Le démarrage " "Soldes d'hiver " vient d'être avancé, à la demande des commerçants. Mais les clients ne sont pas dupes : les soldes battent déjà leur plein, depuis quelques jours, d'une façon discrète et avec le recours à des moyens qui échappent au contrôle de l'administration dont notamment les SMS et les e-mails. - Pas de soldes si le taux de réduction minimum est inférieur à 20 % par rapport au prix de référence Pourtant les dispositions de la loi relative aux soldes sont claires. En effet, la pratique des soldes est soumise à deux conditions : elle ne peut avoir lieu sans déclaration préalable auprès du ministre chargé du commerce, contrairement aux promotions. Cette déclaration doit être déposée aux services dudit ministère au moins 15 jours avant la date prévue par le début de la vente. La deuxième condition est l'obligation de cesser toute vente des produits en promotion durant les 40 jours qui précèdent le démarrage de la période des soldes, ce qui signifie que cette disposition englobe toute forme de réduction des prix durant cette période de 40 jours. Nous apprenons également de source sûre qu'il ne saurait y avoir de soldes si le taux de réduction minimum est inférieur à 20 % par rapport au prix de référence. Dans la réalité, c'est le règne de l'anarchie car les stratagèmes et autres astuces ne manquent pas, ce qui contribue à faire d'un droit pour tous les citoyens, une faveur et un passe-droit. La suspicion déjà bien installée vis-à-vis des commerçants ne fait alors que s'aggraver, ce qui n'est pas dans leur intérêt, eux qui subissent le siège en règle des marchés parallèles, se font asphyxier par la concurrence déloyale et pratiquent des prix souvent prohibitifs qui détournent la clientèle et font baisser leurs recettes, alors qu'ils ont des charges multiples et généralement très lourdes. Les TIC au service de l'illégalité Parmi les pratiques qui font leur petit bonhomme de chemin, on pourrait citer l'envoi d' SMS ou d'e-mails aux amis, clients, connaissances et autres personnes que le commerçant a intérêt à racoler pour les compter parmi ses clients. Dans ce cas-là, l'administration, à moins d'un coup de chance ou d'une dénonciation, se trouve dans l'incapacité totale d'apporter la preuve de l'infraction et par conséquent de sévir contre les contrevenants. Cette incapacité concerne également les cartes fidélité qui permettent au commerçant d'enfreindre la loi parfois sous les yeux même des agents de contrôle et des autres clients présents, tout simplement parce qu'elle se passe toujours dans la discrétion la plus absolue, d'autant plus que le paiement se fait parfois par les cartes de paiement bancaires. Les mêmes difficultés caractérisent les opérations de contrôle portant sur les prix, particulièrement dans les grandes agglomérations en raison du nombre élevés de déclarations. En effet, à Tunis, le nombre de points de vente qui participent aux soldes peut s'élever voire dépasser le millier. A Sfax, il dépasserait les trois cents. La vérification des factures, des pièces comptables et autres tickets de caisse étant une opération complexe, le nombre de points de vente ne saurait dépasser les sept ou huit par jour, ce qui en diminue l'efficacité, car c'est durant les premiers jours, pour ne pas dire les premières heures, que les opérations de contrôle sont les plus utiles parce qu'elles permettent de déjouer la fraude en temps opportun. Pour terminer sur une note optimiste, il conviendrait de signaler qu'aussi bien le Ministère du Commerces que l'UTICA sont décidés à rétablir la confiance entre les citoyens et les commerçants. Des réunions avec les différentes parties prenantes y compris l'association de Défense du Consommateur sont programmées à cet effet. A Sfax, un point de presse présidé par M. Abdellatif Zayani, président de l'UTICA- Sfax, vient de réunir le directeur régional du commerce, M. Habib Dimassi ainsi que des représentants de chambres syndicales avec les journalistes de la place, pour parler des mesures prises en vue de rétablir la confiance entre les citoyens et les soldes. Il n'en demeure pas moins que le citoyen veut des preuves tangibles de bonne volonté de la part des commerçants. Attendons pour voir. Taieb LAJILI ------------------------------------------ Témoignages Hayet, 29 ans, étudiante : « Suivre l'exemple de la France » Dans les magasins français, les articles et autres produits à solder sont mis en rayon au moins un mois avant le démarrage des soldes, de cette façon, le commerçant ne peut pas sortir ses stocks d'invendus qui datent parfois de deux ou trois ans, les dépoussiérer et les exposer à la vente le jour des soldes, comme cela se passe souvent chez nous. Naîma, 36 