D'aucuns diraient pourquoi l'opposition en Tunisie est si disparate et par conséquent incapable de se définir clairement dans le paysage politique pour adopter une stratégie à même de lui permettre de se poser en véritable alternative au pouvoir en place ? Pourquoi il y a tant d'oppositions alors que dans le fond et pour ce qui est des objectifs il n'y a que des nuances et point de véritables différences ? Aujourd'hui et après leur échecs électoral les partis en dehors du pouvoir donnent l'impression de ne pas avoir retenu les leçons des raisons ayant entraîné leur échec. En dépit des efforts d'autocritique, ces mêmes partis tiennent le même langage et ressassent le même discours d'avant scrutin. Plusieurs tentatives d'alliance ou de coopération en prévision des prochaines échéances électorales ou elles piétinent ou elles ont tout simplement échoué. Il y a certes eu la naissance du Front populaire, mais les courants politiques qui le composent sont loin de pouvoir constituer un véritable contrepoids au trio qui domine l'A.N.C et qui gouverne actuellement le pays. Ce front de gauche de par un certain dogmatisme idéologique ne pourra en aucun cas réussir la percée escomptée dans l'opinion pour se présenter en tant que véritable alternative à l'actuel pouvoir. Ce dogmatisme lui fait beaucoup de tort l'éloignant des franges populaires susceptibles de lui garantir cette large base dont il a besoin pour pouvoir se présenter aux élections avec des arguments solides à même de lui assurer le succès électoral. Dans le camp adverse on est conscient de cette faiblesse et c'est sans doute la raison pour laquelle ou cherche rarement à s'y intéresser sachant que le véritable combat à mener est ailleurs et plus exactement contre les courants centristes où le parti de Nida Tounes émerge. Ce mouvement ratisse large au sein de la classe moyenne et même parmi celle des riches, mais aussi parmi la classe laborieuse. Toutefois à lui seul ce mouvement né il y a six ou sept mois ne pourra inverser radicalement la tendance. Il pourra se tailler une bonne place sur l'échiquier politique, mais de là à constituer une véritable alternative, beaucoup de chemin reste à faire. Et ce chemin il ne pourra nullement le faire en solo. Nida Tounes a besoin pour ce faire de rallier les différents partis de la mouvance centriste. Mais force est d'admettre que cette opération est loin d'être aisée. Les raisons sont de deux ordres : la première a trait à des détails qui sont au fait insignifiants mais, quand l'idéologique s'y mêle les choses se compliquent et les négociations en pâtissent. C'est le cas avec Al Massar où des personnalités historiques issues du mouvement Attajdid héritier du parti communiste ne voient pas d'un bon œil, une alliance avec Nida Tounes où figurent en bonne place des destouriens. Le poids de l'histoire ici pèse lourdement pour rendre le rapprochement très difficile même si des leaders jeunes pragmatiques et ayant un sens aigu de la responsabilité plaident et œuvrent pour une telle alliance. C'est le cas de Samir Bettaïeb qui n'a de cesse de pousser vers un accord dans ce sens. Réussira, réussira pas ? C'est là toute la question à laquelle il est difficile de répondre. Pour ce qui est de l'autre parti sollicité pour faire partie de cette alliance, en l'occurrence Al Joumhouri, ce dernier connait les mêmes tiraillements vécus par Al Massar avec une petite différence qui a pour nom Néjib Chebbi. Ce dernier, figure emblématique de ce parti, ne s'est jamais départi de son égo, pour s'inscrire dans une logique pragmatique et réaliste et d'afficher clairement ses choix qui demeurent en dépit de ses professions de foi empreintes de beaucoup de flou. Un flous qui ne sert nullement son parti d'autant qu'au sein-même de ce parti il y a des divergences, même si elles sont tues et ignorées en partie par l'opinion publique. Et l'on se demande d'ailleurs où est passée Maya Jribi ? N'est-ce pas elle qui représente le tandem de l'exécutif avec Yassine Ibrahim d'Al Joumhouri ? La question mérite d'être posée parce que dans les faits on ne voit que Néjib Chebbi partout, épisodiquement Yassine Ibrahim. Bien des personnalités penchent pour un accord pour une large union regroupant outre Al Massar, Nida Tounes et pourquoi pas d'autres partis. Mais le problème est de parvenir au consensus sans lequel les risques de divisions menacent de faire tout éclater et de voir chaque entité se replier sur elle-même pour finir par être complètement marginalisée. Voilà où en est l'opposition aujourd'hui, à moins qu'elle ne se ressaisisse pour voir la situation telle qu'elle se présente.