• Le cumul des fonctions constitue une violation du principe de la séparation entre l'Etat et le parti, longtemps défendu par le CPR, selon les observateurs La scission en deux du Congrès pour la République (CPR) est désormais définitive et irréversible. Le conseil national de ce parti allié au mouvement islamiste Ennahdha ; qui s'est déroulé samedi et dimanche dernier à Tataouine a fermé la porte à toute initiative de réconciliation entre les deux tendances qui traversent le CPR depuis le 19 avril dernier, date du limogeage du secrétaire général du parti Abderraouf Ayadi par la majorité des membres du Bureau politique. Quelque 160 membres représentant 26 bureaux, dont quatre à l'étranger, ont été appelés, à cette occasion, à élire le successeur de Abderraouf Ayadi au poste de secrétaire général. Deux candidats se sont présentés à ce poste dont le titulaire est le véritable chef du CPR depuis la démission du président du parti, Moncef Marzouki, suite à son élection à la magistrature suprême. Il s'agit de Mohamed Abbou, l'actuel ministre délégué auprès du Premier ministre chargé de la réforme administrative, et Imed Daïmi, directeur du cabinet du président de la République. Au premier tour, Imed Daïmi et Mohamed Abbou se sont retrouvés ex-æquo. Sur un total de 69 bulletins, les deux hommes ont obtenu chacun 34 voix, un bulletin de vote ayant été invalidé. Suite à ce premier round, Imed Daïmi a renoncé au poste de secrétaire général pour se contenter du poste de -secrétaire adjoint. Mohamed Abbou est ainsi devenu le véritable numéro un du parti qui dispose de 29 élus à l'Assemblée nationale constituante. L'élection de cet avocat âgé de 46 ans qui a été incarcéré pour ses opinions sous le règne de Ben Ali à la tête du CPR a soulevé une levée de boucliers. D'autant plus que l'heureux élu est devenu à la fois ministre et secrétaire général d'un parti. Selon les observateurs, ce cumul de fonctions constitue une violation du principe de la séparation entre l'Etat et le parti longtemps défendu par le CPR. «Des nahdhaouis déguisés en CPRistes» Certains observateurs estiment également que le nombre de voix important récolté par Imed Daimi, qui est connu pour avoir été très proche d'Ennahdha, montre que la sensibilité islamiste est très influente au sein du CPR. Et c'est cette influence montante des « nahdhaouis déguisés en CPRistes » selon l'expression d'un militant de longue date du parti qui a été à l'origine de l'implosion du CPR. A l'issue d'une réunion des représentants des bureaux régionaux en Tunisie et à l'étranger tenue le 6 mai à Kairouan, la tendance réformiste du CPR menée par Abderraouf Ayadi avait claqué la porte du parti pour fonder une nouvelle formation. Les dissidents qui affirment vouloir préserver l'héritage politique et le passé militant du CPR accusent leurs camardes d'hier de rouler pour Ennahdha. Membre de l'Assemblée constituante élu sous les couleurs du CPR a accusé les membres du Bureau politique ayant limogé Abderraouf Ayadi d'avoir trahi les principes fondateurs et les valeurs du parti en contre partie des vétilles qui leur ont été accordées lors des négociations avec Ennahdha et Ettakatol sur la répartition des portefeuilles ministériels et autres postes. « Ces gens ont accepté d'être un parti au pouvoir sans pour autant obtenir des réels pouvoirs. Du coup, ils ne défendent plus les libertés comme en atteste leur mutisme lors des brutalités policières qui ont ciblé récemment des manifestants pacifiques ou encore leur orientation à cautionner le régime parlementaire», a-t-il déclaré, indiquant au passage que la ligne de fracture est aussi idéologique, en allusion à l'empressement des membres de la sensiblité islamiste à servir aveuglément les intérêts d'Ennahdha Selon les observateurs, le CPR était condamné à la division au regard des courants antagonistes qui le traversent. Fondé en 2001 par une poignée d'opposants notoires à Ben Ali, dont Moncef Marzouki et la journaliste Néziha Rejiba, le CPR est, en effet, composé d'une mosaïque de sensibilités politiques hétéroclites et disparates , allant de l'islamisme à la gauche laïque, en passant par le nationalisme arabe.