La Tunisie, plateforme régionale pour la coopération économique maghrébine    Kaïs Saïed, Rayan Khalfi, Sherifa Riahi… Les 5 infos du week-end    Foire du livre de Tunis : affluence record, mais ventes en baisse    Tunisie – Kasserine – Bouchebka : Saisie de kits de communication utilisés pour tricher aux examens    Tunisie – Démantèlement d'un réseau de trafic de drogue opérant entre Tabarka et Béja    Le président chinois en visite officielle chez Poutine    Stand de La Presse à la FILT: Capter l'émotion en direct    Tunisie – Augmentation des ventes des voitures pour le premier trimestre 2025    Tunisie – METEO : Pluies orageuses sur le nord et le centre    Handball – Coupe de Tunisie : L'Espérance remporte le derby face au Club Africain et file en finale    Tunisie – Demain dernier délai de payement de la vignette pour ce type de véhicules    Victoire capitale pour la Tunisie face au Kenya (3-1) en Coupe d'Afrique U20    Affaire du détenu à Bizerte : le ministère de la Justice dément les allégations de torture    Brésil : un attentat à la bombe déjoué lors du concert de Lady Gaga à Rio    Un bon procès n'est pas uniquement un verdict mais aussi et surtout des procédures et des réponses    Amnesty International: La liberté de la presse au Bénin menacée, un appel à réformer le Code du numérique    Tunisie : Saisie de fausse devise étrangère sur un individu à Ben Arous    Ligue 1 – 28e journée : Le CAB et le Club Africain dos à dos à la mi-temps    Monde: Un lourd bilan humain de plus de 52 mille martyrs à G-a-z-a    Un fonds d'aide pour les personnes âgées en Tunisie : voici tout ce qu'il faut savoir    Ariana : deux syndicalistes du secteur judiciaire traduits devant le conseil de discipline    Deux bateaux chavirent en Chine : environ 70 personnes à l'eau    Un nouveau séisme frappe la Turquie    Fake news, crise des médias… Zied Dabbar propose un fonds pour protéger l'information professionnelle en Tunisie    Incendies de forêts en Tunisie : appel à une réforme législative pour l'utilisation des drones    La FAJ appelle à une utilisation responsable de l'IA pour protéger le journalisme en Afrique    Coupure d'électricité aujourd'hui dans plusieurs régions en raison de travaux de maintenance    Des millions d'Israéliens se réfugient dans les abris après la chute d'un missile yéménite près de l'aéroport Ben Gourion    L'Allemagne, première destination des compétences tunisiennes en 2025    Décès du journaliste Boukhari Ben Salah: Hommage émouvant du SNJT    Les exportations turques atteignent un niveau record de 265 milliards de dollars    «Mon Pays, la braise et la brûlure», de Tahar Bekri    Trump se montre en pape sur son compte numérique    France : un Prince qatari se baladait à Cannes avec une montre à 600 000 €, ça a failli mal tourner    Le chanteur libanais Rayan annonce sa guérison et rend hommage à la Tunisie    La Tunisie célèbre 69 ans de diplomatie indépendante    GAT VIE : une belle année 2024 marquée par de bonnes performances    Décès du producteur Walid Mostafa, époux de la chanteuse Carole Samaha    Le Canal de Panama: Champ de bataille de la rivalité sino-américaine    Tunisie : Découverte archéologique majeure à Sbiba (Photos)    La STB Bank plombée par son lourd historique, les petits porteurs à bout !    Gymnastique rythmique : la Tunisie en lice au Championnat d'Afrique au Caire    Drame en Inde : une influenceuse de 24 ans se suicide après une perte de followers    Nouveau communiqué du comité de l'ESS    La Liga: Le Rwanda désormais un sponsor de l'Atlético de Madrid    Foire internationale du livre de Tunis 2025 : hommages, oeuvres et auteurs primés au Kram    L'Open de Monastir disparait du calendrier WTA 2025 : fin de l'aventure tunisienne ?    Décès de la doyenne de l'humanité, la Brésilienne Inah Canabarro Lucas à 116 ans    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La Tunisie à la croisée des chemins de la réglementation prudentielle internationale?
Publié dans Leaders le 25 - 11 - 2011

