L'idée de la République est une notion par définition égalitaire qui essaye de dépasser les différences "primaires" entre les composantes d'un peuple pour donner lieu au concept de citoyenneté censé, du moins théoriquement, mettre tous les citoyens sur un pied d'égalité devant la loi. L'article 6 de notre Constitution consacre ce principe d'égalité ô combien nécessaire dans l'harmonie et la quiétude sociales. Au pays du Tigre et de l'Euphrate, l'Irak, au demeurant multi-confessionnel et multi-ethnique, les choses sont actuellement bien différentes. Quoi que l'on puisse dire du régime de Saddam, il avait réussi au moins à "tenir" et maîtriser un pays très diversifié et à avoir dans tous les cercles du pouvoir des sunnites, des chiites et aussi des kurdes. Le Baâth de Saddam était un parti nationaliste et laïc, capable, par conséquent, de rassembler toutes les communautés. Hélas, depuis l'invasion américaine la donne a radicalement changé. L'armée a été dissoute et le Baâth fut interdit à travers l'article 7 de la nouvelle Constitution sur instigation du pro- consul Paul Bremer. La conséquence : un retour au grand jour du confessionnalisme et du tribalisme et un pays sous colonisation se cherchant vainement une stabilité. Il est passé d'un pays aux avant-gardes des pays arabes à un vaste terrain pour les activistes de tous bords. Il semble que la classe politique régnante actuellement à Bagdad s'entête à ne rien tirer des leçons de sept ans de guerre civile et a décrété, encore une fois, l'exclusion de bassistes, ou supposés l'être, de participer aux prochaines élections législatives. Ainsi, plus de 500 candidats se sont vu notifier une fin de non-recevoir de leurs candidatures par une commission parlementaire présidée par le chiite Ahmed Chalabi. Le Premier ministre Nouri Al-Maliki a essayé de "justifier" ces exclusions arguant qu'elles ne visent pas les Sunnites, vu que la majorité de ces exclus sont de confession sunnite. Mais, il est clair que le relent confessionnel est derrière cette démarche. Pour les exclus, le scénario va se répéter du côté de leurs partisans, c'est à dire la contestation politique voire armée. Al Qaïda saura certainement tirer profit de ces calculs partisans à la vision limitée. Et le sort de la réconciliation nationale ? Evidemment aucune perspective encourageante dans un climat pareil. L'issue même de ces élections semble scellée d'avance. Chaque communauté va voter pour ses propres candidats sans donner la moindre importance ni aux programmes ni à leurs qualités personnelles ou politiques. L'Irak, est appelé à un énième cycle de turbulences et de chamailleries inter-confessionnelles. Reste qu'en comparant l'interdiction du Baâth en Irak à celle du nazisme en Europe, au lendemain de la deuxième guerre mondiale, Nouri Al-Maliki met de l'huile au feu ravageur engendré par cette mosaïque confessionnelle et ethnique qui règne en Irak. Certes, on peut réécrire l'histoire mais pas l'effacer complètement car tout simplement "les faits sont têtus".