Hier, au terme de la date fatidique de clôture des dépôts de candidatures à l'élection présidentielle, une dernière fournée s'est empressée de se rendre au siège de l'Instance Supérieure In dépendante des Elections (ISIE) aux Berges du Lac à Tunis, pour déposer ses dossiers. Ainsi, les Tunisiens auront au premier tour prévu le 23 novembre prochain à choisir en leur âme et conscience leur futur président à partir d'une longue liste. En attendant le tamis de l'ISIE, plus de quarante candidatures ont été présentées. Matinal, Mohamed Frikha, homme d'affaires, ancien patron de Syfax Airlines et tête de liste d'Ennahdha dans la circonscription de Sfax 2 pour les législatives, a été le premier à pointer en déposant son dossier. Il s'affiche en indépendant bien qu'engagé avec Ennahdha dans les joutes électorales à Sfax. Sahbi Atig président du groupe parlementaire d'Ennahdha à l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) n'avait pas manqué d'affirmer que Frikha était libre de présenter sa candidature. La loi ne le lui interdit pas. Toutefois, il l'avise de ne pas le faire, du moment qu'il est déjà candidat d'Ennahdha aux législatives. Du moins, il n'a pas à profiter de sa qualité de tête de liste d'Ennahdha pour sa candidature à la présidentielle. Son parti ayant pris la décision de ne présenter aucun candidat à cette joute et tenant mordicus à un candidat consensuel en dehors d'Ennahdha, devra expliciter sa position concernant la candidature de Mohamed Frikha. Au dernier conseil de la Choura, il a été décidé de reporter le choix de la candidature à soutenir après le déroulement des élections législatives. Pour beaucoup d'observateurs Mohamed Frikha qui avait accompagné Rached Ghannouchi lors de sa visite en Chine, n'a pas été discipliné en ne se pliant pas aux « ordres » de son parti. Ennahdha sachant que le vrai pouvoir se trouve à la Kasbah et n'ayant pas de candidat dans ses rangs capable de remporter le scrutin présidentiel, veut se concentrer sur les législatives et appuyer à la présidentielle quelqu'un en dehors de son camp pour apparaître aux yeux de l'opinion publique nationale et surtout internationale, qu'elle n'a nullement l'intention de s'emparer de tous les pouvoirs après les prochaines élections. L'initiative de son « protégé » à Sfax, Mohamed Frikha n'est pas en cohérence avec ces calculs tactiques. De son côté Mondher Zenaïdi, ex-ministre sous l'ancien régime, ayant occupé plusieurs portefeuilles dont le Transport et la Santé, à peine rentré de son exil en France a déposé, hier, son dossier de candidature à la présidentielle auprès de l'ISIE après avoir collecté 50 mille parrainages. Fort de l'estime dont il bénéficie au delà de la famille destourienne pour sa disponibilité et proximité des citoyens, il a présenté sa candidature en tant qu'indépendant. Il a déclaré que les Tunisiens doivent regarder l'avenir parce que le pays a besoin de la solidarité de tous les Tunisiens. « Si tout le monde met la main dans la main, nous réaliserons les meilleurs résultats. Le pays aura tous les atouts pour réaliser les aspirations des Tunisiens en la démocratie, la prospérité et le confort », dit-il. Sa candidature, il l'a présentée animé du même état d'esprit et de la volonté avec laquelle, il a exercé tout au long de sa carrière y compris les 3 ans passés à l'étranger où il n'a cessé d'orienter les investisseurs et les touristes vers le pays. Il a exprimé son respect à tous les candidats et a rappelé « son bonheur dans la proximité avec les citoyens et leurs soucis ». Il veut se projeter comme modérateur et rassembleur, en laissant de côté les couleurs. Il appelle l'élite politique du pays à être solidaire pour pouvoir réaliser les aspirations du peuple. Me Abderrazk Kilani, l'ancien bâtonnier des avocats tunisiens et ex-ministre, sous la Troïka a déposé sa candidature à la présidentielle après avoir récolté le parrainage de 11 membres de la Constituante dont six députés d'Ennahdha. Il considère qu'il regroupe les critères requis pour être un président consensuel. Il a affirmé qu'il se présente en tant que candidat indépendant, pour faire contrepoids au prochain gouvernement qui sera, par définition, partisan. Il estime que les indépendants ont tous les droits de participer à la gestion des affaires du pays et qu'il présente sa candidature pour faire face au retour des symboles de l'ancien régime. « Il faut que le prochain président unisse les enfants du peuple et achève la réalisation des objectifs de la Révolution », dit-il. Abdelwaheb El Heni, président du parti Al-Majed et Moëz Boussayene, président du Comité olympique tunisien ont également présenté leur candidature. Bahri Jelassi célèbre pour ses déclarations polémiques a lui aussi déposé sa candidature ayant récolté 25 660 signatures de citoyens. Ce président du parti de l'Ouverture et de la Fidélité avait déjà annoncé son intention de se présenter à la magistrature suprême. Bahri Jelassi a déclaré qu'il a déposé sa candidature en vue de palier les dégâts qu'ont fait la révolution et les deux gouvernements de la Troïka. Et d'ajouter qu'il appelle les Tunisiens à s'unir et voter pour un président qui sera le sauveur du pays. D'autres candidatures de personnalités peu connues ont été présentées hier, comme celle de l'expert comptable Lotfi Ben Zekri, ou celle de Néjib Belghith, président du parti Tunisie Libre qui considère que les conditions de présentation de candidature à la présidentielle sont iniques puisqu'elles s'opposent au droit des citoyens d'être candidats. Mounir Mejri a déposé sa candidature en tant qu'indépendant pour dire que « la candidature aux élections n'est pas l'apanage des riches ou des hommes d'affaires ». Mounir Mejri, citoyen d'Ezzahra, a présenté sa candidature, bien qu'il n'ait pas réuni le nombre de parrainages nécessaires. Sofiène Ben Naceur, homme d'affaires a présenté sa candidature en tant qu'indépendant. Mohamed Mejdoub, pilote de métier, a présenté sa candidature comme un indépendant considérant que le parrainage des députés ou des électeurs et la caution bancaire de 10 mille dinars sont contraires au droit des citoyens d'être candidats. Abdallah Saïd, ingénieur indépendant a présenté sa candidature tout en sachant qu'il ne remplit pas les conditions requises. Omrane Ben Hassine, sans attendre d'atteindre l'âge requis, a tout de même présenté sa candidature après avoir obtenu les dix mille parrainages nécessaires. A l'exception de quelques candidatures sérieuses, comme celle de Mohamed Frikha, Mondher Znaïdi, Abderrazak Kilani ou Abdelwaheb El Heni, trop d'initiatives peuvent être taxées de superflues. L'image de la présidence de la République a pris un sacré coup ces dernières années.