La colère gronde à Sfax contre le règne de l'insécurité. Les citoyens déjà en émoi, en raison des sit-ins et d'actes de violence isolés avant la période de l'Aïd, de la rumeur de trafic de Kalachnikovs et de pistolets en provenance de Libye et de bombes à gaz ou à gel paralysant, sont de plus en plus alarmés par les informations circulant à une vitesse vertigineuse au sujet des quatre meurtres successifs commis en l'espace de dix jours, d'actes de banditisme et de braquage en plein jour, de vols à l'arraché, de confiscation de biens, d'agressions et d' actes de violence, d'infractions de toutes sortes au code de la route et d'autres délits plus anodins. De l'émoi à l'alarme
Les premières inquiétudes sont nées avec l'évasion de détenus de leurs prisons, avec l'organisation de sit-ins accompagnés d'agressions et d'actes de violence et parfois de rackets , particulièrement lors du blocage des routes à l'instar de ce qui s'est passé sur la route de Mahdia, avec les rassemblements bruyants et parfois violents devant le siège du gouvernorat, avec les actes d'agression verbale à l'encontre des agents de la circulation, avec la mainmise sur les centres de transfert des ordures, avec les actes de sabotage de conduites d'eau, avec les arrêts des trains et la perturbation délibérée du trafic ferroviaire, avec les rumeurs d'attaques de locaux de commerce etc… De l'émoi, les citoyens sont passés à l'alarme suite aux actes de brigandage perpétrés par des bandes de racketteurs dans l'enceinte de la Médina, surtout qu'il s'agit selon une source policière, de nouvelles formes de délinquance organisée, qui révèle une audace voire même une désinvolture inaccoutumées et qui exige des moyens de lutte appropriés. La côte d'alerte a été par la suite atteinte, après la série de quatre meurtres commis en une dizaine de jours. Même s'il s'agit d'actes individuels, ce qui est nouveau, c'est le culot, la cruauté et la désinvolture avec lesquels ils ont été commis, et surtout l'usage dans deux cas, d'armes à feu, en l'occurrence des fusils de chasse. Le sentiment d'insécurité atteint son paroxysme sur les plans sécuritaire, municipal et économique a connu son paroxysme avec l'assassinat de l'homme d'affaires Imed Mseddi, tué à son domicile d'un coup de fusil à bout portant.
Mouvement populaire
Ce fut la goutte qui a fait déborder le vase et poussé les associations de la société civile à réagir pour crier haut leur ras-le-bol. A l'appel de ces associations, plusieurs centaines de citoyens se sont rassemblés avant-hier soir devant le siège du gouvernorat de Sfax, en signe de protestation contre la recrudescence de la criminalité dans la ville. Les promesses faites à la délégation de citoyens reçue par le gouverneur de la région n'ayant pas été suffisamment convaincantes, un rassemblement autrement plus impressionnant a eu lieu hier devant le siège du gouvernorat après les funérailles du défunt Imed EL Karray. Objectif des participants : crier leur exaspération et exiger des moyens et des interventions adéquats pour une ville de près d'un million d'habitants.
Campagne de sécurité
Il faut reconnaître quand même qu'une campagne anti criminalité permanente a démarré au début du mois de septembre avec la mobilisation des moyens disponibles et des différentes brigades des forces de sécurité, renforcées trois fois par semaine, par une unité de l'armée nationale. Bilan de la campagne : 200 arrestations de personnes recherchées pour des délits divers. Il y a lieu également des décisions portant sur la création de check-points aux entrées de la Médina. Rôle des citoyens Mais que peuvent faire les forces de sécurité avec des moyens de bord modestes, sachant que la campagne quotidienne, n'a semble-t-il pas dissuadé les délinquants de tous bords qui ne donnent pas l'air d'être intimidés le moins du monde.? Là se pose la question de la participation des hommes d'affaires et des citoyens pour doter ces forces de sécurité de moyens logistiques adéquats. Nous croyons savoir à ce sujet que l'exemple a été donné à Sousse par un homme d'affaires de la région qui aurait fait don aux forces de sécurité locales de dix voitures 4x4. Il faut dire aussi que si la montée au créneau de la protestation a sa raison d'être, il n'en est pas moins vrai que la passivité des citoyens est pour quelque chose, dans cette situation. A ce propos la police invite la population à se débarrasser de sa peur, à ne plus craindre les représailles, donc à réagir et à cultiver le réflexe de la dénonciation systématique et de plainte chaque fois que quelqu'un est victime ou témoin d'un délit quelconque. Car le silence et la passivité sont les meilleurs garants d'impunité et les meilleurs stimulants pour les malfaiteurs.
Partis politiques : un silence intrigant
Des associations initiatrices des rassemblements de Sfax ont dénoncé avec vigueur le silence des partis politiques vis-à-vis du règne du climat d'insécurité dans la ville et estiment que les partis ont manqué une occasion en or de montrer qu'ils collent de près aux préoccupations et aux attentes des citoyens. Taieb LAJILI