La question avait été soulevée il y a quelques temps sans avoir un réel écho. Aujourd'hui, les chauffeurs de taxis individuels et leur syndicat reviennent à la charge et pointent de nouveau du doigt le covoiturage. Ils évoquent même cette fois-ci le terme de « confrontation ». De quoi se plaignent-ils ? Cette pratique citoyenne, adoptée dans le monde entier et reconnue pour ses avantages économiques et écologiques, menace-t-elle réellement leur gagne-pain ? Comptent-ils vraiment la faire interdire ? C'est au tout début des années 80 que le covoiturage a fait son apparition aux Etats Unis en tant qu'alternative de transport reconnue et efficace. De nombreuses campagnes ont alors été lancées afin d'encourager les propriétaires de véhicules à partager leurs trajets quotidiens avec des salariés ou des étudiants, en contrepartie d'une somme décidée d'avance entre les deux parties. Le but étant de désengorger les routes et de fluidifier la circulation. En Europe, ce n'est qu'une dizaine d'années plus tard que le covoiturage a fait son apparition, remportant d'emblée un succès fou grâce notamment à l'essor des nouvelles technologies et de la connectivité accrue. Grâce à l'émergence des réseaux sociaux et par la suite des applications sur téléphone, le phénomène a vite séduit et le nombre d'adeptes a rapidement crû. En Tunisie, le covoiturage est apparu il y a quelques années, cinq au plus. Une apparition timide et une utilisation qui a certes augmenté ces derniers temps, mais sans vraiment réussir à s'imposer en tant qu'alternative de transport reconnue et adoptée. Outre un manque flagrant de communication, les appréhensions autour du covoiturage sont nombreuses, notamment d'ordre sécuritaire selon les différents témoignages de plusieurs utilisateurs qui ont alors changé d'avis et adopté cette alternative. Des groupes sur les réseaux sociaux ont depuis fait leur apparition et de nombreux utilisateurs, surtout des jeunes, déclarent avoir trouvé en cette alternative une solution à leurs problèmes de transport quotidiens. Mais depuis quelques temps, le covoiturage semble poser problème aux chauffeurs de taxis individuels et de louages qui y voient une réelle menace pour eux et pour cause ! Economique et écologique, le covoiturage permet également un gain de temps considérable et un réel confort de transport. Ainsi, les deux parties se mettent d'emblée d'accord sur le parcours, la somme d'argent remise au propriétaire du véhicule ainsi que sur le lieu et l'heure du départ. Une vraie aubaine pour ceux qui peinent chaque jour à se rendre à leur lieu de travail ou à en rentrer et ils sont de plus ne plus nombreux. C'est ce qui explique donc la grogne des chauffeurs de taxis individuels et collectifs qui ne voient pas cela d'un bon œil. Interviewé à ce propos, Moez Sellami, Président de la Chambre syndicale des taxis individuels, a qualifié le covoiturage de pratique illégale, expliquant que transporter des individus dans un véhicule privé en contrepartie d'argent est contraire à la loi. Continuant sur sa lancée, il a également brandi la menace d'une prochaine confrontation, affirmant que les demandes du syndicat étaient de réguler le secteur des taxis et d'appliquer la loi en interdisant toute activité similaire qui ne respecterait pas les lois en vigueur. Concrètement, sera-t-il possible d'interdite le covoiturage et surtout l'Etat y a-t-il intérêt ? N'ayant que des avantages, serait-il sage de le prohiber et d'en punir les utilisateurs surtout que le transport est, sans conteste, l'un des talons d'Achille du pays et que ses problèmes ne se comptent pas. La solution serait-elle de laisser les citoyens à la merci des chauffeurs de taxis qui ont entamé, à de nombreuses reprises ces dernières années, des mouvements de grève à travers tout le territoire, handicapant le quotidien de milliers de citoyens et les empêchant de se déplacer ? Pourquoi faut-il qu'à chaque fois qu'une solution alternative est trouvée pour faciliter la vie des citoyens, des voix s'élèvent pour la pointer du doigt et tenter de la récuser et de la faire interdire ? La solution ne résiderait-elle pas plutôt à améliorer les services offerts par les transports en commun et les taxis pour que le citoyen n'aient pas à choisir entre eux et des alternatives ?