Le Ghanéen Asamoah Gyan voulait marquer l'histoire du football africain face à l'Uruguay. Il y est parvenu. Hélas, pas de la bonne manière en manquant un penalty dans le temps additionnel de la prolongation. Il faudra s'en remettre… A défaut d'avoir été étincelant, à l'image d'une Coupe du Monde techniquement décevante, le quart de finale entre l'Uruguay et le Ghana restera dans l'histoire de l'épreuve pour son incroyable dénouement. A la toute fin de la prolongation, Luis Suarez est devenu le héros de tout un peuple. Uruguayen. Un premier dégagement licite sur sa ligne, un second beaucoup moins avec les mains, un penalty provoqué, une expulsion justifiée et le Ghana en position de se qualifier pour la demi-finale tant espérée par le peuple africain. Et puis voilà que Gyan frappe la barre et que Suarez, sur le chemin du vestiaire, peut exulter alors que rien n'est encore fait. En trichant, de manière instinctive, sa main a sauvé son pays de manière plus grossière que celle d'Henry en novembre dernier qui avait aidé la France à aller se couvrir de ridicule en Afrique du Sud. Suarez ne jouera pas la demi-finale et avec un tel geste d'antijeu, il mériterait presque un second match de suspension. Mais la Céleste a eu l'occasion de jouer la séance de tirs au but. Et Muslera (le gardien uruguayen) a fait le reste. « La récompense aux tricheurs » Asamoah Gyan, buteur attitré des Black Stars, devra désormais vivre avec ça. S'il a eu l'incroyable courage d'aller tirer de nouveau des onze mètres dans la séance fatale à son pays, réussissant cette fois son tir, le Rennais n'oubliera jamais cette 123eme minute de malheur et cette chance unique et manquée d'envoyer tout un peuple en demi-finale de la Coupe du Monde. « Je m'en remettrai », a lâché à la bravade le héros malheureux dans la zone mixte d'un Soccer City où les Vuvuzelas se sont tus. Le joueur, KO debout après son échec sur le terrain, devra démontrer une force insoupçonnable pour retrouver le chemin de la confiance. Les « Ba-Ghana, Ba-Ghana », eux, accusaient le coup après le match et Milan Rajevac, dans sa très digne conférence de presse, rappelait l'importance du penalty raté : «Après ce penalty, les Uruguayens avaient l'avantage psychologique dans la séance de tirs au but.» Car après ce raté, les Uruguayens sentaient dans leur dos le vent de la réussite : ils auraient dû perdre à la 123eme minute quand Suarez a fauté. Ils sont passés à vingt centimètres de la correctionnelle sur le penalty de Gyan. Après un tel amoncellement de coup de main de la providence, les coéquipiers de Diego Forlan ne pouvaient pas perdre. «La récompense aux tricheurs », se plaignent les médias ghanéens et plus généralement africains hier matin. Ceux-ci préfèrent tirer à boulet rouge sur le décisif Suarez plutôt que de viser le malheureux Gyan. Mais dans les prochaines années, Gyan comprendra la portée de son tir manqué. Il voulait marquer l'histoire du foot africain en propulsant enfin un pays du Continent noir dans le dernier carré mais aussi en devenant le plus grand buteur africain de l'histoire de la Coupe du Monde devant Roger Milla. Il restera à jamais marqué par le sceau de cet échec… --------------- La presse uruguayenne : «Miracle celeste» «Miracle celeste», s'est enflammé la presse en ligne de Montevideo après la première qualification de l'Uruguay pour une demi-finale de Coupe du monde depuis 1970, obtenue aux tirs au but (4-2, 1-1 après la prolongation) vendredi aux dépens du Ghana. «Miracle celeste: l'Uruguay parmi les quatre meilleurs du monde», titre le principal quotidien du pays, El Pais. «L'Uruguay a battu le Ghana aux tirs au but, au terme d'un final infernal, et s'est invité parmi les quatre meilleurs du monde pour la première fois en 40 ans», ajoute le journal, alors que l'Uruguay a concédé un penalty à l'ultime seconde de la prolongation... tiré sur la barre par le Ghanéen Gyan. El Pais souligne le rôle décisif joué par le gardien Fernando Muslera, qui a «arrêté deux tirs au but», et l'attaquant Sébastian Abreu «qui a marqué le dernier d'une pichenette!» «L'Uruguay sur le toit du monde», salue pour sa part le site de la radio Espectador. Lui aussi insiste sur les deux arrêts de Muslera dans la séance de tirs au but. «Locura total (Folie complète)», savoure pour sa part le quotidien El Observador, dans un jeu de mots en hommage à Abreu, qui a réussi une «panenka» sur le dernier tir et dont le surnom est «El Loco» (le Fou). --------------- Entre fierté et douleur L'Afrique ne sait pas sur quel pied danser après l'élimination du Ghana vendredi soir en quarts de finale contre l'Uruguay (1-1 ap, 2-4 tab). Faut-il retenir la main de Luis Suarez, le penalty manqué d'Asamoah Gyan ou l'excellent parcours des Black Stars en Afrique du Sud ? Cameroun 1990, Sénégal 2002... et Ghana 2010. Comme les Lions Indomptables et ceux de la Teranga avant eux, les Black Stars sont tombés au stade des quarts de finale vendredi au Cap face à l'Uruguay (1-1 