Le temps scolaire est devenu un objet de préoccupation tant pour les administrations scolaires que pour les enseignants et les parents. Les initiatives pour améliorer la performance scolaire à travers la modification des rythmes scolaires restent très limitées. L'enjeu est de réorganiser la vie scolaire de façon à en faire un levier pour améliorer la qualité des apprentissages et contribuer à l'épanouissement des élèves. C'est dans ce cadre que s'inscrit la conférence nationale organisée, à Hammamet, à l'initiative de la Fédération générale de l'encadrement et des conseillers pédagogiques relevant de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT). Des enseignants, des conseillers pédagogiques et des représentants du ministère de l'Education et de la Formation ont pris part à cette conférence, pour un échange d'idées en vue de l'amélioration de la performance scolaire à travers la modification des rythmes scolaires.
Le temps scolaire est devenu un objet de préoccupation pour les enseignants qui attendent avec impatience la réorganisation de l'horaire scolaire. Mais que pensent-ils de la semaine de cinq jours ? Néji prof de maths apprécie les idées émanant de cette conférence d'Hammamet : « Je pense que l'élève qui fait 30 à 35 heures de cours n'a plus de temps pour faire du sport, ou d'autres activités en dehors de l'école. Un horaire plein n'aide pas l'élève à s'épanouir. Si l'élève étudie matin et soir, il n'a plus de temps pour réviser ses cours. Le soir il rentre tard. Fatigué, il est obligé de dormir. Les élèves qui craquent sont nombreux même s'ils n'ont aucun problème ni en cours, ni avec leurs amis ni dans leurs familles. D'où la nécessité d'alléger l'horaire scolaire actuel et pourquoi pas opter pour la semaine de cinq jours qui convient aussi bien aux élèves qu'aux parents. » Sami professeur d'arabe estime que « alléger l'horaire scolaire n'est pas une solution. Alléger les programmes et raccourcir voire supprimer les heures de cours consisterait à en brader le contenu. Mieux répartir le rythme des cours sur l'année, à savoir raccourcir les vacances.» Samia prof de philo avoue qu'elle est très favorable à la semaine de cinq jours. « Les enfants, dit-elle, auront tous leurs après-midis libres pour faire leurs devoirs ou participer à des activités extrascolaires. Mais qui va s'occuper de nos enfants l'après midi ? Et là il faut créer des clubs d'animation à l'école pour meubler leurs loisirs » Pour Héla enseignante d'anglais : « L'idée est intéressante, mais il faut prendre garde qu'elle ne soit pas le prétexte de réduire le nombre d'heures des enseignements fondamentaux garantissant un socle de culture générale ». Najet professeur de physiques nous précise : « nous devons suivre le modèle scandinave, beaucoup plus axé sur la culture et l'épanouissement de l'enfant ... Ce système moins rigide que celui français permet, je pense, une meilleure ouverture d'esprit et des activités plus diverses : art, sport, travail manuel. D'où le nécessité de réduire la semaine de six jours à cinq jours voire même à quatre jours». « L'organisation de la journée de l'élève, rétorque Nehla enseignante de français, devrait toujours respecter une double alternance entre le travail et le repos. Ce qui est nécessaire pour le développement de l'intelligence. Cette double alternance doit être présente dans l'emploi du temps quotidien et pas seulement dans l'emploi du temps hebdomadaire de l'élève et personnellement j'apprécie cette réforme du temps scolaire qui réduira la semaine à cinq jours et qui évitera à nos élèves les déplacements inutiles, les heures creuses, les bagarres dans la rue et ces cartables lourds » Kamel BOUAOUINA
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Badr Hermassi (Secrétaire général de la Fédération générale de l'encadrement et des conseillers pédagogiques)
« Oui, pour la semaine scolaire de cinq jours et la séance unique de cinq heures »
