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La diplomatie tunisienne : présent et avenir
Publié dans Leaders le 14 - 04 - 2011

Lors de la dernière rencontre-débat entre M. Béji Gaied Essebsi, premier ministre du gouvernement provisoire et les membres de l'instance supérieure pour la réalisation des objectifs de la révolution, les discussions ont porté sur un nombre de dossiers entre autre, la réforme devant toucher notre politique étrangère.
Le premier ministre a rappelé rapidement les règles et les traditions de cette politique sans faire de commentaires sur la situation actuelle de notre diplomatie qui a perdu beaucoup de sa crédibilité au cours de ces dernières années.
I) Notre diplomatie sous la dictature

Ceux qui se sont habitués, dans le passé, à une diplomatie tunisienne pragmatique et réaliste sur la scène internationale ont été surpris après 1987 de constater la dégradation continue de celle-ci.
Dès son accession au pouvoir, le président déchu avait tenu à limiter le rôle de deux importantes institutions dans la gestion des affaires du pays, à savoir l'armée et la diplomatie. Pour ce faire, il avait exercé un contrôle strict sur les cadres de ces deux institutions.
A ce propos, il ne faisait aucune confiance aux diplomates tunisiens formés du temps de l'indépendance. La nomination à un poste diplomatique était devenue surtout une sorte de prime de fidélité qu'on octroyait aux hommes liges du président indépendamment de toute autre considération et des directives avaient été données aux ambassadeurs pour ne prendre aucune initiative avant d'obtenir l'autorisation du ministère et même de la présidence.
A ce sujet, le dictateur s'était attaché à créer graduellement une nouvelle classe de diplomates dont le rôle primordial était de mener des campagnes de propagande portant sur les succès de son régime.
Avec le départ en retraite de diplomates de l'ancienne garde et la mise à l'écart de plusieurs autres, les plus importants postes étaient offerts à des proches du président et de sa famille. La majorité de ces personnes provenaient de diverses professions qui n'avaient aucune relation avec la diplomatie. Mieux encore, en signe « d'ouverture démocratique » du régime vis-à-vis de partis dits d'opposition, quelques uns de leurs militants étaient nommés à des postes d'ambassadeurs. Tous ces abus avaient abouti à des bavures commises par ces nouveaux fonctionnaires qui n'avaient aucune expérience en matière de relations internationales. Ainsi, notre diplomatie avait commencé à perdre de sa crédibilité et de son prestige.
Cette situation avait engendré des sentiments de frustration et de malaise parmi les cadres du Ministère, dont le dévouement au service de la patrie restait exemplaire. D'ailleurs, certains avaient été mis à l'écart c'est-à-dire « au frigidaire » avant même l'âge de la retraite. Ce fut notamment le cas de ceux qui avaient osé élever la voix pour protester contre les injustices commises à leur égard. Signalons à ce sujet que nos diplomates et agents consulaires sont depuis longtemps classés parmi la catégorie de diplomates les moins rémunérés dans le monde et surtout en comparaison avec leurs collègues maghrébins. Aujourd'hui après la révolution, il est temps d'engager une profonde réflexion sur l'avenir de notre diplomatie et les réformes urgentes à entreprendre.
Il faut beaucoup de courage et d'originalité pour définir des réformes devant s'inspirer de nos priorités en matière de développement économique et social. Il est impératif de procéder à une révision des objectifs de notre diplomatie selon les données actuelles de la coopération internationale et à la lumière des leçons apprises dans le passé. Il ne s'agit pas tant de concevoir une nouvelle approche que de répondre d'abord à une simple question à savoir quel est I' état actuel de nos relations sur le plan sous-régional, régional et international qui ont été en quelques sortes endommagées sous l'ancien régime. Pour tout cela, notre diplomatie ne doit pas seulement connaître une simple réforme, mais subir une révision profonde.
Il faut signaler encore un fois que notre place sur la scène internationale avant 1987 n'avait rien de comparable avec la situation actuelle. Ainsi, en raison des violations continues des droits de l'homme dans notre pays, l'Europe avait presque tourné le dos à la Tunisie, alors que la presse européenne ne parlait plus que des dérapages de l'ancien dictateur. Depuis des années, les USA n'accordaient plus d'importance à notre rôle sur la scène internationale par comparaison avec ses relations avec le reste des pays arabes (Depuis Bush père, en 1989, Ben Ali n'a pas mis les pieds à la Maison blanche).