Depuis le milieu des années 1990, le comité de Bâle présidé par W. Mc Donough, n'a pas cessé la refonte du ratio de solvabilité international anciennement connu sous le nom de son fondateur « Cooke ». La succession des réformes a donné naissance à une réglementation prudentielle dite « de Bâle II » appuyée sur 3 piliers.
• Le premier pilier relatif aux exigences minimales en fonds propres suggère le passage d'une méthode purement quantitative et forfaitaire à une méthode ajoutant le qualitatif au quantitatif en rendant l'allocation de capital plus sensible à la qualité intrinsèque des risques.
• Le deuxième pilier relatif à la surveillance par les autorités de contrôle et basé sur quatre principes 1) un contrôle interne rigoureux permettant de s'assurer de la couverture de l'ensemble des risques encourus, 2) une surveillance qui permet de s'assurer de la conformité du processus mis en place et définir les objectifs des revues périodiques à conduire, 3) une habilitée à imposer des niveaux de fonds propres supérieurs au minimum réglementaire, et 4) une intervention préventive des autorités de contrôle en cas de besoin.
• Le troisième pilier relatif à la discipline de marché, qui suggère d'améliorer la transparence à travers la communication régulière des informations financières au marché (niveau et structure détaillée des fonds propres, expositions aux risques, modes de gestion des risques de crédit, de marché, opérationnel, de taux).
Face aux limites de ce système démontrées par la crise financière internationale et ses impacts sur les systèmes financiers occidentaux, de nouvelles propositions ont été formulées par le Comité de Bâle à la fin de l'année dernière. Ces propositions visent à harmoniser davantage la définition des fonds propres réglementaires et à renforcer la capacité d'absorption des pertes des établissements de crédit. Parmi ces propositions, on cite :
- Améliorer la qualité des fonds propres : en proposant une classification à deux niveaux des fonds propres , à savoir, 1) les fonds propres durs (Tier I) destinés à absorber les pertes durant un cycle d'exploitation ; 2) les fonds propres complémentaires (Tier 2) (subordonnés aux créances ordinaires et ayant une maturité d'au moins cinq ans) permettant d'absorber les pertes seulement en cas de faillite.
- Harmoniser les ajustements réglementaires : qui seraient appliqués au niveau du noyau dur des fonds propres .
- Renforcement des exigences minimales : telles que récapitulés dans le cadre du tableau suivant :
PROPOSITIONS DE BALE III
RATIOS
Bâle II
Bâle III
Années d'application
Ratio de levier minimum (Tier 1/ dettes)
-
3%
2018
Ratios pondérés au risque



1-Fonds propres durs minimum
-
4.5%
2015
2-Coussin de précaution
-
2.5%
2019
3- Ratio de fonds propres de base (Tier 1) minimum
4%
6%
2015
4- Tier 1+2 minimum
8%
8%
2013
Coussin en capital contra-cyclique

0-2.5%
2019
Ratio de couverture en liquidité (réserves de liquidité/fuites de liquidité)
-

