Avec l'effervescence politique, toute nouvelle pour les jeunes, mais qui n'étonne guère outre mesure « les vieux de la vieille », se déploie une sournoise perversité des âmes, dans le pur esprit des techniques – classiques – de l'endoctrinement. Logorrhées, débats stériles, vindicte, chasse aux sorcières et règlements de comptes : les gardiens de la Révolution ont, à l'évidence, oublié Danton et Robespierre, s'éloignant de ceux qui leur ont confié ce statut historique : les jeunes. Les voilà, donc : inévitables, incontournables, ces tribuns récupérateurs se querellant pour un siège, pour une circonscription, pour une liste présentant, chacun, la panacée miraculeuse ; ce programme messianique qui sauvera le pays. Il est vrai qu'on est, en plein, projeté dans le 23 octobre. Il est tout aussi vrai que la plupart de nos concitoyens n'ont pas de visibilité parce que la plupart des partis ne croient pas eux-mêmes en leurs programmes. Pour autant, bien de programmes, comme celui d'Ennahdha, voguent carrément dans les stratosphères injoignables : il suffit (pour l'économie, par exemple) de rajouter 3 ou 4 points par indicateur et le tour est joué. Contenter le bon Dieu et son diable, en somme ! L'opération est commode. Elle est, de surcroît, reprise par bien d'autres partis « historiques ». Dépoussiérer les vieilles recettes presque toutes dictées par la Banque Mondiale et le FMI et relooker les chiffres en fonction des réalités actuelles. Il est vrai que la seule chose révolutionnaire dans la délivrance de la Tunisie cela reste… la Révolution elle-même. Nous aurions pu, néanmoins, nous faire l'économie de graves dérapages post-révolutionnaires si l'on avait fait comme les Polonais : préserver les institutions, préserver les entreprises, ce qui signifie, finalement, préserver l'essence de la Révolution elle-même. Or que fait-on ? passe-droits d'un type nouveau ; clochardisation des institutions, avec, de surcroît, des guerres de gangs au nom de la résurgence du tribalisme. Quelqu'un a eu, hier, cette édifiante constatation : quelque part, on fait tout pour imiter les Trabelsi… Nos geôliers d'antan, en somme. N'y a-t-il pas là, une incapacité sociale à s'affranchir ? Ne sont-ce pas là des relents du syndrome de Stockholm ?