L'accord d'Astana sur la création de zones de "désescalade" en Syrie a permis de réduire les violences même si des combats se poursuivent dans la région de Hama, ont dit hier un chef terroriste et l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Ce pacte tripartite scellé jeudi par la Russie, la Turquie et l'Iran est entré en vigueur vendredi à minuit. Il prévoit la création de quatre zones où les forces gouvernementales et l'opposition armée doivent cesser tout combat, ce qui inclut aussi les frappes aériennes, selon le texte de l'accord diffusé hier par le ministère russe des Affaires étrangères. Moscou, Ankara et Téhéran s'engagent cependant à prendre toutes les mesures nécessaires pour poursuivre la lutte contre l'organisation terroriste Etat islamique, l'ex-front al Nosra et d'autres groupes "terroristes" à l'intérieur et à l'extérieur de ces zones de sécurité. L'arrêt des hostilités doit s'étendre sur une période de six mois, éventuellement renouvelable après accord des trois Etats parrains du processus. L'accord prévoit enfin que ces zones permettront l'accès à l'aide humanitaire et à l'assistance médicale et favoriseront le retour des déplacés et la reconstruction des infrastructures. L'accord d'Astana a été rejeté par la rébellion, qui accuse la Russie, alliée de Damas, de ne pas avoir la volonté ou la capacité de contraindre le régime de Bachar al Assad et les milices chiites soutenues par l'Iran à respecter les trêves. Le gouvernement syrien a dit soutenir l'initiative mais prévenu qu'il poursuivrait dans tout le pays sa lutte contre les groupes "terroristes". Une carte d'ici début juin Sur le terrain, l'OSDH a constaté hier une réduction de la violence, tout en estimant qu'il était encore trop tôt pour juger des chances de voir cet accord s'installer dans la durée. Aucun décès n'a été enregistré depuis vendredi soir minuit, a ajouté l'ONG basée à Londres. Le village d'al Zalakiyat, tenu par les rebelles, et des positions voisines ont été touchés par des frappes aériennes, a précisé l'OSDH. Les forces gouvernementales ont également visé les localités voisines de Kafr Zita et Latamneh. Mohamed Rachid, porte-parole du groupe insurgé Djaïch al Nasser basé à Hama, a confirmé que des combats s'étaient poursuivis après minuit. L'armée syrienne n'a pas fait de commentaire D'après le texte de l'accord diffusé hier, les trois Etats parrains du processus engagé à Astana, capitale du Kazakhstan, pour consolider un cessez-le-feu proclamé fin décembre, définiront d'ici au 4 juin les cartes des zones de désescalade. Le ministère russe de la Défense a indiqué que la plus grande zone de sécurité allait couvrir la totalité de la province d'Idlib, entièrement aux mains des terroristes, ainsi que des secteurs adjacents des provinces de Lattaquié, Alep et Hama abritant en tout plus d'un million d'habitants. Les trois autres zones se trouvent dans le nord de la province de Homs, dans la région de la Ghouta orientale à l'est de Damas, et le long de la frontière jordanienne dans le sud de la Syrie. L'accord d'Astana a été salué comme un pas dans la bonne direction par l'envoyé spécial des Nations unies sur la Syrie, Staffan de Mistura, qui s'emploie parallèlement à encourager des pourparlers de paix entre belligérants à Genève. Le secrétaire général de l'Onu, Antonio Guterres, s'est dit encouragé par l'initiative. Les Etats-Unis, qui ont mené un raid contre le régime syrien après l'attaque à l'arme chimique de Khan Cheikhoune début avril, imputée à Damas, ont exprimé leur scepticisme. "Nous continuons à avoir des réserves sur l'accord d'Astana, concernant notamment l'implication de l'Iran comme soi-disant 'garant'," a déclaré le département d'Etat dans un communiqué. La Russie suspend son activité aérienne Le ministère russe de la Défense a annoncé la suspension de toute activité aérienne dans ces régions, situées à Idleb, au nord-ouest, au nord de la province de Homs, dans la Ghouta orientale de Damas et à Deraa, au Sud. Le directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme, Rami Abdel Rahmane, a confirmé que depuis le début du mois de mai, aucune frappe de la part des avions russes n'a été observée. Encouragée par les réactions internationales plutôt favorables à l'accord des zones sécurisées, conclu jeudi avec la Turquie et l'Iran, la Russie veut faire vite. Avant même la fin de la délimitation géographique de ces quatre régions, d'ici au 22 mai, les avions russes ont cessé, à partir de vendredi minuit, toute activité au-dessus des zones concernées. Des experts des trois pays garants ont commencé des réunions avec les belligérants pour s'entendre sur les détails. Pour renforcer cet accord, Moscou envisage d'y associer la Jordanie, surtout que l'une des zones sécurisée, celle de Deraa, est limitrophe du royaume hachémite. Des postes de contrôle et des centres de surveillance du cessez-le-feu, tenus conjointement par les forces des pays garants, et par les belligérants seront installés dans les quatre zones. La trêve ne concerne pas les groupes terroristes, contre lesquels la guerre va redoubler d'intensité. Dans ce contexte, le général Sergueï Roudskoï de l'état-major russe, a annoncé que « les troupes gouvernementales syriennes libérées grâce à la création de ces zones de désescalade seront redirigées pour la poursuite de l'offensive contre le groupe Etat islamique. » Des sources syriennes précisent que le prochain objectif sera de briser le siège imposé par les terroristes la ville orientale de Deir Ezzor, non loin de la frontière avec l'Irak.