Des qu'on se lève, que l'on pose le pied droit ou gauche par terre, on cherche un sens à donner à tout ce qu'on entreprend, ou qu'on envisage d'entreprendre. Ce besoin que nous avons de justifier nos actes nous aide à mieux porter notre quotidien et à supporter, voire à occulter, son absurdité. Qui donne un sens à sa vie ou du sens à ses agissements se sent moins perdu dans ce siège de l'éphémère et de l'inlassablement répétitif qu'est cette « vida » (vida ou vie comme l'explique l'étymologie du mot « 1080 ; vida, vide… ; lat. vita ou vie). Qui donne un sens à sa vie se sent moins seul et se libère du non-sens de l'existence. « Une seule certitude suffit à celui qui cherche », dit Camus dans Le Mythe de Sisyphe. Mais cette certitude est-elle forcément la vérité de ce chemin que nous avons pris ? « La vérité » existe-t-elle vraiment ? Si elle n'existe pas, pourquoi ce besoin de l'inventer ? Et si le sens de la vie était dans son non-sens ? Pourquoi fuir ce chemin fait d'incertitudes et qui est peut-être au fond celui qui se rapproche le plus ou le mieux du vrai visage de l'existence ? En cours de philo on apprend, dès le premier contact avec cette discipline, que pour bien penser il faut d'abord accepter de se faire violence en mettant de côté nos confortables certitudes, car qui sait, sait aussi qu'il n'a plus besoin de chercher. Nietzche le disait, il faut faire le deuil de cette soif de vérité. Vivre dans le doute et avec le doute n'est pas facile, il faut du courage pour regarder la vie en face. Elle est d'ailleurs bien plus anxiogène quand le masque qui l'embellit tombe enfin, car nous avons choisi de le lui enlever… Jean Vilar disait que «de tous temps, le théâtre a cherché à se transformer. C'est ce qu'on appelle les crises. Tant que le théâtre est en crise, il se porte bien », ceci est également vrai pour l'Homme. La crise, du grec Krisis signifie décision, c'est en cela qu'elle pourrait être envisagée comme une phase décisive et importante dans l'évolution des choses et dans le passage d'un état à l'autre. L'auteur de L'Etranger et de Caligula écrivait «la crise voilà ce qui fait penser», car qui est en crise connait des lendemains changeants ou le seul sens réside dans la beauté de l'aube et dans le chemin emprunté pour arriver au matin prochain…cela n'a peut être pas beaucoup de sens aux yeux de certains mais est plus riche celui qui a appris à se démunir.