C'est lui qui disait : « Pour vivre dans la vérité jouez la comédie ». Connaissant la passion qu'il a toujours voué au théâtre, pas besoin de s'interroger davantage sur ses intentions. Car l'engagement était la pierre de voûte de son œuvre, qu'il ne pouvait envisager sous un autre angle que l'humanisme dont il était viscéralement pétri. Déchiré, mais sûr de la suprématie de l'humain en toute chose, comme celle de la transcendance qui doit accompagner l'élan créatif, de préférence sur les planches où il parvenait à trouver un plus juste équilibre, et une forme de jubilation apaisée qu'il ne parvenait pas à trouver dans la vie réelle. Une manière de fuite ? Pas tout à fait ; même si la tentation est grande de bifurquer vers des sentiers moins escarpés. Sauf qu'il avait trop conscience de l'importance du quatrième des arts, pour le reléguer au rang de simple faire-valoir, agissant en trompe-l'œil, en attendant que se décante « l'écume » des jours qui peinent à passer. Et puis il avait conscience que si le théâtre, toutes latitudes confondues, continuait à faire peur, suscitant la méfiance d' « apparatchiks » zélés, toutes époques confondues également, c'est bien parce qu'il était à même d'être le « réceptacle » de cette vérité, sa vocation n'étant pas d'en être le fossoyeur. Aujourd'hui que dans le monde entier, on fête à l'unisson le théâtre, comme vecteur de paix entre les Hommes, il n'est pas inutile -c'est même une nécessité-, de relire le théâtre de Camus, à l'aune de ce siècle qu'il ne connaîtra pas, mais qu'il marquera aussi, comme il a marqué le précédent, par ses écrits qui agissent comme une « eau forte », sur la conscience des peuples révoltés. En cela, la parole de Camus, comme le théâtre, demeure souveraine. Lui qui disait : « Comprendre le monde pour un homme, c'est le réduire à l'humain… ». Tout simplement…