Demain, les établissements de l'enseignement de base et du secondaire entreront en vacances pour la énième fois cette année. Pour seulement trois jours cette fois, mais c'est toujours ça de pris aussi bien pour les élèves que pour leurs enseignants. Ce n'est pas pour les envier que nous soulevons la question du nombre excessif des vacances accordés dans l'enseignement. Après tout comme diraient certains, les vacances c'est « sacré » ; pas question donc de les contester ; même si jusqu'à une date toute récente, nous croyions que c'était le travail qui devait mériter notre vénération. En fait, l'ennui est dans le danger d'habituer très tôt les nouvelles générations à la fréquence des congés et à l'impérieuse nécessité de ces haltes répétées. Imaginez un sportif auquel vous accordez toutes les demi-heures une pause d'un quart d'heure et un congé de trois jours toutes les semaines. Quelles performances peut-on attendre d'un tel athlète dans les grandes compétitions ? Sera-t-il en mesure de rivaliser avec des adversaires qui s'entraînent plus régulièrement et se dépensent à une fréquence plus élevée.
Droits inaliénables ! L'autre risque c'est que toute reprise au retour des vacances étant pénible, les enseignants eux-mêmes mettront du temps pour retrouver leur rythme de croisière et pour reprendre goût au travail assidu. Au sujet des élèves, le besoin nouveau que créent en eux les vacances à répétition donne lieu à une dépendance des plus nocives quant à leur rendement ultérieur. Petit à petit, ils ne pourront plus se passer de ces congés qui ne seront plus alors sollicités comme faveurs mais comme droits inaliénables. D'où d'ailleurs ce sentiment de commettre un sacrilège en évoquant les vacances scolaires pour en dénoncer la fréquence abusive.
Les fainéants de demain Mais pour parler plus objectivement et avec moins de passion, la récurrence des congés ne peut produire demain que des fainéants, que des tire-au flanc, que des flemmards, que des apathiques, que des travailleurs qui ne le sont pas, que des agents tout juste bons pour, tout le temps, se tourner les pouces et présenter après deux jours de présence une demande de cinq jours de repos, que des secrétaires qui quittent cinquante fois leurs bureaux pour aller aux toilettes, pour prendre un encas avec le collègue du bureau voisin, pour aller faire des courses en ville ou même pour jouer une partie de cartes avec les copains, pour papoter avec les fonctionnaires de l'étage supérieur (ou inférieur, si ça change quelque chose)etc. L'école forme ainsi les futurs bureaucrates improductifs pour qui deux choses comptent par-dessus tout au boulot : le salaire et les congés. Si au moins ce qu'ils perçoivent en contrepartie de leur indolence les contentait, si au moins ils se satisfaisaient des congés qui leur sont accordés, on n'aurait peut-être rien trouvé à dire ni à redire. Mais le problème c'est que les plus paresseux sont ceux qui n'arrêtent pas de revendiquer des augmentations salariales et des suppléments de congés.
Virus contagieux Aujourd'hui, même les agents bancaires qu'on comparait autrefois à des fourmis tant leur ardeur au travail était constante et leur rendement optimal, même ces travailleurs ont attrapé le virus de l'indolence. Beaucoup d'entre eux ont été recrutés sur la base de critères qui n'ont rien à voir avec les aptitudes et les compétences. Résultat : se sachant couverts par leurs protecteurs occultes mais influents, ils narguent et leurs supérieurs et les règlements, et les horaires, et les clients pressés et les touristes impatients ! Comme pour les stupéfiants, il existe une accoutumance aux vacances et aux congés qui confine dans certains cas à la toxicomanie ! Nos étudiants en sont presque tous atteints à l'université : figurez-vous que ce sont eux désormais qui ont le dernier mot pour ce qui est des arrêts des cours et de la durée effective des vacances. Celles de l'hiver et du printemps qui ne durent officiellement qu'une quinzaine de jours sont invariablement précédées ou/et suivies d'une prolongation de deux jours ou d'une semaine selon les humeurs de nos futurs cadres. Ils en sont arrivés aujourd'hui, à envier leurs camarades du primaire et du secondaire pour les congés qu'ils ont en plus, du coup les vacances du 7 novembre par exemple qui ne durent que deux jours au Supérieur, s'étendront sur une semaine et ce pour garantir une certaine « équité » entre tous les cycles de l'enseignement ! Les professeurs qui devraient être les premiers à s'en alarmer tendent ces derniers temps à subir le diktat des étudiants, non sans un discret soulagement ! C'est tant mieux ainsi pour ceux d'entre eux qui n'attendent que de tels cadeaux pour se libérer entièrement à leurs recherches ou à leur oisiveté !