Economia : Comment vous est venue l'idée de proposer une offre pour la privatisation de la SOCOMENA ? Claude Miguet : Au départ, il s'agissait d'une offre d'appel lancée par l'Etat. Mais presqu'aucun investisseur n'a pu y répondre vu la quantité de travail qu'il fallait engager pour réparer les dégâts. Ensuite, le gouvernement a proposé de recevoir des offres de la part des investisseurs privés pour en choisir une. Et c'était notre offre qui a été retenue. J'ai une expérience de 35 ans dans l'industrie de la réparation navale, et que j'ai de même travaillé dans plusieurs pays comme l'Argentine, Madagascar, la France. J'ai aussi assisté à plusieurs effondrements de sociétés dans le domaine, j'ai donc appris comment remédier à ce genre de situation. Notons que plusieurs paramètres ont joué en notre faveur, puisque ce domaine est en plein boom en ce moment. En dépit de ce boom justement, cela profite bien à la société. A présent si le marché connaissait une stagnation, comment votre société réagirait-elle par rapport à cela ? Claude Miguet : en cas de stagnation, on n'aura pas trop de problèmes. Maintenant la société est en ordre de marche. Et le plus important c'est de pouvoir le faire pendant une période propice, parce qu'on revient de loin. La situation de la SOCOMENA était très desastreuse et l'entreprise allait presque être fermée. On l'a redemandé et on a investit 8 MD sur trois ans, on a embauché et formé 470 personnes employées de façon permanente. On a de même augmenté les salaires et modifié le rythme de travail en temps plein de 24h/24 et le dimanche si cela s'avère nécessaire. Même si il y a stagnation ou une récession, notre chantier restera très compétitif dans la région. La société retrouvera une productivité équivalente à celle qui existe en Europe, parce que notre société a tous les atouts, puisuq'on a une masse salariale plus intéressante que dans les autres pays européens. Il nous reste encore quelques compétiteurs qui sont au niveau du prix parfois plus intéressants que nous comme la Croatie, le Monténégro et un peu en Turquie. vous pensez alors que la société ne craint plus rien maintenant qu'elle est sur les rails et qu 'elle a dépassé les énormes difficultés ? Claude Miguet : La situation est complètement différente par rapport ce que c'était avant. La principale différence c'est la privatisation. Si cette société n'avait pas été privatisée, quel que soit le marché, elle serait passée à côté, de toutes façons. Parce qu'elle était renfermée sur elle-même. Le caractère public l'a pénalisée et les salariés dépassaient la demande réelle en effectif. Continuer à payer dans les 1 MD ou plus de salaires sans contre partie en travail, cela conduisait à la faillite sans aucun doute. Il fallait bien que la société régularise ses comptes, puisqu'elle ne payait ni électricité, ni eau, ni même la Sécurité Sociale. La privatisation a donc permis d'injecter du savoir-faire commercial et technique et de l'argent pour investir. Cela était le préalable : privatiser ensuite investir. En plus, les salariés n'étaient pas motivés, si les employés viennent au travail sans avoir envie de travail, une chose est sûre, le client s'en ira. Il fallait alors faire adhérer les gens au projet de privatisation. Il fallait aussi investir pour remettre en état l'infrastructure. les effets de la privatisation visiblement positifs furent-ils immédiats ? Claude Miguet : Justement les retombées de la privatisation furent immédiates et directs sur les trois ans et à tous les niveaux. Bien que le processus ait pris énormément de temps pour être concrétisé. Dès que la société a été privatisée, on a tout de suite remarqué des effets positifs sur l'emploi, l'infrastructure et même les équipements. Pourquoi le processus de privatisation fut-il si lent ? Claude Miguet : Parce que le système qui a été choisi au départ n'était pas le bon. D'ailleurs la décision de privatiser la société a dû empêcher les politiques de dormir pendant un certain temps, tellement c'était dur. Il y a eu un investisseur portugais intéressé mais il est vite parti puisque il n'a pas trouvé son compte. Il faut savoir qu'il y a un niveau de risque que personne ne peut prendre. Il y avait 30 MD de pertes accusées par la SOCOMENA et peut être qu'en grattant un peu elles seraient de l'ordre de 35 MD. Il n'y avait pas d'adéquation entre les capacités de la sociétés et les demandes réelles. Le schéma n'était donc pas complet. Propos recueillis par Nadya B'CHIR LOUATI.