2018
Ratio de financement net stable (besoins en ressources stables/ ressources stables)
-

2018
Déductions des fonds propres durs (bénéfices non distribués)
-

2018
L'implémentation de Bâle II et dans un second temps de Bâle III en Tunisie constitue l'un des principaux défis auxquels le régulateur devra faire face au cours des prochaines années. En effet, le système bancaire tunisien reste en retard par rapport aux meilleurs systèmes du continent africain et notamment l'Afrique du Sud et le Maroc. Le Maroc a adopté Bâle II depuis 2007 avec la mise en place d'une approche standard de Bâle II pour le risque de crédit. Le passage vers des méthodologies plus avancées devrait se faire dans les années à venir au fur et à mesure que le système et le régulateur aient le recul et les données nécessaires pour ce faire. En Tunisie, un groupe de travail a été créé au sein de la Banque Centrale pour étudier et proposer les étapes clés de l'adoption de Bâle II. La date d'adoption initialement prévue était pour 2010 avec passage des lois, décrets et circulaires nécessaires à la mise en place d'un nouveau cadre d'adéquation de fonds propres réglementaires en conformité avec Bâle II. Cependant, à fin 2011 et à notre connaissance aucun de ces textes n'a été publié.
Il convient de souligner que l'adoption de Bâle II ou de sa version révisée plus rigoureuse et plus complexe nécessite un certain nombre de préalables. Une adoption d'une version 1.5, comme cela a été fait dans plusieurs pays émergents, avec une réadaptation des pondérations des différentes classes d'actifs basée sur des calculs grossiers serait préjudiciable pour le système bancaire tunisien surtout que l'environnement actuel est plus que propice au passage des réformes nécessaires. En l'absence de ces mutations, le système bancaire tunisien sera condamné à faire du sur-place et à accentuer son retard par rapport aux autres marchés voisins. Parmi ces préalables, deux piliers nous semblent plus important que les autres, notamment :
1 - La consolidation du système bancaire : qui à notre sens permettrait de résoudre deux problèmes majeurs : premièrement, la rareté des fonds propres en Tunisie et la prépondérance de l'effet de levier. En effet, la majorité des banques tunisiennes distribuent des dividendes en dépit de leur faible qualité des actifs. Il faut concéder le fait que la définition des créances douteuses en Tunisie est assez conservatrice mais toujours est-il qu'au jour d'aujourd'hui un certain nombre de banques se trouveraient en graves difficultés s'il y avait une vrai discipline de marché ou si la probabilité de soutien de l'Etat est amenée à diminuer pour des raisons de capacité ou autres. Il faut aussi concéder que la BCT peut interférer parfois et obliger certaines banques à retenir leurs bénéfices. Un mouvement de restructuration du système bancaire similaire à ce qui a été fait au Maroc en début des années 2000 est nécessaire. L'émergence d'un champion national public (qui verra le jour par la fusion STB, BH et BNA et qui pourrait éventuellement regrouper les autres petites ex- banques de développement en mal de stratégie) et d'un champion national privé (qui naîtra de la fusion de BIAT, Amen Bank et BT) ne peut qu'être favorable pour le système puisque cela devrait permettre un gain considérable en matière d'envergure et offrir davantage de moyens financiers à ces banques afin de mettre en place les réformes nécessaires en systèmes d'information, sophistication des outils et recrutement de haut calibres d'une part et d'autre part en matière d'innovation et de diversification de l'offre bancaire. En effet, le marché bancaire tunisien pourrait être assimilé aujourd'hui à un marché de produits standards et où la concurrence se fait principalement sur les marges au détriment de la qualité de service.
2 - Le renforcement des capacités du superviseur : Il faut reconnaître que la BCT a effectué un très bon travail en termes de supervision sur les vingt dernières années. Contrairement aux régulateurs Européens et à ceux de certains autres marchés émergents, la cellule de supervision bancaire au sein de la BCT était parfaitement informée des moindres détails liés au système bancaire. Cependant, le monde évolue et les méthodes de supervision actuelles pourraient rapidement montrer leurs limites en cas de crise systémique qui surviendrait d'un événement totalement non-anticipé et qui heurterait par exemple une classe d'actifs qu'on croyait jusque-là à l'abri de chocs tout comme les crédits immobiliers acquéreurs. Le renforcement des capacités de la BCT nous semble donc une étape importante à franchir avant de commencer le chantier de réformes. Le recrutement de cadres hautement qualifiés avec des