ap, 2-4 tab), privant ainsi l'Afrique d'une première demi-finale en Coupe du Monde. Il ne leur a pourtant manqué que quelques centimètres pour atteindre le dernier carré... Les hommes de Milovan Rajevac, privés d'Andre Ayew et Jonathan Mensah, suspendus, ont en effet poussé les Uruguayens dans leurs derniers retranchements lors de la prolongation. Fernando Muslera a fait des prouesses dans ses buts pour retarder l'échéance, mais c'était finalement Luis Suarez qui réalisait l'arrêt du match sur sa ligne à la 120e minute. Le moment que choisissaient les dieux du football pour réaliser un «miracle céleste», dixit le titre du papier d'El Pais, le plus grand quotidien uruguayen. Asamoah du rire aux larmes Auteur de trois des cinq buts marqués par son équipe en Afrique du Sud, Asamoah Gyan avait l'occasion d'envoyer le Ghana en demies... Mais son penalty trouvait la barre transversale et la séance de tirs au but était finalement favorable aux joueurs d'Oscar Tabarez. «Dans les tirs au but, les Uruguayens avaient un avantage psychologique», déplorait Milovan Rajevac en conférence de presse. Asamoah Gyan, qui a eu le courage de tirer et de marquer son tir au but, n'en était pas moins inconsolable sur la pelouse du Soccer City Stadium après la Panenka victorieuse de Sebastian Abreu, lui qui avait la victoire au bout du soulier quelques minutes auparavant. «Je m'en remettrai, assure-t-il néanmoins. Je suis fort mentalement.» Espérons que ses supporters ne seront pas aussi durs avec lui qu'ils ne l'avaient été en 2008. Après la CAN, sa famille avait en effet été victime de moult menaces... «Thanks Ghana» L'Afrique a en tout cas de quoi être fière de «ses» Ghanéens, malgré leur sortie de piste. Après les échecs retentissants de la Côte d'Ivoire, du Cameroun et du Nigéria, ainsi que de l'Algérie à qui il n'a finalement manqué... que d'une attaque, tous les yeux du Continent étaient rivés sur les Black Stars depuis la fin de la phase de poules. Un soutien matérialisé par cette banderole sur laquelle était inscrit «Thanks Ghana» dans les tribunes du Cap vendredi. Une reconnaissance méritée pour un groupe talentueux. Un groupe qui a surtout toutes les cartes en mains pour briller encore dans les années à venir. N'oublions pas qu'un certain Michael Essien manquait à l'appel en Afrique du Sud et que 15 des 23 joueurs étaient âgés de 25 ans ou moins. Le groupe qui a remporté la Coupe du Monde des moins de 20 ans en Egypte l'an dernier sera sans doute arrivé à maturité dans quatre ans au moment de choisir ceux qui se rendront au Brésil. Huitième de finale en 2006. Quart en 2010. Et en 2014 ? --------------- Suarez : «Je suis un grand gardien» Auteur d›un des gestes les plus scandaleux depuis le début de la Coupe du monde, lorsqu›il a empêché le Ghana de marquer à la 120e minute de leur quart de finale en arrêtant le ballon de la main sur la ligne, Luis Suarez est venu s›expliquer sur son geste, avec le sourire. «Je suis un golerazo (un grand gardien, ndrl), ça a été l›arrêt du Mondial, je n›avais pas le choix, et la main de Dieu, c›est moi qui l›ai maintenant», a-t-il plaisanté en référence à Diego Maradona, qui avait marqué de la main contre l›Angleterre, en 1986. «Je l›ai fait pour que mes coéquipiers gagnent aux tirs au but. Quand j›ai vu que le tir (de Gyan sur le penalty) allait au-dessus, ça a été une très grande joie.» --------------- Faits et chiffres * 4ème qualification des Pays-Bas aux 1/2 sur 9 participations en CM, après 1974, 1978 et 1998. * 21ème victoire néerlandaise sur 41 matches en CM, la 9ème par (2-1) après celles réussies devant l'Italie en 1978, l'Arabie Saoudite, le Maroc 1994, la Yougoslavie, l'Argentine 1998, la Côte d'Ivoire en 2006, le Cameroun, la Slovaquie lors de l'actuelle édition. * 5ème élimination du Brésil aux 1/4 sur 14 présences à cette étape de la compétition (19 participations). * 15ème défaite brésilienne en 97 matches en CM, la 5ème par (1-2) après celles subies face à la Yougoslavie en 1930, l'Italie en 1938, l'Uruguay en 1950 et la Norvège en 1998. * 2ème victoire hollandaise sur 4 oppositions avec les Brésiliens après celle (2-0) remportée au groupe des 1/4 en 1974; les Brésiliens ont gagné (3-2) aux 1/4 de 1994 et il y a eu une parité aux 1/2 de 1998 avec qualification des Sud-Américains 4/2 aux tab. * 5ème qualification de l'Uruguay aux 1/2 en 5 présences aux 1/4 et 9 participations en phase finale de la Coupe du Monde. * 12ème nul uruguayen sur 45 matches en CM, le 3ème par (1-1) après ceux obtenus face à la Bulgarie en 1974 et la RFA en 1986. * 1ère élimination du Ghana à sa 1ère présence aux 1/4 sur 2 participations au Mondial. * 2ème parité ghanéenne sur 9 matches en CM, les 2 par (1-1) obtenues lors de l'actuelle édition après celle face à l'Australie. * 1ère opposition entre l'Uruguay et le Ghana en phase finale de la Coupe du Monde. * Pour la 10ème fois aux 1/4 on a recours aux tab: 3 en 1986, 1 en 1990, 1 en 1994, 1 en 1998, 1 en 2002 et 2 en 2006.