Alors que les recours électoraux ont été pour la plupart rejetés en première instance par le tribunal administratif (44 pour vice de forme, 32 sur le fond, et un recours reçu) c'est au tour des chambres d'appel du tribunal de se prononcer quarante huit heures après l'enregistrement de tous les recours. Pour le moment et jusqu'à lundi soir, il n'y a eu que deux recours en appel: l'un présenté par l'ISIE et l'autre par l'avocat d'un parti en course pour les législatives. Un point de presse a été organisé hier par le bureau de Tunis du centre international contre la corruption (Global Infrastructure Anti-corruption Centre GIACC) sur l'argent politique et son influence sur la bonne marche du processus électoral. Kamel Ayadi expert international en matière de lutte contre la corruption et membre du centre a démontré l'influence des recours électoraux sur la bonne marche du processus électoral, surtout à cause de la mauvaise utilisation de l'argent politique. Campagne électorale et moyens frauduleux L'argent politique donné à tort et à travers a engendré des manœuvres frauduleuses durant la campagne électorale qui ont altéré la transparence et la sincérité des élections législatives. De l'argent d'une municipalité donné à une association, un chèque bancaire, ou 22 moutons donnés par des partis en vue d'acheter des voix, tel que l'a affirmé Moez Bouraoui de l'association ATIDE : autant de moyens de corruption qui faussent le jeu démocratique et contreviennent au principe de loyauté , requis par le nouveau code électoral. Et d'ajouter que des rapports ont été présentés à l'ISIE sans qu'une suite n'ait été donnée jusqu'à présent. Kamel Ayadi a mis en exergue le phénomène de courtage à l'aide de certains intermédiaires qui se proposent à certains candidats indépendants ou appartenant à des partis, moyennant finance, et ce, pour mener à bien l'opération électorale, allant de l'animation de la campagne électorale jusqu'à l'incitation des électeurs au vote en leur faveur. Si bien que l'opération électorale devient une affaire commerciale, ajouta-t-il. On parle même de « main d'œuvre électorale » à laquelle certains font appel à chaque occasion afin de réunir toutes les chances de réussite. L'interférence entre l'argent et la politique devenue de plus en plus remarquable, est la cause essentielle de toutes les malversations qui ont lieu au cours de chaque opération électorale. D'ailleurs certains candidats se basent sur leur influence du point de vue financier, à l'instar des hommes d'affaires, plus que sur leurs programmes politiques. C'est la raison pour laquelle il y a des candidats qui pendant leur campagne n'ont présenté aucun programme précis à part évoquer leur capacité d'investir pour soi disant œuvrer à la résorption du chômage. Il précisa de ce fait que le rôle de l'ISIE n'a pas été efficace, ayant été limité à un contrôle administratif et bureaucratique, sans procéder à un contrôle systématique et efficace, afin d'éviter les dépassements. Il a fait remarquer par ailleurs que l'avance sur la subvention publique, octroyée aux différentes listes électorales, a contribué à dilapider les deniers publics devant le nombre de listes qui ont mis l'électeur dans l'embarras, face à des candidats qu'il ne connait que par le nom, du moins pour un grand nombre d'entre eux. Défaut de preuves Quant à Hasna Ben Slimane, juge au tribunal administratif, elle a affirmé dans son intervention, que la relation entre l'argent et la politique n'est pas incompatible à condition qu'elle s'exerce dans le cadre de la loi. Elle a précisé par ailleurs que les recours devant le tribunal que ce soit par l'ISIE ou par certains candidats, ne sont fondés que sur de simples allégations, avec des moyens qui se sont avérés non fondés, car non prouvés de manière tangible. C'est la raison pour laquelle ils ont été rejetés pour la plupart, aussi bien sur la forme que sur le fond. Le tribunal procède à des investigations, au vu des moyens présentés par les requérants, en commettant au besoin un juge rapporteur en vue de s'assurer si ces moyens constituent des preuves tangibles. Les décisions de rejet, ont fait l'objet de recours en appel par les intéressés, et il faut attendre la décision finale qui sera prononcée, dans un délai de 48 heures une fois que tous les recours auront été diligentés. Certes, l'argent et la politique ne sont pas incompatible comme l'a bien spécifié, la juge administrative Hasna Ben Slimane, à, condition toutefois que « la mécanique constitutionnelle » comme l'appelle le constitutionnaliste français Maurice Hauriou, ne soit pas affectée. Le même constitutionnaliste affirme que les relations entre gouvernants et gouvernés sont basées sur la confiance, par cette conciliation subtile entre le principe d'autorité et le principe démocratique. L'équilibre entre ces deux principes est rompu à chaque fois qu'interviennent les malversations et la corruption, nuisant par là même à l'intérêt général.