La semaine bloquée commence aujourd'hui dans tous les lycées et collèges du pays. Lundi dernier, c'était la semaine pré bloquée. Pendant cette période d'examens, l'étau se resserre autour de nos élèves. Heureusement que le « blocage » se fait en douceur, cela leur permet de se ravitailler en oxygène. Avec la semaine pré-bloquée, les esprits s'échauffent et le rythme cardiaque s'accélère. Les élèves n'ont pas encore digéré les kilos de viande de l'aïd qu'ils se sont trouvés devant une échéance à couper l'appétit. Dorénavant, les seuls plats auxquels ils goûteront sont les matières des examens.
L'immixtion des parents Leurs parents en rajoutent. Ils n'aident pas leurs enfants dans leur tâche, bien au contraire, ils la leur compliquent davantage par leur immixtion. Par l'immixtion et la pression qu'ils exercent au point de prendre sur eux le travail des enfants comme si c'était eux les candidats. « Je suis vraiment saturée, nous dit Farah, une élève de 4ème année. Je ne sais plus qui suivre, mon professeur ou bien ma mère qui est ingénieur. Après les cours particuliers, au lieu de me laisser me reposer, elle me harcèle de questions et trouve toujours quelque chose à critiquer : le résultat est faux, la démarche n'est pas pertinente... Elle m'oblige à retravailler ce que j'ai déjà fait. » Pendant cette période, il faut qu'on double aussi le nombre des professeurs des cours particuliers par matière. Cette attitude se justifie par le dicton de chez nous « rayine khir min ray » (deux opinions sont préférables à une seule). « Vous savez que l'année du bac est capitale, nous dit Taoufik, un parent. Sincèrement, je n'ai confiance qu'en un seul professeur. Un deuxième peut toujours ajouter un plus, c'est pourquoi pendant cette période d'examens, j'ai inscrit mon fils chez d'autres enseignants de mathématiques et de physique. » Drôle de philosophie, le ministère de l'Education et de la Formation devrait s'en inspirer et prévoir pour chaque classe deux professeurs par matière. Ainsi le degré d'assimilation par les élèves serait meilleur. Pour bien assister leur progéniture et lui permettre de passer les épreuves dans de bonnes conditions. Certains parents ont pris des congés. Ils se sont mis entièrement à la disposition de leurs enfants. Ils ne les quittent ni de jour, ni de nuit. Ils les raccompagnent à l'école et aux demeures des professeurs des cours magiques, et puis ils les ramènent à la maison où ils se substituent à ces derniers. Une ambiance ramadanesque Cette grande mobilisation est à l'origine du mauvais fonctionnement de l'administration et du grand embouteillage que connaît la circulation : les bureaux se vident et les routes sont bloquées, les fonctionnaires se convertissent en chauffeurs et en professeurs. Cette situation nous rappelle l'ambiance du mois du ramadhan. Un petit conseil, si vous avez des affaires administratives à régler, remettez-les à plus tard, après la semaine bloquée. D'ailleurs ce ne sont pas seulement les bureaux qui sont vidés, les lycées aussi pendant la semaine pré-bloquée. Ce comportement nous pousse à réfléchir à l'intérêt que représentent ces semaines bloquées, elles bloquent tout, les esprits, le trafic routier, les affaires des gens et même le commerce, les boutiques, les marchés et les grandes surfaces ne connaissent plus la grande affluence habituelle, car les consommateurs ont l'esprit ailleurs. Ceux qui sont les plus atteints par ce comportement sont bien sûr les élèves qui, à cause de leurs parents alertés, voient en cette quinzaine de jours un vrai enfer. « Pourquoi ne rétablit-on pas le système du contrôle continu ? nous dit un parent indigné. Nos enfants sont terrifiés par ces semaines bloquées et nous aussi. » Un professeur nous déclare : « Celle qui est la plus redoutée par nous, est la dernière, en période d'examens, les élèves utilisent tous les moyens frauduleux. Et si jamais on essayait de les en empêcher, ils n'hésiteraient pas à nous agresser que ce soit verbalement ou physiquement. A mon sens, cela est dû au système des semaines bloquées. Avec le système continu, il ne pourrait pas y avoir de tels écarts de conduite, car l'élève passe les examens sous la surveillance de ses propres professeurs, ce qui rend la possibilité de frauder très limitée. Il sait d'avance s'il va réussir ou pas, tandis qu'avec la semaine bloquée, tout est possible. Sa conduite avec des professeurs qui ne sont pas les siens est très différente. Il est désinvolte à leur égard donc ses chances de réussite sont assez importantes, ce qui explique que le passage d'un niveau à l'autre devient presque automatique. Personnellement je vois que ce système ne reflète pas le vrai niveau des élèves.».