La Banque mondiale alerte sur la chute historique des IDE vers les pays en développement    Tirs de missiles iraniens sur l'entité sioniste : Des dizaines de blessés et d'importants dégâts    Contrebande : Plus de 900 mille dinars de produits saisis dans le sud tunisien    Tunis : des radars automatiques seront installés dans les points noirs    Décès d'Ahmed Habbassi, premier ambassadeur de Tunisie en Palestine    La Chine devrait faire preuve de résilience face aux chocs du commerce mondial    Coupe du monde des clubs – L'EST s'impose face à Los Angeles FC : La copie parfaite !    Espérance – Chelsea : Un duel décisif en préparation à Détroit    Tunisie : Entrée en vigueur des sanctions liées à la facturation électronique à partir du 1er juillet 2025    L'Iran rassure après des frappes américaines sur ses sites nucléaires    Baccalauréat 2025 : 21 lauréats issus de SOS Villages d'Enfants Tunisie    Bac 2025 : Des jumeaux tunisiens brillent dans deux filières différentes    Dar Husseïn: Histoire politique et architecturale    À Istanbul, Nafti condamne l'agression contre l'Iran et appelle à une mobilisation islamique unie    Les Etats-Unis bombardent trois sites nucléaires iraniens    Lancement d'une plateforme numérique dédiée au suivi de l'avancement de la réalisation des projets publics    Sonia Dahmani, sa codétenue harceleuse transférée… mais pas avant le vol de ses affaires    Foot – Coupe du monde des clubs (3e J-Gr:D)- ES Tunis : Belaïli absent contre Chelsea    Les lauréats du baccalauréat 2025 à l'échelle nationale    L'homme de culture Mohamed Hichem Bougamra s'est éteint à l'âge de 84 ans    Promouvoir l'emploi des jeunes en Tunisie: lancement du projet « Tunisie professionnelle »    Alerte rouge sur les côtes de Monastir : des poissons morts détectés !    Baccalauréat 2025 : un taux de réussite global de 37,08%    Ce qu'on écrase, ce qui tient debout    La poétesse tunisienne Hanen Marouani au Marché de la Poésie 2025    « J'aimerais voir l'obscurité » : la nuit confisquée de Khayam Turki    Le ministre du Tourisme : La formation dans les métiers du tourisme attire de plus en plus de jeunes    Accès gratuit aux musées militaires ce dimanche    La Ministre des Finances : « Nous veillons à ce que le projet de loi de finances 2026 soit en harmonie avec le plan de développement 2026-2030 »    Décès d'un jeune Tunisien en Suède : le ministère des Affaires étrangères suit l'enquête de près    69e anniversaire de la création de l'armée nationale : Une occasion pour rapprocher l'institution militaire du citoyen    Face au chaos du monde : quel rôle pour les intellectuels ?    Festival arabe de la radio et de la télévision 2025 du 23 au 25 juin, entre Tunis et Hammamet    Ons Jabeur battue au tournoi de Berlin en single, demeure l'espoir d'une finale en double    Carrefour Tunisie lance le paiement mobile dans l'ensemble de ses magasins    WTA Berlin Quart de finale : Ons Jabeur s'incline face à Markéta Vondroušová    Caravane Soumoud de retour à Tunis : accueil triomphal et appels à soutenir la résistance palestinienne    AMEN BANK, solidité et performance financières, réussit la certification MSI 20000    CUPRA célèbre le lancement du Terramar en Tunisie : un SUV au caractère bien trempé, désormais disponible en deux versions    Grève générale dans le secteur agricole tunisien prévue le 25 juin : la fédération lance un avertissement    Joséphine Frantzen : rapprocher la Tunisie et les Pays-Bas, un engagement de chaque instant    Kaïs Saïed, Ons Jabeur, Ennahdha et Hizb Ettahrir…Les 5 infos de la journée    Berlin Ons Jabeur en quarts de finale face à Markéta Vondroušová    Skylight Garage Studio : le concours qui met en valeur les talents émergents de l'industrie audiovisuelle    Festival Au Pays des Enfants à Tunis : une 2e édition exceptionnelle du 26 au 29 juin 2025 (programme)    Découvrez l'heure et les chaînes de diffusion du quart de finale en double d'Ons Jabeur    Le Palais de Justice de Tunis: Aux origines d'un monument et d'une institution    Tunisie : Fin officielle de la sous-traitance dans le secteur public et dissolution d'Itissalia Services    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Dr Mohamed Salah Ben Ammar: La consultation électronique populaire, une autre occasion ratée ?
Publié dans Leaders le 08 - 03 - 2022

«Le siècle présent n'est que le disciple du siècle passé. On s'est fait un magasin d'idées et d'expressions où tout le monde puise» Voltaire
D'ores et déjà, partisans et adversaires s'accordent à dire que la consultation électronique populaire sera un fiasco. Quel dommage, il y avait de l'idée.
Lancée officiellement mi-janvier, voulue, décidée et initiée par le président de la république elle sera close le 20 Mars. Durant 65 jours, si l'on ne tient pas compte de la période d'essai, les citoyens ont été appelés à répondre électroniquement à un long questionnaire. Les esprits les plus avertis l'avaient prédit, outre les biais méthodologiques et ils sont à enseigner dans les écoles de sondages. Pour la faire courte, nous avons tous eu la désagréable impression de nous faire duper.
Des catégories entières de citoyens, des régions éloignées n'ont pas accès à un ordinateur, les questions étaient ambiguës. Vous êtes pour un régime présidentiel ou parlementaire ? Même (surtout) nos concitoyens les plus éduqués ne savent pas répondre à cette question…L'impréparation, l'amateurisme, l'approche simpliste, la fausse naïveté affichée ostentatoirement par les promoteurs de l'initiative, l'absence de budget dédié, de ressources humaines, des fautes impardonnables à ce niveau de responsabilité d'autant plus qu'on a eu la désagréable impression qu'elles étaient préméditées.
