonce, sur la base du recensement général de la population et de l'habitat de 2014, que 53 mille ressortissants étrangers résident en Tunisie, dont 9.996 Algériens et 8.772 Libyens. Donc, moins de 9 mille citoyens libyens auraient déclaré résider en Tunisie. Est-ce une information, une fausse déclaration ou un jeu sur le sens des mots. Quand on sait que le nombre des Libyens vivant actuellement en Tunisie varie, selon les déclarations, de un million à un million et demi, l'on comprend que les chiffres livrés par l'INS méritent de laborieuses explications. Car si effectivement le terme de «résident» exige qu'un titre de séjour ait été délivré par les autorités tunisienne à ces personnes, il est de notoriété publique que les agents chargés du recensement ne demandent pas à vérifier les documents de nos hôtes, de quelque pays qu'ils soient. Les chiffres et les statistiques sont essentiels pour apprécier la bonne marche des affaires du pays, pour comparer et se comparer, mais à la condition qu'ils soient fondés, argumentés et relativisés. Sinon ils ne rendent pas service mais désorientent. Malheureusement, tant de nos statistiques sont si discutables. Prenons l'emploi. En France, tout passe par le bureau de l'emploi et toute embauche lui est communiquée, aussi parce que tout recrutement est assorti d'une déclaration à la sécurité sociale et à diverses correspondances administratives qui crédibilisent le système et les chiffres. En Tunisie, on a dit en 2011 que le chômage atteignait les 800.000 personnes, sans preuves vérifiables, et l'on affirme aujourd'hui qu'il a baissé sans davantage de preuves. Alors que l'on est tous d'accord que notre faible niveau de croissance ne peut même pas résorber les arrivées sur le marché de l'emploi. Autre exemple, les investissements, créations d'entreprises et d'emploi. Leurs chiffres proviennent des déclarations d'intentions faites auprès de l'Agence de promotion de l'industrie (API), or aucun mécanisme n'a été mis en place pour vérifier si l'investissement projeté est effectivement effectué, si l'entreprise a été créée et si les emplois prévus ont vu le jour. Donc, soyons modestes et constructifs. Il est urgent de mettre en place des chiffres vrais et vérifiables, par le biais d'outils et de mécanismes crédibles et rigoureux. Il est temps.