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« Ce qui m'inquiète, c'est le silence du gouvernement »
MAYA JRIBI (Secrétaire Générale du PDP et membre de l'ANC) fait le point
Publié dans Le Temps le 13 - 03 - 2012

Pétillante d'énergie et auréolée d'un sourire contagieux, Mme Maya Jribi nous reçoit au siège du PDP, débordant d'enthousiasme et de détermination. Aujourd'hui, elle est membre de l'ANC et Secrétaire Général du parti PDP, un parti qui se réclame de l'Opposition.
Biologiste de sa formation, elle était et est avant tout une militante de première heure et femme à plusieurs casquettes.
Elle fait partie de ces rares femmes tunisiennes qui ont forcé la porte du monde politique exclusivement masculin, instaurant, ainsi, les premiers piliers du rôle politique fondamental de la femme dans le développement et le progrès de la société.

Le Temps : En tant qu'ancienne militante au sein de l'Union générale des étudiants de Tunisie, comment trouvez-vous la situation de la vie universitaire et estudiantine, aujourd'hui, les préoccupations et les soubresauts ?
Maya Jribi : En tant que femme politique et ayant appartenu à l'UGET, je pense que les étudiants, aujourd'hui sont confrontés à plusieurs défis. D'abord, les conditions d'études beaucoup plus difficile qu'avant, le logement et l'infrastructure qui ne suit pas, sont un sérieux problème, la vie est chère. Elle a donc, des retombées directes sur nos étudiants. En outre, un second défi s'impose à eux. L'espace universitaire était interdit d'expression libre sous Ben Ali alors que ça devait être par excellence un espace ouvert aux débats, un laboratoire d'idées et une pépinière de leadership futurs. Il s'agit, aujourd'hui d'apprendre à mettre en place les mécanismes démocratiques, d'écoute, d'échanges, d'acceptation de l'autre et l'élaboration des pensées politiques, l'instauration de proposition concrète et l'élaboration de projets sociétaux. C'est là où réellement, naissent les futurs leaderships politiques, sociétaux, associatifs et syndicaux de la future Tunisie. Le troisième défi est la réalisation réelle et la sauvegarde des objectifs de la Révolution, qui a mis les jeunes au centre de la décision politique.
«Il s'agit, aujourd'hui, d'apprendre à mettre en place les mécanismes démocratiques, d'écoute, d'échanges, d'acceptation de l'autre et l'élaboration des pensées politiques.»
Pensez-vous réellement que les jeunes sont au sein des décisions politiques où ont-ils été écartés ?
Justement ! Jusqu'à présent, les jeunes ne sont pas au cœur-même des grandes décisions politiques. Ils sont marginalisés et mis à l'écart. Pourtant, respecter les objectifs de la Révolution que les jeunes ont déclenchée, devrait se refléter par le biais d'une participation effective de compétences juvéniles à la prise des décisions politiques, c'es-à-dire rajeunissement des partis, des associations, occupations des instances de management et de direction et de décision.
Comment traduisez-vous le nouveau paysage universitaire qui se dégrade de plus en plus, sans qu'il y ait de réel effort ou de décision gouvernementale radicale pour endiguer cette saga de violation de l'institution universitaire ?
La situation est, effectivement, inquiétante. D'abord, cela ne concerne pas uniquement l'université, c'est plus dangereux que ça. C'est toute la société tunisienne et le devenir de l'espace public en Tunisie. Ensuite, ce qui se passe traduit un problème beaucoup plus épineux qu'un problème de dialogue. Il s'agit d'un réel souci de prolifération et du développement de l'extrémisme en Tunisie. Il faudrait instaurer de nouveau cet esprit de la soumission de tous à la loi la plus suprême. Ce qui n'était pas le cas à la faculté de la Manouba, de Sousse et de Gabès. Les groupes salafistes sont en train d'instaurer leur loi qui n'émane de rien du tout et la société tunisienne doit se protéger contre tout danger extrémiste de gauche ou de droite. Il faut que tout le monde accepte le jeu démocratique et que l'on se réfère tous à la loi et rien qu'à la loi.
«Dans toute situation où il y a atteinte aux libertés, la première victime c'est la femme.»
En parlant de loi ; durant le début des années 80, vous étiez membre de la section sfaxienne de la Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme. Trouvez-vous que, malgré les agressions et les dérapages qui ont eu lieu ces derniers mois, la Tunisie post-révolutionnaire est respectueuse des libertés individuelles et du libre arbitre ?
