• La fécondité baisse, les vieux prennent tout leur temps pour vieillir et les caisses sociales ont besoin de fonds pour l'activité de la période additionnelle : une retraite à 62 ans, si elle est adoptée. - Le Maghreb s'est engagé dans la seconde phase de la transition démographique. La vitesse à laquelle elle s'est effectuée, soulève nombre d'interrogations. En l'espace de 25 ans, tout le paysage démographique de cette région a été modifié. Cette transition démographique est accompagnée de changements structurels résultant de l'ampleur de la transition de la fécondité : recul de la natalité, vieillissement démographique, recul de la nuptialité et augmentation de l'espérance de vie. Ces changements démographiques ne manqueraient pas d'avoir des conséquences socio-économiques sur les pays du Maghreb comme l'ont signalé les chercheurs et les démographes au cours des journées maghrébines de population organisées les 6 et 7 décembre à Hammamet par l'Union pour l'étude de la population africaine, l'Association tunisienne des études de la population et l'Association maghrébine pour l'étude de population et ce en partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour la Population, l'Office National de la Famille et de la Population, le Centre d'Etudes et de Recherches Economiques et Sociales et l'Association de Solidarité Internationale. Jusqu'au milieu des années 1970, le Maghreb enregistrait les taux d'accroissement de la population les plus élevés dans le monde, (plus de 3%). À partir du début des années 1980, ce taux commença à baisser, atteignant en l'an 2000, 2 % au Maroc, 1,9 % en Algérie et 1,3 % en Tunisie. Ce ralentissement du taux d'accroissement naturel, qui résulte d'une différence entre la natalité et la mortalité, est principalement lié à la réduction de la natalité. M. Mhamed Ayed président de l'Association tunisienne des études de la population nous a précisé : « L'objectif recherché à travers l'organisation de ces journées consiste à dégager une problématique concernant la population maghrébine avec une sélection de thèmes pour être prise en charge par les décideurs dans le cadre d'une recherche plus approfondie. Nous essayons de sortir avec des résultats concrets surtout face à ces défis démographiques notamment, la fécondité, la taille des familles, le vieillissement de la population. Comment prendre en charge cette population de troisième âge? Comment résoudre le problème de l'emploi notamment, pour les jeunes et quel sera l'avenir démographique du Maghreb?». La dénatalité pointe à l'horizon ! Les pays du Maghreb ont subi d'importants changements démographiques. Leur fécondité a vigoureusement chuté et comme l'a signalé le Pr Mohamed Kouidri, Professeur à l'université d'Oran, « partout il y a une baisse de la fécondité. Mais il y a une reprise de la natalité. Cette petite reprise est due à un effet de nombre des générations qui viennent en mariage et qui sont nées durant les années 80 et comme le taux de nuptialité a augmenté, on a plus de naissance. La fécondité au contraire est en baisse. Nos femmes au Maghreb mettent actuellement moins d'enfants au monde. Dès lors, on commence à s'inquiéter déjà sur la continuation de cette baisse de la fécondité. Mais on se pose cette question sur la reprise de la natalité parce que l'opinion publique ne fait pas de différence lorsqu'elle parle de fécondité (le nombre d'enfants par femme) et de natalité (taux moyen de naissances sur la population moyenne). Cette différence est énorme pour nous les démographes. Les décideurs doivent connaître l'impact de cette baisse de la fécondité sur la population et l'économie. On constate de nos jours un vieillissement de la population mais ce qui nous inquiète c'est la dénatalité qui pointe à l'horizon due à une baisse de la fécondité. Mais est-ce que cette fécondité va continuer au Maghreb ou elle est plutôt conjoncturelle ? Les hypothèses de base de travail de projection, deviennent plus difficiles à formuler devant tant de revirements de tendance et de rythmes de changements. Si les tendances sont maintenues d'ici 10 ans, on aura le même problème que l'Europe actuellement. La pyramide d'âge de notre population commence à se rétrécir et à se déséquilibrer d'où cette dénatalité et ce vieillissement qui menacent le Maghreb ». Les pays maghrébins devront ainsi adopter une démarche prospective pour y dégager les répercussions de ces mutations profondes induites par la dynamique démographique sur les changements de comportement de la population d'âge actif dans un contexte économique et social en perpétuelle transformation Emploi et retraite La fin de la transition démographique est toute proche au Maghreb, mais rien n'indique que ces pays en resteront là. Tout porte au contraire à croire qu'à l'instar des pays européens, ils descendront nettement en dessous du seuil de remplacement des générations. La chute sous ce seuil est d'autant plus probable que la baisse de la fécondité s'est accélérée au cours de la dernière décennie et a été beaucoup plus rapide que dans les pays développés. Cette situation a engendré comme l'explique Amir Bouraoui, démographe tunisien, « un rallongement de l'espérance de vie à la naissance et une prémisse de vieillissement qui semble s'installer définitivement en Tunisie. Au niveau du plan du changement structurel de la population, on constate encore le poids de la population jeune. La population dépendante ne constitue pas une charge importante et la population en âge d'activité représente 2/3 de la population. Cette situation est communément appelée l'âge d'or démographique favorable au développement de l'économie à condition de renforcer l'employabilité et particulièrement celle des jeunes. Les projections de l'INS montrent que la population tunisienne âgée de 60 ans et plus atteindrait dans 30 ans des proportions importantes variant entre 19,8 et 20,4 %. Le recul de l'âge de retraite s'impose donc comme une solution qui pourrait doublement soulager les caisses d'abord en retardant l'âge du début de bénéfice des pensions et puis par l'alimentation des caisses pendant la période d'activité additionnelle. Le renforcement de la politique d'emploi est indispensable. Mais ces solutions constituent certainement une soupape mais suffisent-elles seules à éviter l'impact négatif du vieillissement. N'est-il pas temps de repenser la politique de population en instaurant des mécanismes d'encouragement des couples à relever leur niveau de fécondité de manière à réduire les proportions des personnes âgés ? ». Ainsi ce vieillissement démographique risque de grossir alors les rangs des personnes âgées au Maghreb et induira tous les problèmes que connaissent à présent les pays du Nord mais de façon beaucoup plus brutale car, tout comme la baisse de la fécondité l'a été, ce vieillissement démographique sera beaucoup plus rapide au Maghreb qu'en Europe.