Les effets de la crise financière internationale commencent à rejaillir sur la Tunisie. Les experts ont déjà prédit qu'elle toucherait l'industrie des composantes de l'automobile, le tourisme, le textile-habillement et ... L'huile d'olive. A ceux qui s'interrogent sur le lien entre ces secteurs, il est aisé de répondre qu'il s'agit de secteurs dénotant de la prospérité régnant dans une société. Lorsque les tableaux de bord financiers sont au vert, on change plus fréquemment sa voiture, on achète des fringues de meilleure qualité et on voyage plus. De même pour l'huile d'olive, elle a certes des avantages hygiéniques et culinaires mais, c'est l'une des huiles alimentaires les plus chères à l'échelle internationale. Le prix d'un litre d'huile conditionnée dépasserait facilement les cinq Euros (9 dinars). Or, la ménagère pourrait s'en passer dans sa cuisine et la substituer par une autre, moins chère. Une telle tendance influerait systématiquement sur la demande en huile d'olive tunisienne sur le marché international. L'exportation de cette denrée a rapporté à la Tunisie une moyenne de 700 millions de dinars durant les trois dernières années. Les quatre secteurs sus-cités ressentent déjà les effets de la crise et, spécialement, le secteur de l'exportation de l'huile d'olive. Toutefois, il faut reconnaître que l'aggravation de cette crise n'est pas uniquement le résultat des retombées de la crise financière internationale. Le secteur de l'huile d'olive en Tunisie ne s'est pas encore remis de la crise de la campagne 2006, due à une mauvaise lecture des tendances à l'échelle internationale. Laquelle crise a généré de lourds contentieux pour les professionnels (oléifacteurs et exportateurs) auprès du système bancaire avec des ardoises de centaines de millions de dinars, donc, difficiles à absorber à courts termes. Donc, les temps de prospérité sont désormais révolus. L'huile d'olive reste certes parmi les produits les plus exportés par la Tunisie. Mais, si le prix moyen du litre d'huile d'olive à l'exportation était respectivement de 3,847 dinars en 2007 et de 4,497 dinars en 2008. Ce prix est descendu maintenant jusqu'à près de 2,790 dinars, ce qui constitue un problème pour tout le secteur. Par ailleurs, la diversification des marchés a joué un rôle important dans le renforcement de la capacité d'export du secteur durant les dernières années. De nouveaux marchés ont été ciblés : la Suisse, la France, les Etats-Unis et le Maroc. Cependant, beaucoup reste à faire en matière de promotion de l'huile d'olive tunisienne à l'échelle internationale. Mais, les données ont changé maintenant avec l'installation de la crise financière internationale. En plus, il faut reconnaître que le secteur de l'huile d'olive ne parvient pas à s'autoréguler depuis l'abandon par l'Office National de l'Huile « ONH » de son rôle régulateur en 2006. L'absence d'indicateur sur les prix a perturbé le marché et le secteur est devenu à la merci des spéculateurs. C'est la raison pour laquelle la crise s'est fait ressentir à partir de 2006. La Tunisie ne dispose pas d'exportateurs aux reins solides et dotés de capacité de stockage. On énumère plus de cent exportateurs qui se répartissent avec l'Office National de l'Huile un marché de moins de 200.000 tonnes d'huile d'olive, soit une moyenne de deux mille tonnes par exportateur, voire moins que ça. Il ne peut s'agir que d'intermédiaires. Or, face aux géants italiens en la matière, et le prolongement de la crise l'a déjà démontré aux dépens de nos professionnels, l'ère de grâce des intermédiaires est révolue.