Nul ne peut se proclamer homme ou femme politique s'il ne porte pas en son cœur la primordialité des droits de l'Homme et celui qui ne porte pas les droits humains au centre de son combat. Car pour un monde meilleur, un monde de dignité c'est celui qui sacralise les droits individuels, homme et femme. Néanmoins, il ne faut tout de même pas minimiser l'apport de la Révolution et le souffle libérateur. Nous vivions sous une dictature où l'atteinte aux droits de l'Homme (libertés publiques et individuelles) et à la dignité était la règle. Or, dans cette foulée d'inquiétude, d'interrogation et de cogitation, n'oublions pas que nous avons vécu une belle Révolution et justement, j'appelle à ne pas l'oublier afin que nous veillons à la sauvegarde du gain qu'on a récolté et de construire sur cela les institutions démocratiques permanentes. Maintenant, des dangers planent sur la société tunisienne et gravitent autour des droits humains et surtout des libertés individuelles. Dans toute situation où il y a atteinte des libertés, la première victime c'est la femme.
D'ailleurs, en parlant de la femme, vous étiez membre-fondateur de l'AFTURD (Association de recherches sur les femmes et le développement) et membre de l'Association tunisienne de lutte contre le cancer. Que pensez-vous de la situation de la femme tunisienne, aujourd'hui, ses droits, sa participation politique et associative ?
Dans la plupart du temps, cela sous l'ourlet ou sous le slogan qui se prétend de la religion, bien évidemment, la question de la femme, de l'organisation de la société est au devant de la scène. Il y a lieu de s'inquiéter et de se mobiliser pour une Tunisie moderne, modérée, ouverte et ancrée dans son Histoire. Les gains de la Révolution risquent d'être réellement atteints.
Face à un gouvernement qui ne prend pas réellement de décision radicale face aux dérapages outranciers dont l'identité nationale est souillée, comment interprétez-vous cela ? Une sorte de complicité ou versatilité ?
Il y a deux niveaux. D'abord, il faudra saluer la vivacité de la Société civile qui travaille énormément, homme, femme et intellectuels, partis politiques et citoyens de tous âges qui se mobilisent quotidiennement. Il faut saluer tous leurs efforts pour alerter et faire face à ces réelles atteintes des droits de l'Homme, violations qu'il ne faut pas minimiser. Je ne suis pas pour l'amplification, ni pour la minimisation. Il ne s'agit pas d'actes isolés mais un véritable phénomène de société qui menace l'unité nationale, l'identité tunisienne et les acquis de la Révolution et les acquis sociétaux de la Tunisie. Il s'agit donc de se mobiliser et de lancer un appel mutuel pour lutter côte à côte croyant ferme que la sauvegarde des libertés humaines et le seul garant de la démocratie. En face, il y a un silence inquiétant de la part du gouvernement. Cette manière de fermer les yeux sur certaines réalités concrètes et palpables, comme ce qui s'est passé à Bir Ali Ben Khelifa, La Manouba, Sousse et surtout l'affaire du drapeau national. Ce silence a favorisé le terrain pour la prolifération de ces comportements extrémistes, dangereux et étrangers à notre société et à nos traditions, à cette tolérance qui a toujours caractérisé les Tunisiens. Le gouvernement doit en assumer la responsabilité ! Le peuple a besoin d'être rassuré. Il faut que le gouvernement montre sa feuille de route pour faire face à ces fléaux sur le plan politique et sécuritaire. Il faut appeler les choses par leurs noms. La synthèse du silence gouvernement reste le retrait du drapeau national. C'est le résultat du silence des hauts responsables politiques. Le silence dans ce genre de situation n'équivaut qu'à la complicité. D'ailleurs, la preuve en est que les Tunisiens s'interrogent aujourd'hui sur le fait que la personne qui a retiré le drapeau national est toujours en liberté. A ce point nos forces de l'ordre sont incompétents ?...Au gouvernement de nous répondre ! L'inquiétude est de mise quant à sa feuille de route.
Quelle est la position du PDP quant à l'histoire du pseudo-complot dont serait ciblé le gouvernement actuel ? Plusieurs sons de cloches carillonnent de part et d'autre entre les membres du gouvernement.
Il est déplorable que des membres du gouvernement lancent des accusations aussi graves sans présenter la moindre preuve concrète ou fondée. Mais encore, les membres du gouvernement se contredisent. Quand l'un affirme, l'autre nie ! Encore plus inquiétant un même membre du gouvernement se contredit lui-même. Le gouvernement n'a-t-il pas relevé l'existence d'autres complots plus visibles ? Celui de s'attaquer à l'unité et à l'identité nationale à travers des actes dont l'expression ultime était la profanation de notre drapeau national !
«L'unification des partis du centre est pour très bientôt ! Ça permettra de rééquilibrer le paysage politique et de constituer un contrepoids. La minorité aura plus de chances !»
