Le Centre Islam et Démocratie (CSID) vient d'organiser un débat édifiant sur les incitations à mettre en place afin que les illettrés puissent participer et voter convenablement lors des prochains scrutins et ne soient pas privés de faire entendre leur voix. Avec un taux d'analphabétisme estimé à 27% en 2004 et ramené à 18.1% en 2012, selon les données de l'Institut National de la Statistique (INS), la population d'illettrés de par son poids influent sur les résultats du scrutin ne laisse pas indifférents les partis politiques et différents candidats. Ils représentent le quart du corps électoral. Les participants au débat ont mis en exergue le peu d'engouement et d'empressement des analphabètes à aller voter. D'ailleurs les analphabètes ne sont pas faciles à convaincre des bienfaits de suivre les cours dispensés aux adultes. D‘ailleurs lors des élections du 23 octobre 2011, leur vote a été jugé par beaucoup d'observateurs, comme fantaisiste. Le désintérêt manifesté par nombreux analphabètes est le résultat de la succession de plusieurs évènements survenus dans le pays. Les partis n'ont pas manifesté un grand intérêt pour cette catégorie de la population tunisienne. Il faut rappeler que lors des dernières élections le bulletin de vote n'était pas facile à déchiffrer. On avait du mal à faire la différence entre les dizaines de listes de candidats. Certains candidats ont pu se retrouver membre de l'Assemblée Nationale Constituante (ANC), rien que par la grâce du hasard qui leur a permis de se trouver à côté d'une liste d'un grand parti. D'ailleurs, même les électeurs non illettrés ont eu du mal à déchiffrer le bulletin de vote. Que dire des illettrés. Certains courants religieux extrémistes considèrent que le vote est une opération illicite. Ils émettent des « Fatwa » dans ce sens et répandent l'idée qu'élire est « haram ». Nombreux illettrés sont influencés par ces prédicateurs et finissent par bouder les élections. Une autre explication est donnée au désintérêt des analphabètes aux élections. Elle concerne l'absence de volonté politique pour lutter contre l'analphabétisme, chez les gouvernements qui ont succédé au pouvoir après les dernières élections. Certains médias négativistes ont donné une mauvaise image sur la Révolution. La confiance en la classe politique s'est sérieusement amoindrie durant les trois dernières années. Il se trouve aussi que les illettrés sont dans leur écrasante majorité des citoyens mal nantis, habitant des quartiers et des zones défavorisés. Or, ces milieux n'ont pratiquement pas connu une amélioration de leur niveau de vie, chose qui ne les motive guère à faire confiance aux hommes politiques, tous courants confondus. D'ailleurs certains mauvais perdants lors des dernières élections incitent les illettrés à ne pas aller voter. Que faire pour amener les analphabètes à se diriger vers les bureaux de vote le jour du scrutin, sans chercher à les instrumentaliser ? Des opérations de vote blanc peuvent être organisées par la Direction centrale de l'enseignement pour adulte relevant du ministère des Affaires sociales. Des associations de la société civile peuvent effectuer ce travail civique de formation et veiller à l'encadrement de cette catégorie spécifique de la population tunisienne. Une technique moderne informatique peut être proposée à l'illettré. Des premières cellules peuvent être formées, en faisant participer les illettrés à des rencontres et séminaires de sensibilisation à l'importance des élections. Des campagnes de sensibilisation peuvent être organisées dans les zones défavorisées. Les enseignants encadrant cette population dans les cours d'alphabétisation, peuvent être formés aux techniques de sensibilisation pour qu'ils les utilisent avec leurs élèves adultes et finissent par les convaincre d'aller voter. L'enseignant a une autorité morale sur son élève, qu'il peut exploiter à bon escient. Une vidéo de sensibilisation des analphabètes peut être réalisée et diffusée sur les chaînes de télévision. Durant les vacances scolaires, les enseignants peuvent continuer à rester en contact avec leurs élèves adultes. Ils iront vers eux et les inviteront à participer aux cercles de sensibilisation. Des rencontres entre enseignants et élèves peuvent être organisées. Ils se déplaceront en groupe aux bureaux d'inscription pour s'inscrire sur les listes électorales. L'information peut être diffusée dans les espaces où il y a des rassemblements et des regroupements populaires comme les souks hebdomadaires. Les radios nationales, régionales et locales peuvent participer à ces campagnes de sensibilisation...