«En un temps record, la petite localité est passée d'un décor western-spaghetti à celui d'un très important pôle urbain. Grâce aux phosphates... ». C'est ce que les lecteurs peuvent lire à la Une d'un magazine hebdomadaire. Mais pas en Tunisie. Il ne s'agit pas du changement réalisé dans l'une des localités du bassin minier qui a longtemps milité pour un meilleur sort. C'est plutôt au Royaume du Maroc que le projet voit le jour et fit la Une de « Telquel » -dans son 549ème numéro-, et surtout la fierté de l'Office Chérifien des Phosphates (OCP) et des citoyens de la ville de Benguerir, deuxième centre de production de phosphate et « barycentre des activités », de l'Office. Une ville verte s'étalant sur 650 hectares est en train d'être réalisée dans cette zone. « La matrice de la nouvelle cité sera son campus universitaire, qui accueillera un lycée d'excellence, une université polytechnique et une école de management industriel. Autant d'antres du savoir qui travailleront en partenariat avec des institutions internationales prestigieuses comme l'école des mines de Paris, HEC Paris et le MIT (Massachusetts Institute of Technology) aux Etats-Unis...Un campus à l'américaine est le cerveau de la nouvelle ville », rapporte Telquel où l'on peut lire également, qu'à « la rentrée de 2014 tous les bâtiments seront prêts et accueilleront 12 000 personnes », étudiants, enseignants et chercheurs... En lisant cette enquête qui fait la Une de « Telquel », tout lecteur tunisien ne peut qu'être envieux et, surtout, rêver de voir le même projet se réaliser dans notre bassin minier. Mais malheureusement, aucun signe de développement n'a jusqu'à présent été constaté dans la zone qui ne cesse de revendiquer son droit au développement. A priori, la donne ne va pas changer et pour preuve, les dépenses consacrées au développement dans le budget de 2013 qui ont baissé de 17 %. Elles seront, selon les chiffres déclarés, de l'ordre de 5500 MD l'année prochaine contre 6400 en 2012. Indicateurs Dès lors, la région de Gafsa, plus particulièrement, le bassin minier ne jouira pas d'un meilleur sort en 2013. Les indicateurs de ce gouvernorat qui ont toujours été au dessous de la moyenne nationale, ne seront pas améliorés. Il est clair en fait, que les commodités de la vie dans la zone seront condamnées à être au dessous de la moyenne nationale comme elles l'ont toujours été. Ce constat confirmé par le ministère du Développement Régional et de la Planification prouve que toutes les délégations de la ville de Gafsa possèdent des niveaux inférieurs au niveau national avec une plus grande vulnérabilité de Belkhir, Gafsa Nord, Sidi Aïch, Oum Laraies, Redeyef, El Guetar et Sned. L'environnement social n'est pas meilleur. En fait, la pauvreté sévit dans presque toutes les délégations à l'exception de Gafsa Sud, El Ksar et Métlaoui. Les huit autres délégations dont M'dhila, Rédeyef, Om Larayes, Sned et Blekhir...restent au dessous de la moyenne nationale. C'est ce qui explique entre autres, la colère incessante des citoyens vivant dans cette zone, d'autant plus que la zone regorge d'une richesse minière sans équivalent dans toute la région, en plus de la plus grande société à l'échelle nationale à savoir, la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG). En contrepartie, le gouvernement provisoire et même la CPG n'accordent pas beaucoup d'attention aux revendications sociales en dépit des émeutes des citoyens et ce, contrairement au Royaume de Maroc qui a opté pour des solutions efficaces et des projets grandioses à l'instar de celui de Benguerir. ... « Depuis les émeutes de Khouribgua en 2011, l'Etat a délégué à l'OCP le rôle de calmant social... ». Au bassin minier, fief de la Révolution tunisienne, la CPG n'adopte pas la même démarche. « Le phosphate est vital, et on veut éviter la contestation sociale inhérente à l'absence d'emploi. C'est ce qui a poussé entre autres, l'Etat à bouger dans la région », commente une activiste marocaine. Malheureusement pour nos compatriotes, le gouvernement provisoire et les responsables au CPG n'ont pas retenu les leçons auprès de nos voisins qui se montrent beaucoup plus avertis pour absorber la colère des citoyens et, surtout, promouvoir la vie même en plein désert. La Tunisie aura-t-elle un projet pareil ? Réussira-t-elle à réconcilier le Tunisien avec son milieu, son espace ? Tout dépendra de la volonté politique des décideurs qui doivent laisser de côté leurs intérêts étriqués et réaliser que le phosphate ce n'est pas des spaghettis.