Le Temps-Agences - La politique étrangère américaine aura connu un mois d'août difficile, et le prochain président américain sera confronté à des dossiers particulièrement ardus lorsqu'il prendra place en janvier dans le bureau ovale. L'invasion russe de la Géorgie et la démission du président pakistanais Pervez Musharraf ont souligné la difficulté qu'avait Washington à maintenir son influence dans le monde. La relation privilégiée que le président George Bush a tenté d'entretenir avec Musharraf et son ex-homologue russe Vladimir Poutine n'a guère eu d'effet sur les crises en Géorgie et au Pakistan. "Le mois d'août a été très difficile pour George Bush. Deux des alliés les plus importants qu'il avait choisis au début de sa présidence pour l'épauler dans la guerre contre le terrorisme - Poutine et Musharraf - l'ont grandement déçu", note Bruce Riedel, de la Brookings Institution, un laboratoire d'idées politiquement orienté à gauche. Tout n'est cependant pas noir pour le successeur de Bush. La nette baisse des violences en Irak, où le conflit lancé en 2003 est pour beaucoup dans la perte de légitimité des Etats-Unis sur la scène internationale, devrait permettre un retrait militaire à plus ou moins brève échéance. Le candidat démocrate, Barack Obama, a promis de rapatrier la quasi-totalité des militaires américains dans un délai de seize mois, tandis que son rival républicain John McCain souhaite les maintenir au moins jusqu'à la stabilisation complète du pays. Les analystes notent d'autres succès de la diplomatie américaine, en particulier les engagements pris pour le développement et la santé en Afrique, le renforcement des liens avec la Chine, le retour de la Libye dans la communauté internationale et l'amorce de dénucléarisation du régime nord-coréen. Ces réussites semblent toutefois largement éclipsées par les échecs les plus marquants. Le processus de paix au Proche-Orient est dans l'impasse, de même que les efforts diplomatiques autour du dossier nucléaire iranien. L'instabilité du Pakistan alimente le conflit en Afghanistan, tandis qu'en Europe, la Russie entend rétablir son ancienne sphère d'influence. Les Etats-Unis n'ont en outre pas su faire entendre leur voix dans le désastre humanitaire du Darfour, et ne sont plus guère écoutés dans les discussions sur le réchauffement climatique. L'Amérique latine n'est plus depuis longtemps le pré carré de Washington, qui n'y compte plus guère comme allié de premier plan que le président colombien Alvaro Uribe. Les huit années de la présidence Bush ont été presque entièrement définies par les attentats du 11 septembre 2001 à New York et à Washington. La situation en Afghanistan, premier pays visé par la Maison blanche après ces attaques, est plus difficile qu'elle ne l'a jamais été depuis le renversement du régime des taliban. Le refuge que ces derniers ont trouvé dans les zones tribales du Pakistan, où se trouvent également de nombreux combattants d'Al Qaïda, est officiellement hors de portée de l'armée américaine. Washington risque de plus d'avoir des difficultés à nouer des liens avec le nouveau gouvernement pakistanais en raison de son soutien passé à Musharraf, contre lequel une procédure de destitution avait été engagée. "C'est un énorme défi, étant donné que l'actuel gouvernement pakistanais est bien moins désireux que Musharraf de lutter contre les taliban", souligne Stephen Flanagan, spécialiste de la sécurité internationale au Centre d'études stratégiques et internationales (CSIS). Sur un autre front, les relations de la Maison blanche avec le Kremlin se sont nettement dégradées, et le conflit engagé par la Russie en Géorgie pourrait annoncer une nouvelle ère de tensions entre les deux anciennes puissances rivales de la Guerre froide. La Russie, humiliée au début des années 1990 par la désintégration de l'URSS, s'appuie désormais sur ses immenses richesses en hydrocarbures et n'hésite plus à s'opposer à certains projets américains, en particulier le bouclier anti-missiles que Washington entend bien installer en Europe de l'Est. "Celui qui fera son entrée dans le bureau ovale en janvier aura largement de quoi s'occuper", résume Gary Schmitt, directeur des études stratégiques de l'American Enterprise Institute.