Par Ahmed NEMLAGHI - Le dossier juridique de Ben Ali s'alourdit de jour en jour. Outre son implication dans des affaires de corruption, en tant que principal instigateur, il est également accusé d'homicide volontaire suite aux multiples actes de barbarie, par lesquels des centaines de personnes ont été abattues lors de la Révolution, dans différentes régions de Tunisie, par des agents qui agissaient selon ses directives et ceux qui travaillaient sous ses ordres. Snippers, agents de sécurité ou autres, n'ont pas hésité à faire usage de leurs armes à feu, sur les manifestants avec l'intention délibérée de leur donner la mort. Ils n'ont épargné ni femmes ni enfants ni vieillards. Comme l'a déclaré dernièrement M. Lazhar Karoui-Chebbi actuel ministre de la Justice au gouvernement de gestion des affaires courantes, plus de trois cents témoins ont été entendus à cet effet, rien qu'en ce qui concerne la localité de Kasserine. Il a ajouté que de ce fait, une délégation mixte, du ministère de la Justice et de l'Intérieur, se rendra prochainement, au siège de la direction d'Interpol à Lyon, afin d'activer l'extradition de Ben Ali et de ses complices en état de fuite. Par ailleurs M. Beji Caid Essebsi, Premier ministre au gouvernement de gestion des affaires courantes, a reçu lundi dernier, M. Ben Hadid , ancien diplomate et spécialiste en droit international, lequel envisage la tenue d'un forum de juristes et d'experts à cet effet. Quelle action d'Interpol ? L'Etat Tunisien, membre de cette organisation policière internationale, avait émis dès la fuite de Ben Ali et quelques uns de ses proches, des mandats d'arrêt internationaux à leur encontre. Tous les Etats membres ont été aussitôt alertés, en vue de localiser les concernés et les arrêter pour les livrer à l'Etat requérant. La France, la Suisse et l'Union Européenne ont procédé au gel des avoirs de Ben Ali et ses proches à l'étranger, eu égard à leur implication dans des affaires d'acquisition illégale de biens immobiliers, ainsi que de trafic de devises étrangères. Ben Ali, son épouse et quelques uns de ses proches, ont trouvé asile en Arabie Saoudite. Leur extradition à partir de ce pays est-elle envisageable ? Dans l'absolu, la réponse à cette question, serait par l'affirmative, l'Etat d'Arabie Saoudite figurant officiellement parmi les 188 membres d'Interpol. D'autant plus que la Tunisie a des accords d'entraide judiciaire avec la Ligue Arabe dont l'Arabie Saoudite est membre. Cela dit la condition d'existence d'accords d'entraide judiciaire ne semble pas importante, à côté d'autres conditions, dont entre autres, l'existence d'incrimination ou l'absence de motifs politiques. Or Ben Ali est bel et bien incriminé et il est loin d'être un réfugié politique. Toutefois, la réticence à livrer Ben Ali pourrait être fondée sur le fait, qu'il est accusé d'homicide volontaire et qu'il encourrait de ce fait la peine de mort. La jurisprudence de la Cour Européenne de Justice a tranché dans ce sens, dans plusieurs cas en déclarant que la peine de mort constitue en elle-même une torture, motivant le refus d'extradition. Garantie d'un procès équitable pour Ben Ali et ses complices M. Lazhar Karoui Chebbi a déclaré que des mesures ont été prises à, l'effet d'assainir la justice, condition sine qua none pour la garantie de procès équitables aussi bien pour Ben Ali que pour tous les justiciables. C'est sur cette base que des démarches diplomatiques avec l'Etat d'Arabie Saoudite, pourront intervenir en vue de faciliter et activer l'extradition de Ben Ali et ses complices. La tâche est ardue, mais elle est envisageable, tant aux yeux des responsables politiques, qu'à ceux des juristes et des experts qui s'y attèlent.