Le tout Tunis moderniste a répondu à l'appel de l'Association Mohamed Ali qui a convié à cette rencontre à Tunis bien de personnalités d'horizons idéologiques différents. L'occasion ? C'est la présentation d'une étude prospective intitulée : « Tunisie 2040 : contribution au renouvellement du projet moderniste tunisien. » qui est aussi le titre de l'ouvrage collectif signé de la plume d'éminents universitaires tunisiens à l'exemple d'Abdelkader Zghal, Abdelmajid Charfi, Mahmoud Ben Romdhane, Amor Belhédi, Tahar Ben Guiza et j'en passe…La gestation du travail en question a duré trois ans pour accoucher d'une étude scrutant de près la trajectoire tracée par la Tunisie moderne dans son ampleur la plus large, passant par l'économique, le social et le culturel.
Toujours est-il et avant d'y arriver faut-il poser les questions qu'il faut pour définir les concepts ? La Tunisie est-elle déjà un Etat moderne ? La réponse est affirmative et elle nous a été donnée par Tahar Ben Guiza qui nous explique que des termes du genre « menace islamiste contre la modernité », sont à bannir et qu'il faut réfléchir en termes de pensée traditionnaliste et moderne. Et comme on y est, qu'est-ce que la modernité ? Peut-on parler de la modernité en dehors des schémas français ? Peut-on y réfléchir en optant pour la tradition comme clé de la modernité ? Et c'est ce qu'Abdelkader Zghal le sociologue tunisien ayant chapeauté le débat, a relevé au début de la rencontre. Il a rappelé en effet d'un fait qu'il a vécu d'il y a quelques années, l'ayant interpellé « J'ai été et mon ami Mohamed Karrou à la Marsa. De jeunes filles voilées qui paradaient dans la rue n'avaient pas le profil des femmes voilées comme on l'entend. Cela m'a interpellé car je me suis posé la question sur l'efficacité des moyens d'analyse dont nous disposons pour étudier ce phénomène en dehors d'une vision occidentale. » L'introduction d'Abdelkader Zghal qui s'est traduite par un petit sourire sur la face de certaines personnes parmi l'assistance, est porteuse en fait de la problématique sur laquelle on devrait plancher et qui nous amènera à définir notre conception de la modernité en dehors des préjugés et des idées préconçues tels qu'on les a importés de l'Occident.
Religion et modernité
Pour Habib Guiza le président de l'Association Mohamed Ali et l'initiateur de cette étude, il n'y a pas de contradiction entre religion et modernité « Nous sommes les descendants d'Ibn Rochd. Nous sommes des séculaires et non pas des Laïcs. » dit-il. Abdelkader Zghal a, dans la foulée, expliqué que le terme séculaire laisse entendre une considération de la valeur citoyenne de tout un chacun de ses droits et devoirs, bien entendu.
Habib Guiza a, par ailleurs, passé en revue les différentes acceptions de la modernité à la lumière de l'Histoire. Pour le Secrétaire général de la CGTT (confédération générale tunisienne du Travail), il faut observer la genèse du projet moderniste tunisien à travers l'Histoire pour en récolter les enseignements et pour le relancer. Il a rappelé dans la foulée que ce projet a commencé depuis l'époque beylicale du temps d'Ahmed Bey lorsque Kheireddine Pacha entamait des réformes du collège Sadiki, etc. « La dynamique intérieure du projet moderniste tunisien revient à quatre éléments, à commencer par la volonté de l'Etat, en passant également, par la volonté de l'élite moderne ou traditionnaliste éclairée (khaldounienne, zeitouninienne, sadiki), le mouvement national des jeunes destouriens et ceux du Néo-Destour sans oublier les jeunes communistes. En insistant bien entendu sur la spécificité du projet moderniste tunisien où l'on réserve un premier rôle au mouvement syndical. Cela octroie un aspect social à ce projet moderniste qu'ont incarné des figures à l'exemple de Mohamed Ali Hammi et Tahar Haddad. » fait-il remarquer. Mona BEN GAMRA
Béji Caïed Essebssi, un rôle de premier plan BCE ne passe pas inaperçu, paraît-il. L'ex-premier ministre tunisien joue toujours un rôle de premier plan quand il s'agit de drainer la foule. Preuve en est, le bain de foule dont il a été l'objet avant-hier lors de cette rencontre autour du projet moderniste tunisien. L'assistance a accouru vers lui pour le saluer ou encore pour le combler de commentaires du genre. « Si Béji nous vous soutenons comme toujours. » Sans oublier la présence d'autres personnalités symbolisant la bataille progressiste en Tunisie, à l'exemple d'Emna Mnif, Ahmed Najib Chebbi, Hélé Béji, et des représentants du parti islamiste au pouvoir. Citons à titre indicatif Sahbi Atig le porte-parole du groupe parlementaire d'Ennahdha à l'ANC. M.B.G.