Organisée par ceux qui les ont connus, approchés, aimés, cette rencontre différait des cérémonies traditionnelles de ce genre. C'est à l'Agora, le lieu de toutes les rencontres, que se célébrait, samedi dernier, l'hommage rendu à deux personnalités tunisiennes qui nous ont récemment quittés : Habib Boularès et Georges Wolinski. Organisé par ceux qui les ont connus, approchés, aimés, cet hommage différait des cérémonies traditionnelles de ce genre. Dans la salle, uniquement des amis, des proches, de l'émotion, de la chaleur. Sur la scène se succédaient les témoignages divers selon les personnalités, et les sensibilités de ceux qui les ont connus. Amel Smaoui évoquait avec humour, sensibilité, tendresse, tristesse, son Wolinski, celui qu'elle découvrait enfant dans les pages des magazines de sa grand-mère, et qui, plus tard, étudiante à Paris, lui ouvrit son cœur et sa maison, l'adoptant lui et Maryse, son épouse, comme une seconde fille. Férid Boughdir, le cinéaste, qui fut avant sa vie de cinéma un fervent dessinateur, racontait, quant à lui, sa quête de son idole, ce Wolinski qu'il rêvait de voir. Mêlant l'autodérision à l'érudition, avec sa faconde habituelle, il brossait un tableau brillant de l'histoire de la caricature, et du parcours de Georges Wolinski. Ahmed Bennys, bien qu'absent, avait voulu participer à cet hommage, et avait laissé un superbe message d'amitié enregistré, qui fit monter les larmes aux yeux de nombreux de leurs amis communs. Maryse Wolinski, très émue, trouvait difficilement ses mots pour remercier, et nul ne pouvait le lui reprocher. L'hommage à Habib Boularès s'était fait en deux temps : une première partie à l'occasion de la présentation du livre de poèmes d'Elodia Turki qu'il avait traduit. Et ce fut à Raja Farhat qu'on avait confié cette mission. Dire qu'il fut brillant, érudit, précis, passionnant est toujours un euphémisme quand il s'agit de Raja Farhat. Dire qu'il nous a beaucoup appris sur ce grand Tunisien, son parcours de militant, ses engagements et ses choix, l'est tout autant. La deuxième partie de l'hommage à Habib Boularès a été faite par la personne la plus proche d'un auteur, c'est-à-dire son éditeur : Karim Ben Smaïl. Celui-ci a évoqué la rencontre avec Habib Boularès, le savoir encyclopédique de l'homme de lettres et d'histoire, la liberté de sa pensée, la qualité de son écriture, la pertinence de ses choix littéraires. Line Boularès, sa compagne, dont bien peu d'entre nous connaissent l'action militante du temps de la guerre d'Algérie, qui l'a toujours accompagné avec une discrétion et un soutien sans faille, a souhaité ne rien ajouter à ce qui avait été dit. Cette rencontre-hommage à l'Agora avait été organisée dans la foulée du prix Hermès, remis la veille, grâce à un collectif d'amitiés : Sophie Zaouche-Bouchard qui a mis en contact les bonnes personnes, Daly Okbi qui les a reçues, et bien sûr Mohamed Aziza et Larbi Ben Attia, du réseau Med 21, sans qui rien de tout cela ne se serait fait.