Elles sont nombreuses à se réveiller tôt le matin pour collecter les déchets en plastique sur les autoroutes, à garder les voitures dans les parkings ou même à vendre des sandwichs sur le bord de la route. Elles sont veuves, divorcées, et même mariées, mais elles vivent en précarité. Ces dames, que nous croisons dans différents endroits, sont dans l'obligation de subvenir à leurs besoins par leurs propres moyens sans aucune aide familiale. Solitaires ou mariées, elles prennent en charge leurs enfants avec les moyens de bord. Toutefois elles doivent jongler entre deux ou même trois boulots, rien que pour survivre.
En été, en hiver, tôt le matin ou pendant la journée, les utilisateurs des autoroutes croisent sur leurs chemins des femmes en train de collecter les déchets sur le terre-plein central. Vêtues de tenues bleues, une bande rose ou vert fluo pour qu'elles puissent être repérées, ces dames passent leur temps à ramasser les déchets jetés par les automobilistes. Un grand sac en plastique à la main, elles se déplacent tout au long de la journée pour assurer la propreté du site contre une somme d'argent insignifiante. Mais ce travail reste indispensable pour cette frange de la société qui doit subvenir à ses besoins indépendamment des aides insuffisantes. Quelques-unes sont, même, responsables d'une famille, à cause du désengagement du mari qui n'accorde pas beaucoup d'intérêt à cette structure sociale ou qui est incapable lui-même de répondre à toutes les demandes familiales.
D'autres habitent à proximité des aires de repos, sur les autoroutes notamment (Tunis-Msaken-Sfax), et choisissent d'assurer des petits services assez rentables. Elles vendent des sandwichs à un dinar la pièce ou du pain traditionnel « Tabouna », (350 millimes). Elles pointent quotidiennement et durant toute la journée dans ces stations, elles attendent avec impatience qu'un client débarque de son semi-remorque ou de sa camionnette pour demander un sandwich. Car, c'est bien cette clientèle qui vient le plus souvent solliciter leurs prestations. Les autres automobilistes se contentent parfois de jeter un coup d'œil en passant où d'acheter tout simplement du pain. Certes, une telle tâche n'est pas facile pour ces dames. Elles font des sacrifices pour gagner un revenu qui reste tout de même insignifiant. La recette journalière ne peut dépasser dans les cas extrêmes les 15 dinars.
Gardiennes de parkings Idem pour les femmes qui gardent les parkings de voitures. Un paysage qui est devenu fréquent ces dernières années. Dès qu'un événement ou une foire est programmée au palais d'exposition du Kram, des femmes, assurent la garde des voitures des visiteurs. Pauvreté oblige d'après une dame présente sur les lieux, la quarantaine bien sonnée. « Je suis solitaire, j'ai des enfants à ma charge et je dois subvenir à nos besoins », témoigne-t-elle avec amertume. Elle ne cache pas son mécontentement à cause des conditions de vie qu'elle mène. « Mon mari nous a expulsés de la maison, je suis actuellement locataire et je dois jongler avec deux ou trois boulots pour survivre ainsi que mes enfants », d'après-elle. Un badge accroché à son cou -faisant référence à la municipalité du lieu, son nom et prénom au recto, le tampon du ministère de l'Intérieur et des Collectivités Locales au verso- prouve que cette quadragénaire bénéficie du soutien des autorités locales. « Cependant, c'est un travail occasionnel étroitement lié à l'activité économique de la foire », rétorque-t-elle. Et d'ajouter ; « Si je ne suis pas ici, je travaille en tant qu'aide-ménagère ». C'est le seul moyen pour cette mère de famille de survivre. Car les quelques dinars qu'elle gagne durant ces occasions demeurent insuffisants. Se faufilant entre les voitures, la dame surveille les automobilistes qui comptent quitter le parking. Elle se présente entre-temps pour faire signe qu'elle était en train de garder minutieusement le véhicule. « Je me contente de la somme qu'ils me donnent, je n'exige rien ». Des femmes en difficulté, solitaires mais responsables de famille, il y en a beaucoup dans notre pays. Elles sont dans l'obligation de se débrouiller pour offrir le nécessaire à leurs enfants, leurs frais de scolarité et s'assurer un logement... Elles enchaînent dans ce cas plusieurs travaux modiques qui exigent un effort physique usant à long voire à court terme. Mais les choix pour ces femmes restent très limités et parfois n'existent pas. Il faut travailler ardemment pendant des longues heures et dans des conditions défavorables pour survivre.