Le 24 septembre 2010 un drame survint dans la banlieue sud de Tunis. Une collision survenue entre celui un train sortant de Tunis et se dirigeant vers la banlieue-sud et un deuxième train en provenance de Sfax qui a été dans l'obligation de s'arrêter au niveau de Bir El Bey, a fait 2 morts et 57 blessés. On se souvient tous de cette journée, pluvieuse et sombre, et c'est justement ce que fut annoncé comme cause de l'accident : l'absence de visibilité a empêché la vue des feux de signalisation et causé la collision des deux trains. Le conducteur a par ailleurs été tenu comme responsable, or il est temps aujourd'hui de rouvrir le dossier, d'autant qu'il n'a juste là pas vraiment été traité… Pour ceux qui habitent les banlieues, le train constitue un vrai cauchemar. Mettant de côté le bruit insupportable à chaque passage de train et la pollution qu'ils doivent tous subir et respirer, il ne se passe point d'année sans que ses roues aient broyé des vies. Qui est le responsable de ces accidents ? Un conducteur fatigué par une longue distance ou alors une machine qui n'est pas assez équipée, ou encore des gares mal conçues ? En effet, Issam Eddine Fitati, conducteur adjoint de train nous révèle certains détails de la collision ainsi que des dépassements commis par la Société Nationale des Chemins de Fer Tunisiens. Dépassements, danger « La SNCFT assume en premier lieu la responsabilité de l'accident survenu à Bir El Bey et ce, à cause de la mauvaise signalisation et la mauvaise disposition des feux de signalisation, souvent cachés par les plaques. D'ailleurs, aucune enquête n'a été ouverte à ce jour et afin de « sacrifier » le conducteur du train au jour de l'accident, la date de l'instauration de certaines lois dont celle se rapportant à la signalisation, à savoir le S1A pour qu'elle soit antérieure à l'accident, or elle a été éditée bien après. Et la société continue dans la mauvaise gérance des crises et à mettre en danger la vie des voyageurs. Ainsi, suite à l'accident de train de Fondok J'did et qui a conduit au renversement du train, le chef conducteur a été convoqué immédiatement pour enquête. Après des heures passées à répondre, juste suite à l'accident, insistons-nous dessus, le dit-chef a assuré le service le lendemain même et à 7 heures du matin, sans même avoir été examiné par un médecin. Personne n'a pris en compte ni l'état de traumatisme qui survient après un incident pareil, ni la fatigue physique suscitée par le voyage, par l'accident et l'enquête… Le train en question fait partie de la nouvelle gamme prévue pour remplacer ce qu'on appelait avec ironie « les trains de la deuxième guerre mondiale ». Or, cette gamme a été refusée par les conducteurs à cause des dangers qu'elle représente et rappelons ici que les responsables et les ingénieurs de la SNCFT n'ont pas fait appel aux conducteurs pour les habituer au genre de la locomotive susceptible d'être utilisée lors de l'achat de nouveaux trains. La vitesse même des nouveaux trains constitue un danger… Il existe par ailleurs une logistique freinant automatiquement le train dès qu'il dépasse les 130 km à l'heure. Or elle a été désactivée, ce qui permet le dépassement de vitesse, souvent fatal. La programmation automatique qui stoppe le train au cas où le conducteur n'a pas vu un feu rouge, a également été désactivée et remplacée par l'assistant qui devrait capter le signalement – et l'on se demande alors comment échapper à un accident par un jour aussi pluvieux comme à Bir El Bey le jour de la collision – sachant que les feux de signalisation eux-mêmes sont mal entretenus. Ces nouveaux trains ne contiennent par ailleurs ni rétroviseur ni caméra permettant au conducteur de s'assurer que tous les voyageurs aient été installés ou alors aient quitté le train. Et à chaque fois, le conducteur devrait vérifier en sortant la tête. La locomotive GT quant à elle ne facilite pas la collaboration entre le chef et son assistant car elle est séparée par un mur et l'assistant est obligé à chaque fois de se lever pour effectuer la vérification nécessaire sur l'état du conducteur. Les moindres détails peuvent être fatals… Les gares sont construites d'une manière aléatoire, assure notre interlocuteur Issam Eddine Fitati en se basant sur des études. Les bâtiments, mal conçus, ont vacillé à la construction et se sont presque effondrés et on les a redressés. Les trottoirs sont très élevés, sont dangereux pour les gens en bonne santé et ne prennent pas du tout en compte les personnes à besoins spécifiques. Ces derniers n'ont même pas d'issu pour entrer ou sortir de la gare, les seules issues existantes sont de hautes escaliers. Le train démarre souvent d'ailleurs avec les portes ouvertes, chose strictement interdite et dangereuse. Que de gens ont basculé dehors et ont trouvé la mort, glissant par la portière ouverte… Les stagiaires et étudiants de l'école de Hammam-Lif n'ont déjà pas le droit d'utiliser les simulateurs lors de leur apprentissage, alors qu'il n'existe pas de train destiné à l'apprentissage non plus. Un seul enseignant assure d'ailleurs les cours, remplaçant trois qui l'ont fait jusque là, afin d'enseigner « les antennes », « les thermiques », « les électriques » et « les mécaniques ». Les étudiants ont vu réduire leur période d'études théorique de 6 mois à 24 jours et ils n'ont que 15 jours de pratique, périodes jugées insuffisantes par M. Fitati. Notons par ailleurs que Issam Eddine a présenté des rapports qui lui ont coûté le gel de ses promotions, et qu'il demande, sans succès à rencontrer le PDG de la SNCFT, et ce depuis 12 ans. Il a envoyé une lettre à l'ancien président, à l'ancien ministre des transports, à l'ancien ministre de l'intérieur et du développement local, au premier ministre, et au procureur de Tunis et personne d'entre eux n'a donné suite ni ait pris de disposition pour arrêter le danger que constituent jusqu'au jour d'aujourd'hui les trains en Tunisie…