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Saber Abbes: Comment convaincre les citoyens tunisiens à l'ère de la défiance généralisée
Publié dans Leaders le 24 - 06 - 2019

La Tunisie vote librement depuis octobre 2011. En l'espace de 8 ans, le pays a voté 4 fois. Une constituante en 2011, une législatives et présidentielles en 2014 et une municipales en 2018.
Les sondages, acteur nouveau depuis la révolution, a fait ses débuts timidement en 2011 avant de se confirmer comme acteur montrant un minimum de sérieux en réussissant en 2014 a faire des projections assez proches de la réalités lors des élections.
Aujourd'hui, les derniers sondages ont hissé à la première et la deuxième place des élections présidentielles deux visages connus médiatiquement mais sans réelle assise partisane. Il s'agit de Nabil Karoui, propiétaire de la chaîne de TV Nessma, et de Kaïs Saïd, le spécialiste de loi constitutionnelle à la voix robotique. Avec 23% chacun, ils sont à plus de 13 points d'avance sur leur première concurrente, Abir Moussi.
Malgré toutes les réserves qu'on pourrait avoir sur les sondages, on ne peut pas leur nier leur capacité à détecter des dynamiques ou un début d'ancrage électoral pour un candidat ou un autre. Deux autres points nous interpellent dans le paysage politique tunisien actuel. Le premier est que ces deux figures n'ont pas de structures politiques, d'ailleurs, aux législatives, les sondages donnent premier le « parti de Nabil Karoui », premier sans avoir choisi le nom de son parti, c'est une réelle performance. Le deuxième point est la volatilité des électeurs couplée parfois à une forte abstention. Nahdha a perdu 1/3 de ses électeurs aux législatives, pour en perdre un autre tiers aux municipales, Nidaa Tounes a quasiment perdu 1 million d'électeurs, des CPR ou Takattol ont perdu dans les 300 000 en quelques années. Et les listes indépendants sont sorties vainqueurs des dernières élections municipales.
Ces trois indicateurs sont symptomatiques d'une scène politique non structurée, où aucun travail idéologique n'a été fait et où le débat d'idées est presque inexistant. Les tunisiens n'arrivent pas ou plus à faire confiance aux partis politiques et aux hommes politiques.
Le constat peut sembler un peu dur, mais les faits sont têtus. Les partis n'arrivent plus à mobiliser, ils n'existent plus sur un terrain de plus en plus hostile, et se recroquevillent vers les médias, usant de techniques de communication désuètes, se transformant parfois en simples commentateurs de la vie politique, alors qu'ils étaient supposés en être les acteurs.
Comment gagner la confiance des électeurs dont la défiance n'est plus à démontrer?
La réponse est simple : le tiers de confiance.
En l'absence (ou l'affaiblissement) des structures classiques qui orientaient les individus dans leur choix de vie (l'autorité religieuse, les syndicats, la famille, le quartier au sens tribu), les citoyens n'a que deux sources d'informations qui ont encore son attention: les médias et les pairs.
Les médias ont prouvé leur efficacité en propulsant des «partis médiatiques» au haut des sondages. Quand on est capable de vendre du temps du cerveau humain disponible pour d'autres produits, et en l'ensemble de concurrence sérieuse, il est très aisé de marketer une offre politique de la même manière qu'un produit de grande consommation. Nabil Karoui a très bien su utiliser cette technique à son avantage, et malgré l'absence d'éthique d'une telle démarche, elle n'en reste pas moins efficace. Malheureusement pour Karoui, et heureusement pour la démocratie, cette efficacité est surtout lié à un «ancien monde», et dans le «nouveau monde» il y a d'autres façons de faire.
Reste alors la voie classique, la moins aisée quand on veut avoir une démarche politique sérieuse et respectable, celle des pairs. La politique est d'abord une histoire de personnes. Et quand une personnalité politique a envie d'être entendue, elle doit avoir des relais d'opinion, d'abord dans sa population cible, et au-delà quand on veut être un politicien qui essaie de rassembler la majorité de ces citoyens. Quand on cherche à réparer une fuite d'eau dans son appartement, on demande les coordonnées d'un plombier à sa famille ou à ses amis, quand on fait un achat sur internet, on regarde les notes et commentaires des utilisateurs ou quand on va voir un film ou quand on le télécharge, on regarde souvent sa note sur les plateformes de notation, et dans le cas de films, on a nettement plus de chances d'aller regarder un film quand on voit le commentaire positif d'une connaissance, surtout quand on lui reconnaît un « bon goût » cinématographique. C'est le nouveau monde, il s'oppose à l'ancien monde (d'un point de vue symbolique, même s'ils ont toujours cohabité) et il est porté par les réseaux sociaux sans y être né, le citoyen d'aujourd'hui, défiant fait désormais confiance aux pairs qu'aux experts.
De même, un homme politique a besoin d'être validé par un ensemble de personnes, qui n'auront pas un intérêt directe à le supporter, afin de ne pas diluer le message. Cet ensemble ne se décrète pas du jour au lendemain, un vrai travail de fond dit être réalisé.
Plusieurs pistes sont à suivre. D'abord, la structuration d'un parti politique autour d'idées et de personnes, permettant une démocratie internet et une certaine liberté d'expression en son sein. Chaque fois qu'une personne convaincue parlera en bien de votre partie, c'est une assurance que votre parole sera encore plus impactante et plus crédible que tous que pourrait apporter une notoriété éphémère basée uniquement sur le tube cathodique.
Ensuite, il faut gagner le débat des idées en étant un vrai moteur intellectuel pour la société cible, aussi bien en faisant du benchmark ou en essayant d'innover, mais un parti doit produire des idées qui vont devenir son meilleur messager au fil du temps. Rares sont les partis aujourd'hui qui ont un véritable think tank adossé à leur structure. Le débat d'idées est donc gagné par des spécialistes du show qui n'ont pas la profondeur que doit avoir un parti politique. Sans idées, un parti n'existe pas.
Enfin, un point souvent négligé, la capacité à laisser les autres (les nos partisans) s'approprier les idées du parti en les adaptant à leur réalité et leur vécu. Ces personnes seront des ambassadeurs extrêmement influents car ils ont la confiance de leurs réseaux respectifs. Le nouveau monde exige cela, et l'ancien monde, malgré une attractivité liée à l'immédiateté de ses résultats, n'a aucune viabilité. Le monde apparient à celui qui convainc les pairs.
Pour résumer, un citoyen échaudé par la politique n'aura d'écoute que pour ses pairs. Avoir comme seule ambition de toucher ce «tiers de confiance», cette personne qui l'oreille d'autres personnes devrait être l'unique obsession des partis politiques sérieux.


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