Dépendance de l'exportation et appel à l'ONH La crise s'est d'autant plus ressentie que ce secteur vital pour l'économie tunisienne dépend essentiellement de l'exportation. Rappelons au passage qu'il fait vivre plus d'un million de Tunisiens et que ses segments (de l'agriculteur à l'exportateur) sont fortement liés les uns aux autres. Lorsqu'un maillon de la chaîne bascule, c'est toute la chaîne qui est dérégulée. Et si certains pourraient s'aventurer à dire que c'est à l'avantage des consommateurs, ils se tromperaient lourdement car la chute des prix à l'exportation a des conséquences néfastes sur l'équilibre de la balance commerciale agroalimentaire qui a été généralement bien servie cet équilibre. Cette situation a poussé les professionnels à appeler l'Office National de l'Huile, à la rescousse. Ils expriment le vœu de le voir se manifester, réagir et reprendre son rôle qui était et qui devrait être encore le sien, c'est-à-dire celui d'une structure régulatrice du marché et protectrice des intérêts nationaux. Faute d'exportateurs de grand calibre, ayant les moyens financiers et logistiques et surtout une capacité financière suffisante de stockage, l'intervention de l'ONH s'impose : « C'est le seul organisme capable de défendre les intérêts nationaux. Ce n'est pas normal que l'on vende le litre d'huile à 1,55 Euro. C'est un bradage de notre richesse nationale. Il faudrait que les autorités décrètent un prix minimum à l'exportation pour rassurer tous les intervenants et mener à bon port l'actuelle saison et tout le secteur. Une prise en main de la situation par l'Office est impérative, sans quoi, les oléifacteurs et les exportateurs sont menacés de faire faillite ! », s'exclame un professionnel qui poursuit concernant les contentieux avec les banques : « Déjà, les professionnels traînent encore les ardoises de la crise de 2006 qui ont été rééchelonnées. Ils sont maintenant face à un cumul de dettes et sous la pression du respect de leurs engagements à l'égard des banques. Du coup, ils sont obligés de vendre et il y a des rapaces sur le marché qui guettent de telles occasions. Or, il s'agit d'une richesse nationale et l'administration doit intervenir pour la protéger. Il faut, d'abord, injecter des capitaux à l'ONH pour lui permettre d'éponger l'excédent d'huile d'olive sur le marché et éviter le bradage. Ensuite, les oléifacteurs et / ou exportateurs insistent sur le rétablissement de l'ONH dans son ancien statut qui lui accorde la prérogative de fixer à chaque début de campagne, un prix référentiel ainsi qu'un prix minimum à l'exportation. Car actuellement, les oléifacteurs sont souvent induits en erreur par toutes sortes de rumeurs et ne savent pas à quoi s'en tenir exactement. Enfin, il est nécessaire d'entamer sérieusement la mise à niveau du secteur stratégique surtout avec l'émergence de nouveaux concurrents potentiels à l'échelle internationale comme la Syrie, la Turquie, le Chili ou l'Algérie. Il faudrait notamment rajeunir les forêts et développer le conditionnement. L'huile d'olive tunisienne est vendue essentiellement en vrac. 1% seulement de la production nationale est mis en bouteille et vendu sous un label tunisien, d'où la nécessité d'un partenariat entre tous les intervenants du secteur pour contribuer à la maîtrise du conditionnement de l'huile d'olive tunisienne. L'objectif étant d'améliorer la compétitivité et de mieux se positionner sur les marchés internationaux »
L'ONH observe Du côté de l'Office National de l'Huile, on affirme que ses experts suivent avec une attention particulière les cours des événements. Ils estiment que s'il est vrai qu'il y a des ventes à des prix très bas comparativement aux années précédentes, ceci n'est pas un fait spécifique à la Tunisie mais, c'est tout le marché de l'huile d'olive à l'échelle internationale qui a régressé. La même source poursuit que, comme pour la récolte des olives de l'actuelle saison, où l'ONH était prêt à intervenir pour éviter le bradage, il reste vigilant pour observer les cours des ventes de l'huile d'olive tunisienne à l'échelle internationale et interviendra au moment opportun. La situation n'est pas hors-contrôle.