ans, fonctionnaire dans une banque : « C'est n'est que mensonge » Je suis une vraie lèche-vitrine. J'ai l'habitude de faire le tour des magasins deux ou trois jours avant l'ouverture des soldes, pour repérer les pièces que j'envisage d'acheter. Le jour " j " c'est souvent pour moi une véritable déception : Les pièces à ma taille se sont déjà volatilisées. Il ne reste plus que des tailles extrêmes généralement pour des personnes un peu trop fortes, ou des pièces peu intéressantes. Moncef, 40 ans, artiste : « Faux rabais et publicité mensongère » Qui fait les bonnes affaires durant les soldes ? Ce sont bien sûr les commerçants. Ils liquident leurs stocks d'invendus et s'approvisionnent en argent liquide, le tout sur le compte du client. Les rabais affichés sont pour une grande part faux et la publicité est souvent mensongère. En effet, certains commerçants n'hésitent pas à augmenter artificiellement les prix pour arnaquer le client peu averti ou peu vigilant qui tombe facilement dans le panneau. Fayçal, 38 ans, enseignant : « Le citoyen est une proie facile » Le client tunisien manque généralement de culture en matière de composition et de qualité, quand il s'agit surtout de vêtements. Viscose, polyester etc...sont des mots inintelligibles pour le commun des citoyens. D'autre part, les clients sont incapables de faire la différence, par exemple, entre un costume " d'origine ", s'il est permis de le dire ainsi, et un autre qui porte la même marque et qui est importé de Chine, de Turquie ou de Syrie qui sont en réalité d'une qualité moindre. C'est là aussi que l'arnaque peut passer inaperçue et l'on ne s'en rend compte que par la suite. Abderrahmane, 52 ans, entrepreneur : « Pourquoi ces prix prohibitifs ? » Si les commerçants consentent des rabais oscillant entre 50 et 70%, c'est qu'ils ont déjà récupéré leur capital, en vendant la moitié ou les 2/3 des quantités de marchandises achetées. Cela signifie par conséquent qu'ils ont des marges bénéficiaires exorbitantes qui pourraient dépasser les 100%. Ils profitent de la libéralisation du commerce pour fixer les marges bénéficiaires, paraît-il, les plus incroyables. Il y a là de quoi détourner le client tunisien et empêcher la Tunisie d'être une destination commerciale pour les touristes. Mounir Affès, membre de la chambre régionale du prêt-à-porter en détail : « Pour l'abolition des soldes » Nous, qui commercialisons les produits tunisiens vivons des difficultés énormes à écouler notre marchandise, à cause de la concurrence déloyale et insoutenable des produits importés, d'autant plus d'ailleurs que le contrôle des factures est quasiment impossible. Les commerçants desdits produits ont toute latitude pour gonfler artificiellement les prix et afficher des remises déconcertantes qui attirent les clients. Or c'est nous qui sommes au service de notre industrie et de notre économie nationale. C'est nous qui contribuons à soutenir l'emploi dans le pays. Là où le bat blesse, c'est la durée des soldes : environ quatre mois par an et avec une marge bénéficiaire nulle. C'est d'autant plus préjudiciable que nombre de commerçants rallongent la durée des soldes au-delà de l'épuisement des quantités soldées, définies à l'avance, contrairement à ce qui se passe en Europe. C'est pour cette raison que nous demandons l'abolition pure et simple des soldes ou du moins, la réduction de leur durée. Habib Dimassi, directeur régional du commerce, à Sfax : « La Tunisie, pays avant-gardiste au Sud de la Méditerranée » De l'intervention exhaustive et fort appréciée par les participants au point de presse, de M.Habib Dimassi, directeur régional du commerce, à Sfax, on pourrait retenir notamment les précisions contenues dans l'encadré : - La Tunisie est le seul pays de la rive Sud de la Méditerranée à se prévaloir d'une législation en matière de soldes. - Les soldes sont un acquis de taille qu'il conviendrait de préserver, contrairement aux réclamations d'abolition qui émanent de certains commerçants. En effet, les commerçants réalisent 40% de leurs chiffres d'affaires durant la période des soldes. C'est dire l'importance de ces soldes dans la dynamisation du secteur du commerce. - La détermination des périodes des soldes tient compte des propositions des professionnels. - Une nouveauté : nous avons mis à contribution les TIC dans l'opération de contrôle qui précède les soldes, notamment en filmant les vitrines de certains magasins. - 12 commerçants qui affichaient des rabais ou des promotions, durant les 40 jours qui précèdent les soldes viennent d'être verbalisés. - Le citoyen peut et doit sanctionner les commerçants auteurs d'irrégularités en s'abstenant de s'approvisionner dans leurs magasins.