Le Temps : Pourquoi votre Fédération a-t-elle décidé de repenser le temps scolaire ? Badr Hermassi : Je pense qu'il faut partir du vécu de l'élève pour comprendre la réalité de l'école tunisienne. L'école doit permettre à l'élève d'être acteur de son avenir. L'élève doit pouvoir mieux se faire connaître et se situer par une pédagogie visant à l'épanouissement ce qui n'est pas réalisé actuellement. De nos jours, l'école apparaît trop souvent comme un monde clos. Elle est écartée du monde extérieur sur les plans culturel, artistique, économique. Plusieurs réformes ont été formulées pour restructurer notre système éducatif. Elles ont attiré l'attention des responsables sur de nombreuses lacunes notamment les rythmes d'apprentissage et la gestion du temps scolaire qui constitue en effet un des chantiers nécessitant encore efforts et améliorations. Mais, Il semble que toutes les réflexions, débats, rencontres, tables rondes n'aient rien changé. Les enseignants expriment leur inquiétude. Face à des classes difficiles, des absences répétées (25 millions durant les 112 jours réels passés et enseignés en classe), des classes hétérogènes, des parents indifférents et surtout l'amplification de la violence, l'école ne peut plus carburer à merveille. L'élève est devenu démotivé. Le métier de l'enseignant est difficile. Les enseignants évoquent fréquemment leurs difficultés à tenir leur classe, à capter l'attention de leurs élèves. Le fossé s'est creusé entre parents et école. Les contenus disciplinaires sont trop souvent sacrifiés, au profit du maintien de la cohésion de la structure scolaire. Tous ces facteurs n'ont pas permis à l'école de jouer son vrai rôle. La mauvaise répartition du temps scolaire est responsable de cette situation. En fait, nos élèves submergés par les vacances, les trois semaines d'examens trimestriels, les trois semaines de correction, n'étudient en fait que 112 jours réellement soit à peu près quatre mois (Les élèves allemands vont en moyenne 208 jours par an à l'école, alors que les élèves français n'y vont que 180.). L'élève qui est censé passer 55 minutes en classe n'étudie que 40 minutes. Ajouter à cela les retards cumulés à cause de son déplacement d'une classe à une autre et un emploi du temps qui ne répond pas à ses besoins. L'élève est obligé parfois de passer 10 heures à l'école par jour. Les heures creuses se multiplient et on ne pense plus à l'intérêt de l'élève. Ce dernier est contraint à passer des heures et des heures dans la rue et cela se répercute sur son rendement et son comportement. Et ce n'est pas par hasard que la violence est devenue monnaie courante devant nos lycées.
L'aménagement du temps scolaire est un sujet qui concerne tous les intervenants dans le système éducatif. Quelle solution selon vous ? Les élèves réussissent mieux en classe s'ils évoluent dans un contexte adapté à leur quotidien et à leur rythme. En révisant l'horaire scolaire, l'école atteint plus facilement ses objectifs. De même, l'échec scolaire et la déperdition s'en retrouvent atténués. Tous les acteurs doivent donc être impliqués pour la réussite de cette réforme. Les enseignants, les conseillers pédagogiques et l'administration doivent être impliqués pour la construction d'un nouveau modèle d'organisation scolaire plus cohérent et surtout plus efficace. Aujourd'hui, il est grand temps de diminuer les horaires des cours à la classe pour laisser plus de temps à l'élève. Notre système préventif vise à réaménager le temps scolaires sur des bases solides. En tant que Fédération, nous sommes partis des écoles préparatoires. Nous pensons que la durée hebdomadaire de la scolarité doit être fixée à vingt-cinq heures organisées à raison de 5 heures par jour maximum matin ou après midi. L'horaire qui se répartira ainsi sur cinq jours permettra aux élèves d'étudier le matin et de se reposer l'après- midi ou le contraire. Les journées scolaires débutent ainsi à huit heures et s'achèvent cinq heures plus tard. Les cours sont brefs et intenses. Ils ne durent que 50 minutes. Cela permet donc d'apprendre autant de choses, mais en moins de temps. L'après-midi libre sera consacrée aux sports, aux activités artistiques, à la découverte de la nature et à la révision des cours. Ces horaires continus qui sont pratiqués dans les pays développés sont censés moins fatiguer l'enfant, éviter les transports inutiles et faciliter le travail des parents qui peuvent rester à l'extérieur du domicile en sachant leurs enfants encadrés. Ce nouveau horaire scolaire temps scolaire évitera les heures creuses, l'indiscipline, la violence et par conséquent améliorera le rendement de l'école et les résultats des élèves. La révision des politiques de la gestion du temps devrait s'accompagner par d'autres changements relatifs aux manuels et autres programmes scolaires.
