L'un des phénomènes marquants chez les enfants et les jeunes en Tunisie, est de refuser d'achever leurs études et les interrompre à un stade précoce sans penser aux conséquences, souvent néfastes, que cela puisse avoir sur leur avenir. A qui incombe la responsabilité de ce fait ? Quelles sont les principales causes derrière cela ? Et peut-on y remédier ? Avant même de chercher à répondre à ces questions, commençons par les concernés, les jeunes ayant abandonné leurs études très tôt et pensé à se trouver un boulot d'ici et de là pour gagner de l'argent, ce qui représente, à un certain âge, l'unique et l'ultime ambition qui hante leurs esprits. Un jeune qui vit la situation Mourad, 17 ans, un jeune garçon qui a arrêté d'aller au collège à l'âge de 14 ans après avoir refait deux fois sa huitième année, affirme avoir perdu le goût de suivre ses études après des échecs successifs. Il explique qu'au moment où il avait décidé de ne plus aller au collège, aucun de ses parents n'a réagi contre sa décision, comme si c'était une charge en moins du point de vue financier, à condition qu'il aille chercher de quoi gagner sa vie d'une manière autonome. Mourad nous cite les différentes tâches qu'il a effectuées, il a entre autres fait de la maçonnerie chez les voisins à dix dinars la journée, et quelquefois, comme plongeur dans des restaurants. Il assure que jusque là, il ne regrette pas de ne pas avoir achevé ses études car, d'après lui, il aurait perdu du temps pour enfin se retrouver au chômage. Qu'en pensent les éducateurs ? Mme. Dehria Kalthoum, enseignante dans une école primaire, indique que le phénomène de l'interruption des études chez les enfants et les jeunes est en train de s'accroître considérablement, et que cela rend les enseignants inquiets et les poussent à contribuer à la résolution de ce problème en urgence. D'une autre part, Mme Kalthoum trouve bizarre qu'à l'époque de l'avènement des nouvelles technologies, les enfants se déconnectent du savoir et de leurs études. Elle explique que les causes pourraient être rapportées à l'école même, qui ne dispose pas de moyens pédagogiques pour intéresser l'enfant. Ce dernier peut aussi rencontrer des problèmes en classe ou dans son entourage à l'école, qu'il n'avoue pas mais qui, en même temps, constituent un facteur de démotivation. Elle a entre autres affirmé que les parents et les enseignants sont les principaux acteurs dans la vie de l'enfant et doivent être complémentaires et assumer réciproquement la responsabilité de l'encadrement. Les résultats que ce phénomène puisse avoir ultérieurement sont à prendre en considération surtout que cet individu, sans diplômes ni niveau intellectuel ne serait-ce qu'élémentaire, sera un fardeau, pour sa famille et la société. Selon elle, la solution adéquate est de penser à la présence permanente d'un conseiller en sociologie et d'un psychologue à l'école afin de traiter de près les symptômes de ce phénomène. Avis d'un sociologue La sociologie possède, certes, un angle de vue plus ciblé sur notre propos, ce qui nous a amenés à prendre l'avis de Mme. Boukraa Hajer, une sociologue. Celle-ci a également confirmé que l'interruption des études chez les enfants et les jeunes est un fait de plus en plus répandu dans la société. Les causes principales sont, d'après son analyse, d'ordre sociologique et économique à la fois. Elle a en effet expliqué que certaines familles à un niveau de vie précaire, se trouvent incapables d'assurer les charges scolaires et poussent elles-mêmes leurs enfants à arrêter les études pour aller travailler et renforcer les revenus de la famille. C'est là où surgit le facteur économique qui ne manque pas d'importance. Selon la sociologue, ce phénomène se manifeste particulièrement chez la classe sociale touchée par des problèmes économiques que ce soit dans les zones de l'intérieur ou dans la capitale même. De plus, elle voit que certaines gens parmi les propriétaires d'ateliers, les agriculteurs et autres, participent à l'accroissement de ce phénomène en employant les enfants même en tant que saisonniers, et cela risque de les encourager davantage à délaisser leurs études, voire les interrompre, une fois qu'ils gagnent de l'argent et réalisent une certaine autonomie financière. D'une autre part, Mme. Hajer a insisté sur le fait que les maisons de culture et de jeunes fournissent de moins en moins d'activités culturelles et éducatives qui pourraient jouer un rôle crucial dans l'encadrement, le développement des compétences et des acquis de l'enfant ainsi que de stabiliser sa psychologie et lui permettre de s'exprimer et d'interagir avec son entourage. Quant aux conséquences de ce problème sur la société, la sociologue les trouve choquants puisque, l'enfant, futur citoyen, constituera un danger pour l'ensemble de la société. Plus loin encore, elle trouve que ce phénomène touche la société dans ses aspects les plus sensibles, le savoir et la civilisation, et mène à l'ignorance, d' éradiquer. Elle finit par dire que les solutions ne peuvent être envisagées que dans un bon encadrement familial, et que le traitement efficace serait d'ordre psycho-social. A partir de ces témoignages et analyses, on ne peut qu'être sûr qu'il s'agit d'un phénomène accru, étroitement lié à des raisons sociales, psychologiques et économiques en même temps. Cependant, il ne suffit pas de révéler les sources du problème, il convient mieux d'y remédier efficacement par les moyens appropriés. L'Etat est appelé à réagir face à cela en déterminant les approches nécessaires pour l'encadrement de l'enfant afin qu'il n'arrive en aucun cas à penser à arrêter ses études, ce qui nous fera éviter tant d'autres dégâts... et de déchets scolaires.