La campagne pour la présidence des LR s'achève avec deux candidats qui revendiquent la très grande proximité entre leur projet et celui du Rassemblement national (sauf sur l'économie, et encore). Laurent Wauquiez veut rassembler un horizon allant de de Sarah Knafo, - c'est-à-dire Eric Zemmour - à la droite traditionnelle, Bruno Retailleau lui reprend toutes les propositions du Rassemblement national, notamment l'idée d'un referendum sur l'immigration en passant par l'article 11 de la Constitution. Il est loin le temps de Jacques Chirac… De mon côté, je sors – pure coïncidence - un rapport réalisé pour Terra Nova intitulé «Les travailleurs immigrés. Avec ou sans eux?». Le résultat d'un referendum sur l'immigration si la question était «voulez-vous que l'immigration continue en France?» serait évident: un non massif, même si 10 % seulement des Français font de l'immigration leur première préoccupation. Mais, quel serait-il si la question était formulée légèrement différemment: «souhaitez-vous renvoyer 17 % des médecins spécialistes exerçant en France et de 21 % des chirurgiens?» Autre formulation possible: «voulez-vous que toute la France devienne un immense désert médical» «Voulez-vous payer beaucoup plus cher votre steak-frites et prendre le risque de ne pas en avoir du tout?» (22 % des cuisiniers en France sont immigré, un chiffre qui monte à 55 % en Île-de-France) «Souhaitez-vous ne plus avoir accès aux services informatiques de votre entreprise et voir s'arrêter la digitalisation de l'économie française (14 % des ingénieurs informaticiens sont immigrés) «Voulez-vous que le bâtiment s'arrête?» (entre 15 et 50 % des salariés du bâtiment sont immigrés, 60 % pour certains métiers) Voulez-vous laisser seule sans soins votre grand-mère? Et, pour les catholiques, que pensez-vous d'une messe sans prêtre (24 % des curés sont immigrés et probablement plus de 50 % chez les moins de 50 ans). Immigrationnisme? Menace sur l'identité nationale? Négation des questions inhérentes posées par l'immigration? Non pas du tout. Juste un retour au réel. Un retour du réel aussi car à trop l'oublier, on met en œuvre des politiques absurdes. Comme celle qui consiste comme c'est le cas en France à considérer que puisque l'on a dit depuis quarante ans que l'on bloquait l'immigration, il n'y avait pas d'immigré. Et donc pas de politique d'intégration à mettre en œuvre. Résultat: on laisse se créer des quartiers avec une très forte concentration d'immigrés qui bloquent à coup sûr tout espoir d'intégration, on sous-investit dans l'éducation, on oublie d'installer des commissariats de police en Seine-Saint-Denis où il y a trois fois plus d'immigrés qu'ailleurs (et beaucoup plus de crimes et délits) et on essaye d'élargir autant que possible l'interdiction des signes d'appartenance religieuse au mépris de la liberté religieuse. Comme si on avait abandonné l'idée que les immigrés existaient et que l'urgence était seulement de ne pas les voir. L'immigration est là en France. Elle va durer. Parce que la société française a besoin d'un apport de travail extérieur. Parce qu'aussi, après la seconde guerre mondiale, l'Europe et la France se sont données des règles et des valeurs destinées à ne pas fermer la porte à ceux qui étaient persécutés. L'immigration ne cause-t-elle pas de problème? Si bien sûr. Alors trouvons des solutions plutôt que des boucs émissaires. La France s'en portera mieux. La République aussi. Hakim El Karoui L'opinion – Mardi 13 mai 2025