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«Ennasribya» Tunisiens et Libyens apprendront-ils à cohabiter?
Reportage
Publié dans Le Temps le 23 - 09 - 2011

• Tout s'emmêle: arrogance de l'argent; dédain; préjugés; irascibilité
Il y a une semaine, une jeune fille de vingt ans a été jetée du troisième étage à la cité «Ennasser» à Tunis. Ce qui semble être un fait divers – aussi dramatique soit-il – a fait couler plus d'encre et suscité plus de polémique que d'habitude. Et pour cause, ceux qui ont commis ce crime sont des Libyens et la jeune fille est tunisienne.
Depuis des années déjà, «ce genre de tourisme» en Tunisie est critiqué tout bas. On reproche à «nos filles de joie» de se donner à des étrangers et surtout aux Libyens qui s'en vantent ailleurs en nous collant «une mauvaise réputation» parmi les autres pays. Sauf que l'argent n'a ni couleur, ni odeur, mais aussi n'a pas de nationalité, et c'est ce qui importe à celles qui le reçoivent.
Cette année est différente et nos voisins ne sont pas venus ni pour le tourisme médical, ni pour un autre genre de tourisme parallèle. Ils sont venus fuir l'enfer de Kadhafi, et cela semble être l'enfer chez certains Tunisiens… tandis que d'autres y voient un éventuel investissement à court et à long terme et d'autres encore, sont juste fiers de tendre la main à d'autres peuples ayant suivi l'exemple du peuple tunisien dans sa révolution.
Que reproche-t-on à la présence libyenne? Est-ce le Tunisien qui ne supporte pas vraiment d'être «envahi? Nous avons effectué un reportage à la cité Ennasser, non seulement pour le crime qui y a été commis, mais car une grande concentration libyenne y est. Mais déjà ailleurs, nous avions reçu plusieurs témoignages et entendu plusieurs réflexions à propos de la présence libyenne sur notre sol. Ainsi S. K, âgée de 21 ans et habitant la Soukra nous rapporta « Souvent, les Libyens me font pitié. J'ai souvent assisté à des scènes où pour un rien, un Tunisien lâche ses nerfs sur l'un d'entre eux et je l'entends alors le traiter de tous les noms, lui demander de rentrer chez lui avec un ton des plus hautains, sans que le Libyens ait vraiment commis quelque chose, ou du moins que nous ne commettons pas. Et souvent, il ne répond pas… »
N. D, la trentaine nous raconte également comment dans un café à El Manar, un Libyen dont un bras est cassé s'est vu servir trois sandwichs l'un loin de l'autre sur un comptoir et que sans l'aide d'une jeune femme, il n'aurait pas pu les ramasser. Il la remercia et partit sous les remarques et regards cyniques des serveurs…
Tentes de soutien
Au sud comme au nord, en citant Ennasser aussi, des tentes ont été dressées pour collecter des dons pour les Libyens, des gadgets sont vendus glorifiant l'ancien drapeau – flottant par ailleurs un peu partout en Tunisie – et d'autres symboles de la révolution libyenne. Des jeunes tunisiens d'un peu partout de notre pays sont partis sur les frontières aidant des familles libyennes à porter leurs bagages et des familles tunisiennes en ont reçues chez elles pendant des mois.
Mais ailleurs, également, à Ennasser et aux zones approximatives, le prix de l'immobilier a grimpé. R. S, la trentaine nous témoigne à ce propos : « deux ou trois familles tunisiennes quittent leurs appartements, ou maisons et louent ensemble une villa et louent leurs biens qui leur rapportent alors le triple de ce que leur coûte le loyer partagé sur trois.»
Seulement, la tension existe bel et bien et l'on entend souvent « y en a marre, qu'ils rentrent chez eux »
Pourquoi ce ras le bol après tant de marques de soutien, et aussi de profit d'un peuple qui, et nous le disons tous, a propulsé la consommation au moment d'une crise – citons ici juste l'exemple des cliniques ?
Devant le lycée d'Ennacer, Y. A. S, jeune fille âgée de 15 ans témoigne « avoir été dragué devant le lycée et d'une façon assez agressive par un jeune libyen qui lui a lancé un viens chez moi assez vulgaire », elle ajoute que ce qui la dérange aussi sont les jeux dangereux et les zigzags que les jeunes libyens aiment effectuer avec des voitures ou motos. Cela dit, elle s'accorde avec toutes les autres jeunes lycéennes à qui nous avons demandé si les libyens venaient souvent au lycée, que cet incident est isolé et que même si les jeunes libyens draguent souvent – et d'une manière qui manque de galanterie – sur les routes et dans les cafés, on ne les voyait jamais rôder autour du lycée.