expériences et des compétences adaptées, ou une mise de l'accent sur la formation du personnel existant, ne peut qu'être bénéfique et pourrait donner un coup d'accélérateur aux chantiers de réformes. Une intégration opérationnelle des techniques de stress tests par exemple, dans la gestion des risques, telles qu'elles sont préconisées par Bâle II, devrait faire partie des objectifs premiers des superviseurs tunisiens. Aussi bien en approche « top down » (de haut en bas, pour mesurer l'effet de chocs sur l'ensemble du système bancaire) que « bottom-up » (partant du bas, sur une base individuelle à l'échelle des banques elles-mêmes), ces tests ne font que renforcer le processus de supervision et apporter une pierre à l'édifice de la gestion opérationnelle des risques au sein des banques.
Dans le sillage des crises économiques, ces exercices de stress tests sont particulièrement intéressants. Ils permettent de tester la résilience du système bancaire aux chocs macroéconomiques. Techniquement, il s'agit de fixer deux scénarios : un scénario « central » (prévisions de la Banque centrale) et un scénario « adverse », sévère mais plausible (ralentissement de la croissance, hausse du chômage, hausse des créances douteuses, etc.) et de mesurer les impacts de ces chocs macro-économiques sur les volumes et les risques de crédit portés par les banques, sur la valeur de leurs actifs et in fine sur leurs ratios de solvabilité.
La mise en place de tests de résilience dans le cadre d'un dispositif de surveillance macro-prudentielle est l'une des avancées prudentielles où la BCT reste relativement en retard en comparaison avec les banques centrales occidentales. Cela dit, au lendemain de la révolution tunisienne et de ses conséquences macroéconomiques et étant donné la nécessité de déterminer les impacts de cet événement (ou d'autres événements) sur le système bancaire, la BCT a montré un intérêt pour le développement d'une supervision macro-prudentielle. La mise en place de telles pratiques est non seulement nécessaire sous Bâle II mais permettrait de rassurer les investisseurs locaux et étrangers par rapport aux risques du système bancaire comme démontré par les Stress Tests Européens conduits au milieu de la crise financière de 2008-2009.
Une fois ces deux piliers implémentés, la construction d'un nouvel édifice plus solide pourrait commencer. Les banques auraient la taille critique et les ressources financières pour mettre en place les chantiers nécessaires en termes d'amélioration de systèmes d'information, de capacités de gestion de risque et de stratégie à moyen et long termes. Le superviseur aurait la capacité de contrôler la marche en avant du système bancaire en mettant à sa disposition les outils nécessaires et des données plus transparentes et fiables. Cependant, Bâle II pourrait avoir des effets indésirables à court terme surtout dans un pays où le système bancaire est appelé à jouer un rôle fondamental étant donné la faible profondeur du marché financier. Nous dénombrons trois principaux effets :
• Un rationnement et un renchérissement du coût de crédit pour les entités les plus risquées notamment les Petites et Moyennes Entreprises généralement créatrices d'emploi dans un environnement marqué par un fort taux de chômage et un besoin important de création d'emploi. Ce rôle pourrait éventuellement être confié à des entités spécialisées publiques telles que Banque de Financement des Petites ou Moyennes Entreprises ou privées telles que des fonds d'investissement ou autre. Une définition plus claire de l'appétence au risque des champions nationaux ou des autres banques de la place pourrait également permettre un accès des PME aux financement au risque de voir la sélection devenir un peu plus rigoureuse ce qui ne peut être que positif pour le système bancaire.
• Un affaiblissement de la qualité des fonds propres des banques étant donné la nécessité d'optimiser le couple structure de fonds propres/rentabilité. Ce cas a été notamment observé au Maroc avec la montée significative des émissions de dettes subordonnées sur le marché local pour financer l'expansion rapide des crédits et les ambitions de développement de l'activité à l'international. Une optimisation de la politique de fonds propres est certes souhaitable mais le régulateur devrait veiller à fixer des exigences minimales relativement élevées de fonds propres durs et adaptées au marché Tunisien afin d'éviter les effets pervers de retournement de cycle sur le système bancaire tel qu'il est préconisé par les recommandations de Bâle III, sans toutefois tomber dans le conformiste aveugle aux exigences minimales internationales.
Dr Anissa Naouar Damak


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.