La démonstration faite sur les gradins puis devant les vestiaires du stade de Tizi-Ouzou, vendredi dernier par les quelques supporters du Club Africain, a stupéfié certains et consterné beaucoup d'autres, comme si on découvrait une nouveauté. Unanime mais brève fut la condamnation de ces débordements aux règles de l'hospitalité puis au retournement brutal et passionnel contre sa propre famille, d'une frange de supporters censés venus pour soutenir leur équipe. Cependant les scandalisés n'auront pas tardé à rejoindre ceux qui, un peu partout sur nos stades, s'en sont habitués. Car ce qui s'est passé vendredi dernier n'est ni un phénomène inédit, ni un monopole du Club Africain. C'est un effet boomerang devenu récurrent depuis un ou deux lustres dont la cause nous incombe quand on a lâchement dévolu au public un rôle qui n'est pas le sien. Entendons toutefois par Public, un noyau dur et actif de soi-disant inconditionnels. Comment peut-on alors croire qu'il n'en dispose et n'abuse quand responsables, acteurs et médias l'adulent. Quand pour lui faire passer la pilule de l'échec, les premiers se jettent aussitôt sur l'arbitre, l'Instance qui l'a désigné ou n'importe quel bouc émissaire et lui donner le sentiment de victimisation. Quand les joueurs, dans leurs déclarations invariablement insipides, n'oublient jamais de lui rendre hommage pour son incommensurable aide dans la victoire ou lui présenter des excuses en cas d'échec. Les promesses faites, à longueur de colonnes et de semaines de lui faire offrande, seraient risibles si leurs conséquences ne risquaient pas de troubler l'égo de ce nouveau Dieu des stades. Les répercussions médiatiques, enfin, qui ne tiennent compte, hélas ! que du souci de savoir comment caresser la bête dans le sens du poil. C'est cette cause, soyons-en persuadés, dont on vient d'identifier trois de ses têtes qui a fini par engendrer ce hideux Pouvoir à l'envers qui nous donne cet effet en même temps burlesque et tragique mais qui ne nous imposera pas moins ses rites tant qu'on n'aura pas cessé de jouer aux pompiers pyromanes et rétabli dans leur ordre normal, les rôles des responsables des acteurs et des médias