De Latifa Robbana Doghri et Salem Trabelsi - C'est une histoire de femmes, mais attention ! Pas n'importe quelles femmes ! C'est une histoire de battantes, en acier trempé ; mains de fer dans un gant de velours. Ou le contraire. Ou les deux à la fois. De celles dont on évoque rarement le courage, comme le parcours hors-norme, dans une société machiste, qui verrait plutôt d'un très mauvais œil, l'incursion de jeunes filles, dans un domaine, considéré comme la chasse-gardée d'une gent masculine, qui pourrait tolérer leur présence, mais à condition qu'elle soit confinée aux marges. Sauf qu'elles en ont décidé autrement. C'est l'histoire de Wided Younsi (Championne d'Afrique 2010), de Rym Jouini (Vice -Championne du monde 2010), de Houda et Marwa Rahali (Championnes de Tunisie de 2008 à 2010), et de bien d'autres encore, qui portent leur passion comme leurs rêves, à bout de bras, avec toute la force de leur volonté, tendue vers un seul but : devenir championnes olympiques. C'est l'histoire de « Bnet El Boxe »… En une fraction de seconde, on pense à « Million dollar baby » d'Eastwood, mais pas dans le versant tragique. Plutôt dans la volonté –farouche- de vouloir en découdre lors même que c'est loin d'être évident. Dans une autre forme de lutte avec un quotidien des plus gris, où les seuls prémices d'espoir qui percent, à la fin d'une dure journée de labeur à l'usine, c'est le bonheur, presque tangible, que ces jeunes femmes éprouvent, en se dirigeant vers la salle pour s'entraîner. Quand elles sont sur le ring, la métamorphose est impressionnante. Elles ne sont plus ces rouages bien huilés d'une chaîne à répétition, dans une quelconque usine, mais redeviennent plus que jamais elles-mêmes : c'est-à-dire des boxeuses qui en ont à en revendre, qui ne baissent pas facilement leur garde, et qui ont la rage au ventre en guise d'antidote à toutes les douleurs. C'est là qu'elles oublient leurs soucis, le regard, sans concession des autres, et la machine infernale des « Temps modernes », façon Chaplin, qui grignote leur jeunesse à fonds perdus. C'est là aussi, dans ce qui semble leur élément le plus naturel, qu'elles ont accepté de se laisser aller, devant la caméra, à raconter l'histoire d'une vocation, qui constitue le sens de toute leur vie. Elles le disent d'ailleurs, simplement, le regard droit et clair : sans boxe, elles ne pourront pas survivre. La boxe d'abord, le reste suit. Ou ne suit pas, c'est selon. Salem Trabelsi et Latifa Robbana Doghri, sont parvenus à retracer, à travers ce riche documentaire de quelque 52 minutes, l'itinéraire, jonché de tessons, de ces « héroïnes » d'aujourd'hui, qui cachent leurs blessures sous de larges sourires, et foulent aux pieds craintes et préjugés, pour ne jamais lâcher prise. Elles ne sont pas du genre à abdiquer. Avec beaucoup d'humour, beaucoup d'humanité, et une empathie certaine, le film brosse les portraits croisés, de ces championnes exemplaires, qui sont parvenues à s'imposer au final, grâce à leur volonté et à la force des poignets, au propre comme au figuré, en narguant tous les interdits, et en se défendant bec et ongles, jusqu'à imposer le respect, et au-delà du respect, l'admiration de tous ceux qui ont vu, au fur et à mesure, tous leurs a priori s'effilocher, et leurs préjugés rances, fondre comme neige au soleil. Chapeau bas !