Vous qui étiez journaliste engagée au sein des journaux de l'opposition Erraï (L'Opinion), puis à Al Mawkif ; avec les dérapages, les agressions et les sanctions dont font l'objet les journalistes tunisiens, que pensez-vous du paysage médiatique actuel traité de profanateur de la liberté d'expression ?
J'ai effectivement commencé avec si Hassib Ben Ammar qui était une école de tolérance et de responsabilité des jeunes. Je le suis, d'ailleurs, reconnaissante. J'étais honoré de faire partie de cette famille des médias engagés de cette époque-là. Mais avant de parler des dérapages, je préférerais parler de la liberté d'expression. Il y a cette énergie jeune qui s'est affranchie ! C'est miraculeux que ces jeunes se libèrent aussi rapidement. Ça démontre que, malgré la dictature, la Tunisie regorge de compétences et de plumes. Qu'il y ait des dérapages est tout à fait normal. On est tous en train d'apprendre sur le tas. On tente de se frayer son chemin. Il faut juste gérer ces écarts tout en veillant à la qualité de l'information, du droit des citoyens à une information neutre, plurielle et transparente. Quant au problème qu'il y a entre le gouvernement et les médias, il est fondamental. Dès sa mise en place, les membres du gouvernement n'ont pas hésité à attaquer les médias, qui devraient plutôt refléter le résultat des élections ce qui est contraire au principe de l'indépendance des médias. Chaque fois que les journalistes assument leur responsabilité d'aller vers l'information, vers l'opinion et la position politique, qu'elle soit pour ou contre, ils sont ciblés et attaqués. Le summum de cela se traduit par la kyrielle des agressions physiques et l'incarcération des journalistes pour un oui ou un non. Nous demeurerons Société civile, partis politique et citoyens à booster et épauler les médias, car leur lutte est celle de la Révolution. Un de ces acquis qui garantit l'instauration de la démocratie. Une démocratie qu'on est en train de vivre pas à pas. On est en train d'avancer sur la bonne voie, au gouvernement de comprendre que c'est vraiment un chemin de non-retour !
«L'Opposition a arraché sa liberté d'expression pour faire en sorte que l'ANC ne soit pas une boite de résonance.»
Quel rôle devra jouer, aujourd'hui, l'Opposition, quelque part immature politiquement pour constituer un contrepoids à la majorité?
La démocratie est un processus à construire et à suivre. Dans cette avancée on instaure l'institution démocratique. Par ailleurs, votre remarque est très pertinente, nous sommes en train de nous initier à la démocratie. C'est un chantier à long terme, ça ne vient pas du jour au lendemain. Les Tunisiens attendent du gouvernement un agenda et une feuille de route claire et des propositions claires pour améliorer le quotidien tant sur le plan des libertés que celui de l'économie, pouvoir d'achat et emplois, etc. c'est pourquoi le moment de présentation du budget de l'Etat est très important. Le gouvernement proposera sa feuille de route et l'Opposition émettra son avis et réagira. Je tiens à dire que l'Opposition a joué et joue encore son rôle au sein de l'ANC, a arraché sa liberté d'expression pour faire en sorte que l'ANC ne soit pas une boite de résonance et de décor mais un réel espace d'échange, de débats démocratiques et de décisions. Parfois, nous nous sommes retirés pour montrer notre refus car souvent les mécanismes démocratiques étaient complètement marginalisés. Mais cela ne suffit pas pour construire une démocratie. Pour parler alternance et démocratie, il faut comme vous l'aviez dit, il faut qu'il y ait un équilibre des forces politiques.
Afin de rééquilibrer le paysage politique, depuis quelque temps on entendait parler d'une coalition entre votre parti, celui d'Afek Tounes et le Parti Républicain. C'est pour quand ? Avez-vous commencé à préparer votre stratégie électorale pour la prochaine campagne électorale ?
L'équilibre politique devra rassurer le citoyen avant tout, il sera plus rassuré quant à l'avenir de son pays. La pluralité et la concurrence politique est de ce qu'il y a de mieux pour les Tunisiens vu que chaque force politique fera en sorte de répondre aux attentes populaires. Quant à l'unification des partis du centre est pour très bientôt. Ça permettra de rééquilibrer le paysage politique et de constituer un contrepoids. La minorité aura plus de chances. Nous allons fonder un seul parti avec, entre autre Afek Toune, Parti Républicain, El Irada, Al Karama et des listes indépendantes à l'instar du Regard vigilant de Nabeul d'aspiration écologique et à vocation environnementale. Ça donnera une dynamique fédératrice qui travaillerait plus sur le terrain pour créer un vrai parti de masse.
Propos recueillis par Melek LAKDAR


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