Un jeune adolescent de 17 ans, B.G s'exclame aussitôt nous lui posons la question sur la présence libyenne ici « Ils me causent du stress, qu'ils rentrent chez eux ! Dans notre immeuble, ils organisent des soirées arrosées jusqu'au petit matin, avec filles et bruit strident évidemment ». Il semblerait selon nos témoins que les jeunes garçons arrivant avec leurs familles louent des appartements qu'ils utilisent « entre amis » loin des yeux des parents…
« Am El Hédi », la cinquantaine et gardien d'immeuble parle quant-à lui d'un manque de « savoir vivre », « ils mettent la poubelle dans l'ascenseur par exemple ou la jettent n'importe où dans l'immeuble et leurs enfants « font du bruit », sinon pour les soirées, nous les laissons pas faire et notre résidence « reste propre » assure-t-il.
Dans une pizzaria, Soumaya une jeune femme travaillant au comptoir d'une pizzeria dit être toujours dérangée ou par des regards assez « vulgaires » dans son milieu de travail ou par de la drague agressive dans la rue.
Et si l'on oubliait la nationalité en soi ?
Farah 16 ans voit les choses d'un autre œil et elle explique : « Il y a certes de la drague et qui dérange, mais seulement un peu moins galante que chez les garçons tunisiens. « tandis que son amie Mouna pense à l'économie et assure qu'il faut voir à long terme « déjà, ils font tourner l'économie et plus tard, ils reviendront investir ici s'ils trouvent le bon environnement socio-économique et l'accueil. Le fait qu'on leur soutient dans leur crise renforcera également les relations économiques entre les deux pays plus tard et cela nous sera bénéfique «.
En somme, nous reprochons aux Libyens des « manières qui manquent de savoir vivre « et que nous subissons cela. En premier lieu vient la drague et le comportement « arrogant « des jeunes. Mais peut-on affirmer que les Tunisiens n'en commettent pas ? Peut-on trancher que tous nos concitoyens ont des bonnes manières et ne jettent pas leur poubelle n'importe où ? Et si les jeunes natifs de la société conservatrice libyenne se sont finalement trouvés à côtoyer une société plus ouverte, sans qu'ils en comprennent pas vraiment le fonctionnement et qu'ils soient simplement tentés de suivre le modèle et de « profiter « ? Arrivant d'une société où les femmes sont souvent couvertes et débarquant à Ennasser où la femme la plus respectable s'habille d'une façon libérée et que d'un autre côté, avouons-le, la prostitution y trouve son compte, comment ces jeunes hommes peuvent-ils vraiment faire la différence entre les deux catégories et traitant avec l'une ou l'autre ? Et puis c'est comme si nos garçons n'avaient jamais dérangé une femme respectable ou une jeune fille devant un lycée…
A ce propos, N. D que nous avons cité ci-dessus souligne « j'ai été à Tripoli pour plusieurs jours, toutes les femmes s'y couvrent les cheveux et même ma mère le fait quand elle y va, quant à moi, j'ai gardé mon look moderne et libéré, personne, je dis bien personne ni aucun homme ne s'est permis un regard déplacé et encore moins de m'aborder. Les Libyens ne font que copier un modèle qui existe déjà ici. Ils viennent et s'adaptent à la société tunisienne telle qu'ils la voient et franchement, ne nous grillons-nous jamais un feu ni ne doublons nous à droite ? Nos adolescents et jeunes garçons sont-ils vraiment tous si galants, ou même galants tous court ? Et puis quant au crime commis il y a une semaine et dont tout le monde en parle, il suffit d'ouvrir un journal et de jeter un coup d'œil sur les faits divers pour constater qu'on en a tous les jours, et parfois avec plus de cruauté «.
Les paroles de N. D nous font alors penser au dicton tunisien, que nous traduisons ici littéralement «Oh mon habitude que tu es mauvaise quand je vois d'autres te commettre» nous semble très adéquat à la situation.
Rappelons également que nous reprochons souvent à l'autre rive de la Méditerranée son accueil froid ou raciste – parfois – à nos concitoyens et que ces Européens, que nous jugeons racistes, nous répondent alors que cela est suscité par le manque de civisme des immigrés ou alors qu'ils ne répondent pas au même modèle de la société européenne. Nous semblons alors reprocher aux Européens la même chose que nous vivons actuellement ici quand la majorité appelle au départ des Libyens et que même dans un café nombreuses sont les conversations qu'on surprend n'abordant que « l'invasion libyenne «. Et même si les drapeaux libyens continuent à flotter un peu partout en Tunisie, nous avons presque oublié la fierté qu'a suscitée notre premier élan de solidarité…


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