D'ailleurs, nos relations avec ces pays se caractérisaient par une froideur et presque une ignorance mutuelle. Ainsi la Tunisie n'était plus invitée qu'occasionnellement à participer à des réunions inter-arabes intéressant les problèmes de la région. A l'exception de relations plus ou moins tièdes avec la Libye, l'Algérie et le Maroc, I'ancien dictateur ne semblait guère intéressé à jouer un rôle quelconque sur le plan international.
A vrai dire le « roi était nu » car le monde entier était au courant des pratiques de ce président assoiffé de pouvoir absolu et responsable de crimes de corruption et de pillage de l'économie tunisienne.
Il brillait par son absence de la plupart des sommets et réunions des chefs d'état arabes, africains, non-alignés, francophones et des Nations-Unies. Les quelquefois où il avait eu le courage d'y participer, c'était souvent pour une seule journée, juste pour assister à la cérémonie d'ouverture. D'ailleurs, les responsables des institutions onusiennes se sont plaints que la voix de la Tunisie se soit tue et n'offrait plus de nouvelles idées ou de suggestions constructives comme par le passé.
II) Quelques grandes lignes de réforme de notre diplomatie
La Tunisie doit retrouver, aujourd´hui, la place qui lui revient sur la scène politique internationale. L´avantage de notre pays, c´est qu'elle dispose d´un capital humain de haut niveau en plus de cadres compétents qui maîtrisent le secteur de la technologie et de l´information (TIC). De plus, notre révolution a suscité un grand espoir et rallumé une flamme éteinte depuis longtemps à savoir l´amour de la patrie. Nous voilà donc libérés des séquelles de la dictature. Aussi notre diplomatie a l´image du dynamisme de notre jeunesse peut-elle à nouveau s'illustrer.
Quelle nouvelle diplomatie et quelles réformes devons-nous entreprendre pour marquer notre retour dans la scène internationale qui a connu plusieurs mutations ? Peut-on concevoir une coopération active et pragmatique avec le reste du monde, en commençant par les pays arabes ?
Apres la révolution, la Tunisie peut compter sur l'immense capital de sympathie pour ne pas dire la confiance accordée par plusieurs pays à la Tunisie pour reconstruire son économie et continuer sa marche vers le progrès, bien qu'il faille ne pas se faire trop d'illusions sur les bons sentiments que nourrissent les uns et les autres à l'égard de notre pays. En politique, il n'y a que les intérêts qui régissent les relations entre pays.
La Tunisie doit ainsi donner une priorité absolue à consolider ses relations avec tous les pays du Maghreb. La stabilité de ces pays dépend de leur niveau de coopération et de politique solidaire pour faire face à tous les problèmes intérieurs et extérieurs. Cette coopération doit inclure entre autres la lutte contre les mouvements extrémistes mais également la définition d'une position unifiée dans leurs relations aussi bien avec l'Europe qu'avec le reste du monde.
II faut commencer par éliminer d'abord tous les facteurs de suspicion mutuelle. Maintenir le statu quo ne sert l'intérêt d'aucun pays mais contribuerait à retarder le développement de la région entière. Les pays maghrébins ont besoin de stabilité politique pour des raisons claires à savoir assurer un développement humain durable. Dans ces conditions tous les efforts peuvent être concentrés sur les projets de développement en faveur des couches sociales défavorisées et la répartition équitable des fruits de la croissance.
La Tunisie doit améliorer sa coopération avec l'ensemble des pays du Golfe et les encourager à participer activement à des projets de reconstruction de notre économie en leur accordant des garanties raisonnables. Notre pays dispose déjà de lois qui offrent des avantages appréciables et une infrastructure routière et portuaire moderne. A ce sujet, il est important de rappeler qu'aujourd'hui diplomatie et développement sont des priorités qui vont de pair et agissent de façon indissociable. C'est pour cette raison que pour attirer les investissements étrangers surtout dans le secteur de nouvelles technologies et accroître les échanges commerciaux, il faut se prévaloir d'une main d'oeuvre hautement qualifiée. Tout cela implique une réforme de notre système d'éducation toute en lançant divers programmes de formation de jeunes cadres travaillant dans les secteurs de biens et de services.
A ce sujet, l'encouragement du tourisme avec ces pays du Golfe, vu la richesse de notre culture, ne peut que drainer des ressources financières importantes. Il s'agit de lancer des campagnes de publicité ciblées en vue d'offrir un produit qui tient compte de leurs habitudes et traditions.
