Paru aux éditions Cartaginoiseries, le livre de Abdelaziz Bey sur l'histoire du Kram donne enfin un ouvrage de référence à cette ville de la banlieue nord. Du domaine de Kram l'Agha à la ville cosmopolite du vingtième siècle, c'est une plongée dans le génie des lieux à laquelle nous invite cet ouvrage richement illustré... Les éditions Cartaginoiseries ont récemment publié un ouvrage de Abdelaziz Bey qui porte le titre de "Le Vieux Kram" et propose de retrouver quelques pages d'histoire de cette banlieue au nord de Tunis. L'auteur est un haut cadre aujourd'hui à la retraite qui propose des souvenirs vécus dans sa ville natale et arpente les méandres de l'histoire de cette ville. Qualifiant Le Kram de cité des figuiers au centre des jardins de Carthage, Abdelaziz Bey développe son propos en 250 pages qui ne laissent pas indifférent et sont en prime richement illustrées par des photographies d'époque dont la plupart proviennent des albums familiaux. Connaissez-vous Kram Lagha? Le livre est préfacé par Mohamed El Aziz Ben Achour qui éclaire le lecteur sur le sens du terme Kram qui désigne cette localité. En effet, Ben Achour écrit: "Jusqu'au milieu du dix-neuvième siècle, c'était ici le vaste domaine de Mustapha Agha, haut dignitaire beylical. Les figuiers semblent avoir occupé dans cette exploitation une place éminente puisque le nom de ce qui devint la localité présentée dans le livre est tiré de l'expression Kram Lagha, ce qui signifie Les figuiers de l'Agha". Le livre de Abdelaziz Bey présente aussi bien un rappel historique qu'une rétrospective du vécu de cette charmante localité multiculturelle. La postface de Khaled Lasram souligne d'ailleurs ce cosmopolitisme du Kram avec sa population "composée à la fois d'autochtones et de colons originaires pour la plupart de Sicile, de Malte ou du midi de la France". Lasram continue en soulignant que l'auteur " a voulu à travers son récit nous raconter l'histoire d'une ville telle qu'elle a été et telle qu'il l'a vécue" en y réussissant pleinement. L'ouvrage est clairement structuré en dix chapitres qui abordent tous les aspects de l'histoire et du présent. Adossé à une importante bibliographie, l'auteur ne délaisse aucun détail et tente d'être le plus précis possible dans son évocation des lieux. Il se penche d'abord sur la localisation du Kram par les historiens et les géographes, remontant jusqu'aux sources latines et apportant des éclairages par les textes. Il aborde ensuite la complexité de la population du Kram et ses origines dans un troisième chapitre qui est le plus fourni de l'ensemble. Une oeuvre utile et documentée Ceci dit, ce sont successivement les activités commerciales, celles liées aux loisirs ou au sport qui forment ensuite l'ossature du livre qui n'omet aucune enseigne, aucune association, aucun café de ceux qui ont laissé des traces dans la mémoire populaire. C'est ensuite au tour des établissements scolaires et des lieux de culte d'être étudiés dans leur diversité, avec l'objectif de transmettre une mémoire encore vivante. Comme il se doit, l'ouvrage se termine par une évocation de la plage du Kram, lieu cardinal pour tous les habitants de la ville. Le propos de Abdelaziz Bey navigue entre nostalgie et devoir de mémoire. Tout en déplorant certaines dérives et pollutions, l'auteur se consacre à son propos central: celui de transmettre le vécu et l'histoire d'une ville. Et il y parvient fort bien, photos et cartes postales d'époque à l'appui. Mieux, l'ouvrage regorge d'anecdotes, de citations, de rappels que seuls le génie des lieux peut capturer. Avec ce livre, l'auteur fait oeuvre utile et apporte au Kram l'ouvrage qui lui manquait. En effet, de La Goulette à Carthage, toutes les villes ont un livre de référence et, enfin, grâce au travail de l'auteur, Le Kram a le sien. Une oeuvre utile, documentée et de surcroît agréable à lire.