La Tunisie célèbre, aujourd'hui dimanche 5 juin, la journée nationale et internationale de l'environnement au moment où la situation environnementale dans le pays s'est empirée considérablement, au vu et au su de tout le monde, ces derniers mois, aggravant les nombreuses atteintes enregistrées, dans ce domaine, sous l'ancien régime, et apparues au grand jour, après la Révolution, en l'absence des maquillages et occultations systématiques pratiquées, autrefois, pour les cacher. Présentant hier, l'état des lieux environnementaux dans notre pays, le ministre de l'Agriculture et de l'environnement, Mokhtar Jallali, a évoqué, entre autres, la fermeture de la station de traitement des déchets industriels de Jradou, dans le Grand Tunis, sous la pression de l'opinion publique et des riverains qui voient en cette station une source de nuisance pour l'environnement et d'être une source de pollution, alors qu'elle était présentée comme un des grands acquis environnementaux de la Tunisie, par les anciennes autorités. Entre temps, les industriels concernés, privés de ses prestations, entassent les déchets de leurs usines sur place, en attendant le règlement du contentieux, porté devant la justice, ou les évacuent, anarchiquement, dans le milieu naturel. Le ministre a indiqué que les experts désignés par la justice pour évaluer l'impact de la station ont rédigé leur rapport et l'ont transmis au tribunal compétent, et le ministère a présenté une requête pour en avoir une copie, car, le ministère s'arroge le droit d'évaluer le contenu du rapport. Si l'impact négatif est établi, la station sera fermée, définitivement, encore que le directeur d l'Agence nationale de gestion des déchets (AnGed), présent à la rencontre, a défendu la conformité de la station aux standards. On se rappelle également que des citoyens de la région d'Enfidha ont incendié, il y a quelques semaines, une tannerie située dans les environs de leur lieu d'habitation sous prétexte qu'elle pollue l'environnement. Mais, paradoxalement, ces actions citoyennes qui reflètent une prise de conscience chez les Tunisiens, concernant l'importance de la sauvegarde de l'environnement et de la nature, sont accompagnées d'abus et d'atteintes graves portées à l'environnement de la part des citoyens eux-mêmes, comme les constructions anarchiques ou les occupations sauvages d'espaces forestiers. Or, la journée de l'environnement a pour thème, cette année, la protection des écosystèmes forestiers. Ainsi, des atteintes au littoral et au domaine public maritime, de la part de citoyens ont été enregistrées, dans plusieurs gouvernorats côtiers, de Bizerte, à Sfax. Des gens ont procédé à des constructions anarchiques sur le domaine public maritime et les plages publiques. L'action publique justifiée par le développement économique et social a eu des effets négatifs sur l'environnement en Tunisie, connus et recensés, depuis longtemps, mais qui attendent encore des solutions efficaces, à l'instar de la pollution chimique par le rejet du phosphogypse, à Gabès, du fait des industries chimiques implantées dans cette ville, ou encore la pollution par le mercure à Kasserine, du fait de l'usine de cellulose. Les écosystèmes des lacs de Bizerte et de l'Ichkeul sont aussi affectés. Près de 90 % de l'activité économique, en Tunisie, est concentrée dans les villes du littoral et les zones côtières, au détriment des gouvernorats de l'intérieur et il est aujourd'hui admis que le déséquilibre régional en matière économique et social a été un des vecteurs du mécontentement populaire ayant déclenché la Révolution du 14 janvier. Cette concentration qu'on pourrait justifier par des considérations de rendement et d'efficacité économiques, aura coûté, au contraire, doublement, très lourd, en regard de sa pression sur l'environnement, d'une part, et des destructions ayant accompagné la Révolution, d'autre part. Le ministre a passé en revue des programmes et des actions de toutes sortes tendant à améliorer la situation environnementale, insistant plus particulièrement sur la nécessité de procéder à des révisions appropriées des législations en vigueur, de manière à se montrer plus ferme dans la lutte contre les atteintes à l'environnement, comme la fermeture des établissements industriels reconnus coupables de pollution. Or la législation actuelle ne l'autorise pas, dans les sanctions prévues à cet effet. Les autorités devraient aussi rétablir l'ordre environnemental, en traitant avec fermeté les atteintes et abus portés à l'environnement, par des individus au comportement irréfléchi, qui ont profité de la Révolution pour contrevenir à la loi. Or, la Révolution devrait offrir à la Tunisie une occasion précieuse pour adopter des mesures exemplaires dans le domaine de l'environnement et de la protection réelle de la nature, à même d'enrichir les nombreuses autres actions exemplaires qui l'ont marquée, en matière de liberté et de citoyenneté. Salah BEN HAMADI zarzour [email protected]