C'est aujourd'hui, 15 août 2010, que s'ouvre, au Théâtre municipal de Tunis, la 28ème édition du Festival de la Médina. L'année dernière, la première soirée eut lieu une semaine plus tard, coïncidant avec les premiers jours de Ramadan. C'est manifestement ce même impératif du calendrier de l'Hégire qui a imposé aux organisateurs de la manifestation d'avancer de quelques jours la session de 2010. Décalage qui fait que le Festival de la Médina dérange quelque peu cette saison celui de Carthage qui en est à sa dernière semaine. Prééminence du spirituel La conférence de presse qui devait annoncer le programme de la 28ème édition du festival de la Médina s'est réduite cette année à une sympathique réception pendant laquelle le directeur de la manifestation n'accorda d'interview qu'aux chaînes de télévision locales et se pressa de prendre congé des nombreux journalistes de la presse écrite et électronique présents à cette rencontre qui devait réunir les artistes tunisiens programmés au festival mais dont nous ne vîmes que deux ou trois dans le hall du musée Kheireddine. En ce qui concerne les espaces qui accueilleront la nouvelle édition, on a retenu les mêmes à une exception près, puisque la salle de projection de la maison de la culture Ibn Khaldoun a remplacé Le Mondial, cinéma mis provisoirement à la disposition d'une compagnie théâtrale privée. Quant au programme, il est assez riche et donne lieu à des spectacles variés originaires de plusieurs pays et continents. Il va sans dire que la production tunisienne l'emporte largement sur toutes les autres. Mais côté maghrébin et arabe, la participation est plutôt honorable grâce notamment aux deux spectacles algériens et aux quatre soirées syriennes. Notons à ce sujet l'absence remarquée de stars et de programmes égyptiens et libanais. La touche spirituelle empreint comme à l'accoutumée une bonne partie des soirées programmées et le festival accordera une place de choix au patrimoine musical tunisien, maghrébin et étranger respectant ainsi sa vocation initiale et le cadre principal (La Médina) qu'il honore. Les deux grands absents Le cinéma est également en bonne place avec quatre journées consacrées cette année aux productions et aux réalisateurs du terroir. Ne célèbre-t-on pas cette saison l'année du 7ème Art ? Le centenaire du théâtre, c'était l'année dernière ; peut-être est-ce pour cela que le 4ème art est comme écarté de l'édition de 2010 du festival de la Médina. Il faut dire par ailleurs que les autres festivals d'été, notamment ceux de Hammamet et de la Goulette, en ont gavé le public cette saison. Autre absent remarquable : le rire ! Ni one man shows hilarants, ni comédies de troupes, ni films drôles, cette saison. Les organisateurs du festival considèrent peut-être que de ce point de vue aussi, le public est repu de ce genre de spectacles légers dont on meuble à la télé comme sur les scènes de plusieurs amphithéâtres l'essentiel des programmes de l'été et du mois saint. Mais qui, chez nous, se lasse de rire, surtout après une journée de jeûne austère et un dîner copieux le soir ? M.Zoubeir Lasram et ses collaborateurs n'ignorent sans doute pas les vertus digestives du comique et savent pertinemment que ce sont les spectacles les plus digestes qui rapportent de l'argent au festival. Certes, on ne doit pas toujours penser l'art et la culture en termes financiers, mais un spectacle sans public ce n'est pas non plus un point d'honneur à mettre à l'actif de ses animateurs ni à celui de ses programmateurs. Une des fonctions premières d'un festival consiste à animer la ville où il se tient, à faire sortir les habitants de chez eux. Si au contraire, il contribue à clouer ces derniers dans leurs salons et devant leurs postes de télévision, cela veut dire qu'il a failli à l'un de ses principaux objectifs. L'année dernière, certains concerts furent des fiascos financiers et artistiques. Souhaitons qu'il n'en soit pas de même cette saison pour les spectacles les moins prometteurs de la 28ème édition du festival : nous pensons surtout aux soirées du 17, 21, 22, 24, 25 et 30 aout et également aux spectacles des 2,3, et 5 septembre programmés au théâtre municipal. Problème d'espace Deux remarques pour finir : la soirée qu'animera Syrine Ben Moussa le 27 août 2010 à Bir Lahjar aurait pu être programmée ailleurs vu l'exigüité de ce modeste espace culturel de la Médina. En 2009, avec un cocktail hispano-andalous semblable à celui de cette année, la jeune chanteuse testourienne a fait le plein au théâtre municipal. Pourquoi priver des centaines d'admirateurs d'un tel régal méditerranéen ? En ce qui concerne la soirée de clôture, qui programme la Hadhra 2010 de Fadhel Jaziri, nous espérons que la scène des Jardins de Kheireddine suffira pour accueillir les 101 artistes qui s'y produiront. A moins que le concepteur de ce spectacle mitigé n'ait promis de ramener ses ambitions scénographiques à des proportions plus modestes !