Pourtant les intentions auraient pu être nobles. S'interroger électroniquement au 21eme siècle sur les défis que notre société affronte, aborder des sujets brûlants qui engagent l'avenir du pays aurait pu être un projet avant-gardiste. Il ne fallait pas le planifier dans les « chambres closes » pour reprendre un concept à la mode en ce moment. Le résultat atteint a été contraire aux déclarations d'intentions. Instrumentaliser les questions et les réponses pour atteindre des objectifs autres que ceux déclarés initialement était tellement évident que peu se sont laissé avoir. Le taux de participation, insignifiant après plus de 50 jours, le prouve. La couleuvre était trop grosse à avaler même par les plus inconditionnels ! Pratiquement, il s'agissait de légitimer des choix déjà faits à travers une consultation électronique dite « populaire ». Plus grave, la délégation de pouvoir et la légitimité des représentants du peuple ont été remises en question. Les promoteurs de cette méthode ne s'en cachent pas, ils veulent dialoguer directement avec le peuple. De fait, dans les circonstances actuelles c'était un saut dans l'inconnu.
L'initiative avait du sens. Qui n'a pas ressenti les deux dernières années une sorte d'impuissance citoyenne devant le spectacle affligeant offert par nos élus ? Une grande partie d'entre nous ne se reconnaissent pas en eux. Ce sentiment est d'autant plus rageant que nous avons tous le sentiment que nous méritons mieux. Pour les politiques, l'occasion était trop belle. Marie-Hélène Bacqué, professeure d'études urbaines résume en des termes on ne peut plus clairs ce qui s'est passé «Nous sommes dans une période paradoxale et ambiguë où des outils participatifs sont déployés jusqu'au plus haut niveau de l'Etat, sans que ce travail soit réellement pris en compte dans les décisions finales. Pour beaucoup d'élus, cette injonction participative reste mobilisée comme un argument politique plus que comme un véritable projet d'approfondissement du processus démocratique.». Clairement en réponse aux frustrations des démocraties libérales, ce que d'aucuns ont appelé le "tournant délibératif" pour approfondir le processus démocratique a été instrumentalisé.
Depuis deux siècles la « défiance permanente » envers tous ceux qui occupent un poste décisionnel alimente la presse de caniveau et les partis populistes. A l'ère des réseaux sociaux, les décisions publiques au classique vote majoritaire sont de plus en plus ressenties par la minorité comme des injustices. Dans ce processus trompeur les sites et autres groupes de discussions jouent le rôle de caisse de résonance. Ceux qui partagent les mêmes opinions se retrouvent pour ressasser les mêmes arguments.
«La théorie délibérative soutient que la démocratie doit une part essentielle de sa valeur à la formation des volontés politiques des citoyens. Elle préconise une manière particulière d'organiser cette formation : par la délibération collective.» Oui mais…entre les mains de manipulateurs, la délibération collective devient, comme l'a admirablement exposé le ministre Mustapha Kamel Ennabli dans un article publié le 04 février 2022, « La transe collective » ! (https://www.businessnews.com.tn/la-transe-collective).
De nombreuses démocraties ont entrepris des expériences de jurys, panels, assemblées de citoyens, comités de quartier…dans le but déclaré de renforcer le processus démocratique. Indéniablement, l'avenir des démocraties est dans cette façon de procéder. Mais l'idée a jusqu'à ce jour été presque systématiquement détournée par les politiques dans le but d'imposer un projet ou une réforme.
Notre propre modèle de gouvernance ne ressemble plus à rien. En raison de la pandémie, de la guerre et d'autres facteurs, aussi bien à l'échelle nationale qu'internationale, nous réalisons que nous n'avons pas les moyens de nos ambitions. La consultation populaire électronique n'a pas échappé à cette réalité.
Certes l'engagement direct du peuple dans la décision publique est une approche d'avenir. Evidemment qu'avoir voix au chapitre, et pas seulement une fois tous les 5 ans est une revendication légitime de chaque citoyen. Mais la refondation du modèle démocratique n'est pas une affaire d'amateurs et elle ne peut pas se faire à la va-vite. Réussie elle donnera à ne point en douter un nouveau souffle au système représentatif et il en a grandement besoin, ratée elle creusera le fossé entre les citoyens et la politique. «Il existe désormais un répertoire d'instruments qui ont fait leurs preuves et peuvent être mobilisés par les gouvernements locaux et nationaux pour consulter, se concerter ou coconstruire la décision avec les citoyens», affirme le politologue Loïc Blondiaux. Sans garanties légales, sans moyens technologiques, humains, matériels, financiers cette démarche est vouée à l'échec. Avant toute chose nous devons mettre en place ses instruments sans lesquels le concept de « citoyen-législateur » ne soit pas simplement un instrument de pouvoir.
Il n'en demeure pas moins que ratée ou pas cette consultation électronique fera désormais partie de l'expérience de démocratisation engagée par notre pays le 14 janvier 2011. En effet, comme toutes les nations qui nous ont précédées sur ce chemin, notre processus démocratique n'est pas linéaire, il a connu des hauts et des bas. Il a souvent pris des directions contraires, tantôt libérale tantôt répressive. Il ne faut simplement pas perdre de vue que c'est un apprentissage. Et comme pour les individus, les nations avancent lors des crises. Comme pour les individus, nos échecs nous apprennent plus que nos succès… à condition de savoir en faire, secondairement, des opportunités.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.