Le président provisoire de la République tunisienne, Moncef Marzouki, a appelé les différents partis politiques à un dialogue national qui puisse générer un consensus permettant de conduire la deuxième hase de transition démocratique à bon port. L'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) avait déjà pris pareille initiative et organisé un premier round de dialogue national les 16 et 17 octobre dernier. La direction de l'UGTT avait même annoncé une reprise de son initiative pour la fin du mois de janvier. Les deux initiatives se concurrencent-elles ? Sont-elles les bienvenues ? Saïd Aydi, membre dirigeant au Parti Républicain, affirme dans une déclaration au Temps, que « toute initiative qui peut permettre de sortir de la crise est bonne. La présidence de la République de part sa position dans les institutions de l'Etat a pris une initiative qui peut aider à sortir de l'impasse. On ne peut que l'accueillir favorablement, sans l'opposer à celle de l'UGTT ». Lazhar Akrmi, porte-parole de Nida Tounès, affirme au Temps que l'initiative du président « est positive. C'est ce que nous avons appelé depuis le 26 janvier 2012. Nous avions dit que la Tunisie a besoin de dialogue. Le dialogue n'est pas un objectif en soi, c'est la porte d'entrée pour le consensus national nécessaire à la gestion de la deuxième période de transition. La légitimité électorale ne suffit pas pour gérer un pays dont l'économie et la situation sécuritaire sont dans en mauvaise position. La situation sociale est explosive. Le dialogue permet de dégager un consensus. L'appel du président est positif. Il faut qu'il soit suivi d'action et d'exécution. Nous sommes avec toute initiative de dialogue. C'est le seul antibiotique aux maux du pays ». D'autres voix sont plutôt favorables à l'initiative de l'UGTT à réactiver. Ainsi Ettakatol avait pris note de l'initiative du président en faveur de l'organisation d'un dialogue national. Comme l'a affirmé, Mohamed Bennour, porte-parole d'Ettakatol à l'agence TAP, « l'initiative de dialogue lancée par l'UGTT est encore maintenue ». L'initiative de l'organisation syndicale « n'a pas échoué », dit-il précisant qu'après un premier round de dialogue, les concertations se poursuivent en vue d'un second round « devenu aujourd'hui nécessaire pour parvenir à un consensus autour des exigences de la phase transitoire et en fixer un échéancier. Il a estimé qu'il est indispensable d'instaurer dans les plus brefs délais, les instances indépendantes de la magistrature, de l'information et des élections pour transmettre un message positif à l'opinion publique. Dans une déclaration au Temps, il a affirmé, que son parti a entrepris des contacts avec l'UGTT. N'oublions pas que Mustapha Ben Jaâfar, secrétaire général d'Ettakatol, faisait partie de la Commission administrative de l'UGTT qui avait résisté en 1978 à la mise en place d'une direction illégitime à la tête de l'UGTT. Son parti a une tradition syndicale bien enraciné. Trois de ses dirigeants sont des anciens syndicalistes : Mustapha Ben Jâafar, Mohamed Ezzaouia et Mohamed Bennour. D'autres forces privilégient l'initiative de l'UGTT à celle du président Marzouki. Jilani Hammami, porte-parole du parti des Travailleurs, avait bien déclaré sur les colonnes du Temps qu'il préfère l'initiative prise par l'UGTT à celle du président de la République. Il considère que l'UGTT avec son prestige, son rôle national et le fait qu'elle garde la même distance vis-à-vis de tous les partis politiques, est la plus habilitée pour réussir ce dialogue national. « L'UGTT peut servir de rassembleur potentiel en position de réunir toutes les parties, Gouvernement et partis politiques antagonistes, autour d'une même table, pour dialoguer et trouver un terrain d'entente sur le calendrier politique et les autre questions en suspens pour assainir le climat politique et mener à son terme la transition »,dit-il. Abdejlil Bédoui, ancien conseiller économique de l'UGTT et actuellement Vice-président d'Al-Massar, déclare, à titre personnel, au Temps que « les hommes au pouvoir veulent contrôler l'initiative de dialogue. Il n'y a pas de garantie que cette initiative puisse déboucher sur quelque chose de positif, vus les problèmes que connaissent les composantes de la Troïka. Leurs conflits internes ne permettent pas de conduire un véritable dialogue national. Je ne vois pas comment trouver un consensus alors la composante principale de la Troïka, à savoir Ennahdha, dit qu'il n'est pas question de renoncer aux ministères de souveraineté. Des positions aussi rigides ne conduisent pas à un vrai dialogue. Une concertation sérieuse doit être ouverte et sans restriction. Moncef Marzouki a peur d'être oublié par l'opinion publique, il veut se mettre sur scène. Ses partenaires ne le laisseront pas bénéficier des dividendes de sa démarche. Le seul cadre pour conduire une telle initiative est l'UGTT. Elle est neutre, tout en impliquant les composantes de la société civile. Le dialogue national doit dépasser les partis politiques et inclure la société civile comme l'UGTT, l'UTICA...La classe politique est très hétérogène. Ses rapports internes sont très tendus. La confiance fait défaut. Je n'attends rien de l'initiative de Marzouki. Le même esprit sectaire de domination et partisan ne permet pas de hisser l'initiative du président au niveau des défis nationaux ».