Par Abdelkader BEN JDIRA - Il va de soi que les jeunes constituent, dans tous les pays, constituent le maillon fort de l'agir social et /ou sociétal. C'est d'eux que dépend la tournure des évènements, ils sont le catalyseur de tout changement. En cas de « bonne » socialisation, rappelons-le, les futurs adultes seront en mesure de jouer un rôle déterminant en tant qu'acteurs sociaux. Ceci étant, tous les gouvernements, désireux de maintenir le statu quo , s'étaient toujours orientés vers une dépolitisation de cette « force vive de la nation ». Le rôle de l'école avait été donc de « reproduire la société », selon l'expression de Max Weber, au lieu de la révolutionner. Reproduire les antagonismes, pérenniser les inégalités sociales. Ceux qui réussissaient étaient les « héritiers du système », pour reprendre un peu Bourdieu. Quant à l'accès au « marché de l'emploi », il a toujours été tributaire du « capital social »(Bourdieu)… · L' « intoxication »des jeunes : arme redoutable du système ! Afin de « neutraliser » cette force dont le pouvoir n'est pas du tout négligeable, une force devant œuvrer ,normalement, en faveur du progrès, du changement_ notamment des mentalités_ les gouvernements s'étant succédé avaient recouru à l' « intoxication », au moyen d'une « drogue douce », le sport , et plus particulièrement le football. Les jeunes étaient amenés à se désintéresser quasiment de tout, sauf de ce sport qui a toujours mobilisé les foules, a servi de sujet aux conversations, aussi bien dans la sphère privée que publique. Les jeunes s'intéressaient, je dirais même se vouaient aux équipes, aussi bien locales que mondiales. Ils sont de ce fait, passés maitres dans l'art d'analyser les matchs, apprenant par cœur les noms de joueurs de différentes nations, leurs postes respectifs, les noms d'entraineurs, les tactiques suivies, etc. chaque lundi, on ne parlait que football. Un fanatisme est apparu et s'est ancré dans les milieux jeunes et moins jeunes. Pire encore, des querelles familiales entre fans de différents clubs éclataient, des batailles rangées s'organisaient dans les stades faisant dégâts et victimes. Et le gouvernement dans tout ça ? Sa devise a toujours été le laisser-faire, l'essentiel étant qu'on se désintéresse de la politique. · La « mollesse » : tout est permis sauf la politique ! Si du temps de Bourguiba le football était l'arme redoutable du système, du temps de Zaba, la « neutralisation des jeunes » s'est renforcée via une autre arme non moins redoutable, la « mollesse ». le gouvernement s'est montré entièrement permissif en matière de mœurs, encouragea les formes de « culture bas de gamme », bâillonna les vois engagées en matière d'art de tous genres. Ferma les frontières, après avoir fermé la porte, à bon nombre de chanteurs engagés de l'intérieur comme de l'extérieur. La « mollesse » a atteint son apogée au point que les jeunes dansaient, oui, dansaient le slow sur les chansons de Marcel Khalifa !!! S'en-suivit, il faut l'avouer, un relâchement des mœurs, des mineures et mineurs étant admis, sans contrôle aucun, dans des lieux « douteux »… Mais là n'est pas notre problème essentiel ! Le comble est que les jeunes, intoxiqués par le football, sont devenus totalement ignorants en matière de politique, ne prenant même pas la peine de s'intéresser à leur avenir. Cela a permis à Zaba de se retrouver, excusez le mot, avec un « troupeau » qu'il menait comme bon lui semble. Des mesures très graves, ayant trait à l'avenir du pays et des jeunes et qui auraient provoqué un mouvement de refus, de contestation générale, dans les années soixante-dix du siècle dernier ont pu être prises et appliquées, profitant de la « somnolence », du « rêve éveillé » des jeunes endormis, « drogués »… · Pire qu'une « drogue » : l' « opium » Qui ne connait pas la fameuse, historique assertion de Karl Marx, « la religion est l'opium du peuple ». Ce grand philosophe entendait par là que l'attachement à la religion et son mauvais usage jouent le rôle de « drogue dure », en privant l'individu de toute capacité à raisonner. Dans cet ordre d'idées, Bachelard parle d' « obstacle épistémologique », frein au savoir humain. Mais là n'est pas notre sujet. Ce à quoi nous voudrions attirer l'attention, ici, c'est que les courants religieux_ on pourra les qualifier comme on veut, là n'est pas le problème_ recourent à un endoctrinement massif, soutenu, à un lavage d'esprit, ayant pour base la religion. Cela est de nature à favoriser l'illettrisme, ces courants prônant un enseignement limitatif, « coranique », mais surtout restrictif car empêchant le recours à l'esprit scientifique, critique. On risque de s'acheminer , de plus en plus, vers la limitation de la connaissance à la « parole divine » et ce qui s'en suivra comme dogmatisme, orthodoxie et surtout relégation de la science aux oubliettes étant donné que science et religion ne peuvent, en aucun cas aller de pair. Nous ne sommes pas contre la religion, nous sommes contre l'usage de la religion à des fins de pouvoir politique, contre le recours à la religion comme prétexte pour freiner toute recherche scientifique, tout progrès de la connaissance. A l'ère actuelle, une ère post-révolution, censée favoriser le progrès de l'esprit humain en le libérant de tout ce qui entrave sa marche vers le progrès, les jeunes risque d'être l'objet de trois armes s'égalant en matière de « nocivité » , la « drogue » et la « mollesse »_ dont ils n'ont pas encore été « désintoxiqués »_ auxquelles s'ajoutera une arme non moins redoutable : « l'opium du peuple ». Pour qu'un désintoxiqué parvienne à réussir une cure de désintoxication, il doit y opter de son propre gré, mais tout en étant accompagné, pris en charge et suivi. Espérons que nos « drogués » éprouveront le besoin de faire cette cure et surtout trouveront l'accompagnement qui s'impose…