La Tunisie située sur une terre africaine doit joue un rôle de plateforme ouverte, liant L'Afrique au reste des continents. Il faut remarquer qu'à ce jour, la Tunisie n'a pas fait l'effort nécessaire pour développer ses relations commerciales, techniques et culturelles avec la majorité des pays africains. Bien sûr, il faut avoir « les moyens de sa politique» toutefois la Tunisie peut jouer un plus grand rôle dans le domaine de la coopération technique en envoyant un plus grand nombre d'experts vers ce continent. A ce sujet on doit s'intéresser en plus des pays francophones aux pays Anglophones comme I'Afrique du sud, la Namibie, la Tanzanie, le Nigeria…etc. Il ne faut pas oublier que la Tunisie bénéficie d'un grand prestige à cause de I'aide qu'elle avait octroyée à tous ces pays durant leurs luttes nationales contre le colonialisme. Il est indéniable que la Tunisie surtout après la révolution du 14 janvier peut prétendre occuper une place géopolitique particulière dans la région méditerranéenne.
Notre développement économique et social doit effectivement bénéficier d'une attention particulière de la part de l'Europe et surtout les pays situés au nord de la Méditerranée. Il est possible qu'on peut apprendre beaucoup de l'expérience de certains pays émergents surtout la Turquie, la MalaisIe, le Brésil et I'Inde. L'exemple de Singapour? pays qui possède très peu de ressources naturelles et qui se classe parmi les pays développés, est à méditer.
Il n'y a pas de miracles sauf celui d'imaginer une approche réaliste, et créative en s'appuyant sur une administration moderne libre de toutes les entraves de contrôle et des carcans de la paperasse.
On ne peut oublier l'importance de développer notre coopération avec les USA avec lesquels, on entretient des relations historiques et traditionnelles de plus de deux siècles.
Ce pays peut nous aider surtout à former plus de cadres dans ses universités et nous assister pour accéder aux nouvelles technologies de l'information. Certaines sociétés multinationales américaines doivent être encouragées à créer dans notre pays des centres de recherches et des pôles de transfert de technologies. Le rôle grandissant qu'occupe la Chine dans l'économie mondiale et l'accroissement de ses échanges commerciaux avec tous les partenaires, doivent nous inciter à renforcer nos relations avec ce pays et à bénéficier de son soutien en matière d'assistance scientifique et technologique. Il est utile de se pencher sur l'étude de I'expérience chinoise et à cette occasion on doit se préparer à développer l'enseignement de la langue chinoise et à s'ouvrir beaucoup plus sur la culture de ce pays. On vit aujourd'hui dans un monde semblable à un village ouvert à tous, aussi l'élargissement de nos représentations et missions diplomatiques et économiques dans les pays émergents de I'Asie et de l'Amérique latine ne peut que profiter a notre économie par la diversification de nos marchés et le développement de notre industrie touristique.
Ce n'est pas de moindre importance, que de souligner notre longue histoire de coopération avec les organisations des Nations Unies. Pour cela on est appelé à initier une meilleure approche pour améliorer ces relations avec toutes les institutions, politiques et financières internationales.
Nos cadres qui ont servi dans cette organisation ont été un exemple de compétence et de dévouement. Rappelons à ce sujet le rôle prestigieux joué dans les instances internationales par des personnalités tunisiennes comme Mongi Slim, Mahmoud Mestiri et Mohamed Ghrab. Aujourd'hui, d'autres tunisiens et tunisiennes continuent à servir cette organisation avec le même ardeur et efficacité. La Tunisie n'a cessé de militer pour la paix internationale et participe activement au maintient de cette paix par l'envoi de plusieurs contingents militaires dans plusieurs pays victimes de guerres civiles.
Il reste que pour tout cela, il faut procéder à une réforme réaliste pragmatique de notre diplomatie en commençant par la réorganisation administrative de tous les services du Ministère des affaires étrangères. Il est temps de penser à préparer dans l avenir une nouvelle génération de diplomates capables de percevoir les exigences des nouveaux défis dans les relations internationales.
La performance de nos diplomates va dépendre également de la confiance qu´ont doit leur accorder dans le respect de leurs droits à un niveau de vie décent qui est une exigence pour représenter dignement notre pays.
Finalement il ne faut pas oublier que nos diplomates ont donné dans le passé la preuve de leur compétence, ce qui a contribué à assurer la sécurité de notre pays et le développement de notre économie. Ils ont réussi à offrir une image fascinante de notre civilisation et de nos valeurs reflétant ainsi l´humanisme d'une société ouverte depuis la nuit des temps sur toutes les cultures et croyances dans le monde.
Salah Bourjini
*Universitaire, Ancien Résident Coordonnateur / Représentant des Nations Unies
Ancien Haut fonctionnaire, UNDP (N.York ).


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