Les traitements contre les cancers ont considérablement évolué ce qui a permis d'améliorer le pronostic et la durée de vie des personnes touchées par le cancer. Ils s'accompagnent toutefois encore d'effets indésirables à long terme, notamment sur la fertilité. « Comment peut-on avoir une vie sexuelle normale même avec le cancer ? » telle est la principale question débattue par les participants à la table ronde sur le thème "cancers, fertilité et sexualité", organisée, récemment, par l'Association Santé et Environnement, en collaboration avec la Société Tunisienne de Recherche sur la Sexualité. Des médecins ont indiqué que le traitement du cancer (du col de l'utérus, de la prostate, de l'ovaire, de l'endomètre,...), notamment par radiothérapie et chimiothérapie, peut engendrer en cas de non prévention, des effets négatifs postopératoires sur la vie sexuelle et la fertilité. Selon les communications présentées, à cette occasion, tous les cancers, quelle que soit leur localisation retentissent sur la sexualité. Les conséquences des cancers et leurs traitements sur la qualité de vie des patients mettent en évidence l'incidence particulière de la sexualité. Informer le patient «Le retentissement est d'une part psychologique. L'annonce du cancer est en lui-même un facteur de perturbation de la vie sexuelle et le choc causé par le diagnostic ainsi que les modifications de l'image de soi par la maladie vont remettre en question le système affectif », a précisé le Pr.Habib Boujnah, chirurgien urologue. Le retentissement est d'autre part organique induit par les différents modes thérapeutiques : chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie. La fertilité d'une personne ayant ou ayant eu un cancer est menacé par le cancer lui-même et par son traitement. Le rôle du médecin est d'informer la patiente sur ses chances de récupérer une fonction ovarienne et les chances de grossesse après de tels traitements. Un encadrement et un soutien psychologique par une équipe spécialisée dans la gestion des problèmes de fertilité sont fortement recommandés. « Il est important d'informer les patients sur les troubles sexuels dus aux cancers. Il faut sensibiliser les malades, leurs proches et le personnel soignant à l'importance de la vie sexuelle et assurer un suivi et un soutien adaptés permettant d'atténuer les conséquences du cancer », a-t-il ajouté, appelant à prendre en charge les troubles sexuels par un accompagnement, un soutien psychologique et par les moyens thérapeutiques existants. D'après les statistiques fournies, l'évaluation de la sexualité du patient est importante sachant que le 1/3 des hommes a des problèmes sexuels avant l'intervention. « La prise en charge doit être adaptée à la demande du couple ou du patient s'il est seul. La rééducation est essentielle, elle doit être précoce c'est à dire dans les 2 ou 3 mois suivant le traitement. Le but essentiel est d'oxygéner les corps caverneux. En cas d'échec de la rééducation il faut utiliser les traitements classiques de la dysfonction érectile», a fait remarquer le Pr.Boujnah. Se prévenir… mais par quel moyen ? Les avancées récentes en cancérologie renforcent les attentes des patients pour une meilleure qualité de vie préservant l'intégrité psychique et la sexualité. Dans le traitement, la qualité de vie, et particulièrement la sexualité est aussi une exigence et il faut essayer de prévenir les conséquences thérapeutiques de la maladie. Coté prévention, tous les médecins sont unanimes sur l'importance de la prescription des médicaments, des doses, de la durée du traitement, ainsi que la prise en considération de l'âge du patient. « Les traitements contre le cancer (p.ex. chimiothérapie, radiothérapie) chez l'homme ou chez la femme peuvent induire une infertilité, transitoire ou définitive. Il faut essayer de guérir le cancer en préservant au mieux la qualité de vie du patient tout en sachant que la priorité absolue est au traitement du cancer », a insisté le Dr. Monia Malek, chimiothérapeute. La conservation de la fertilité chez l'homme avant traitement anticancéreux est relativement simple et consiste à conserver des éjaculats dans l'azote liquide. Chez la femme, par contre, la préservation de la fertilité est plus compliquée et la méthode de choix dépend de plusieurs facteurs (le type de cancer, l'urgence du traitement anticancéreux, le type de chimiothérapie/radiothérapie, l'âge de la patiente etc.). Parmi les solutions proposées pour remédier au problème de fertilité qui peut survenir à l'issue d'une thérapeutique anticancéreuse, une technique palliative est proposée depuis plusieurs années. Il s'agit de la cryoconservation de tissu ovarien : du tissu ovarien est congelé en vue d'être ultérieurement autogreffé. Cette technique peut être proposée pour préserver la fertilité des femmes qui doivent être traitées par chimiothérapie et/ou radiothérapie, des thérapeutiques qui engendrent un risque de stérilité. Evoquant le cas de la Tunisie, le Pr.Monia Hechiche, chirurgienne cancérologue à l'Institut Salah Azaiez de Tunis, a indiqué qu'en Tunisie le cancer du col de l'utérus ne représente pas un problème de santé publique et qu'il ne s'agit pas d'une maladie contagieuse mais chronique, précisant que 200 nouveaux cas sont enregistrés chaque année en Tunisie. « Face au cancer, bon nombre de patients et/ou de conjoints relèguent les éventuels problèmes de sexualité ou de fertilité au second plan. Quant aux soignants, ils ne prennent pas toujours l'initiative d'aborder clairement ces questions. Pourtant, elles font partie intégrante de la qualité de vie globale », a-t-elle souligné. Selon les prévisions, cette maladie va diminuer à partir de 2024 grâce à la sensibilisation sur la lutte contre le tabagisme, l'adoption d'une hygiène de vie et d'un régime alimentaire sain, la pratique des activités physiques et le changement de la structure de la population.