Se loger autrement, se nourrir autrement, se déplacer autrement. Oui comment autrement ? C'est la réponse que nous donne un groupe d'étudiants de l'Université Paul Valéry de Montpellier à travers leur projet : halte au tourisme de masse. La visite d'une imposante délégation universitaire de Montpellier composée de professeurs universitaires et d'étudiants en gestion du littoral du 16 au 23 novembre à Hammamet a été l'occasion pour eux de découvrir les différentes facettes des zones touristiques de Hammamet, du Cap Bon, de Tunis, du Sahel et de Bizerte. « La Tunisie est un très bel exemple et cette visite nous a permis de découvrir les différentes facettes de l'espace côtier, urbain et touristique tunisien », nous a précisé le chef de la délégation Jean Marie Miossec. « Cette visite nous a permis de comprendre le cas particulier d'un pays qui est devenu exemplaire pour bien d'autres par la rapidité de son évolution. On a découvert durant notre séjour une autre culture et des sites littoraux uniques notamment du côté d'El Haouaria et Kélibia. », nous a précisé Coline Dumas qui visite pour la première fois la Tunisie. « On a eu la chance de faire un circuit original et non touristique. On a rencontré plusieurs Tunisiens. Ce fut un plaisir de discuter avec des gens, des marins, des pêcheurs. Ce fut un vrai partage. On était curieux d'entendre les citoyens parler de leurs attentes, de leurs soucis, de leurs doutes », souligne Meggy Farcy qui estime que la forte concentration de touristes sur le littoral tunisien est en revanche une bonne nouvelle pour les commerçants : ils profitent de ce flux pour améliorer leur chiffre d'affaire. Mais ce tourisme de masse n'est pas profitable au pays et aux touristes qui veulent découvrir la vraie Tunisie. « Les gens dit-elle visitent des hôtels comme on en trouverait à tous les abords de plages dans le monde méditerranéen, mais ne visitent pas la Tunisie. A quoi sert un tourisme de masse si peu rémunérateur pour les hôteliers? Il enrichit les TO étrangers et quelques hôteliers tunisiens, pas le pays qui, lui, doit supporter les coûts de l'environnement pollué par cette masse humaine qui envahit les plages et qui y cause des dommages inutiles. Rien d'original à attendre sur ce plan. Dégradation de l'environnement Mélissa Sadjan et Kathleen Guiraud ont constaté que la dégradation de l'environnement et l'accumulation anarchique des déchets dans certaines zones touristiques ne correspondent pas à l'image de la Tunisie et à sa réputation au moment où elle commence à retrouver sa place de destination touristique. « Etant donné qu'un environnement en bonne santé constitue un facteur d'attraction touristique et, par conséquent, un aspect fondamental pour une activité économique satisfaisante, la meilleure approche repose sur le développement durable de ces sites. Un développement touristique durable suppose un équilibre entre les éléments écologiques, économiques et sociaux des ressources existantes et de leur utilisation future », explique-t-elle. Lorraine Leperlier a affirmé que les modes de consommation touristiques actuelles occasionnent des dégradations de l'environnement touristique «Ce tourisme de masse pollue et conduit à la dégradation irréversible de certains lieux très fréquentés comme les plages. Il faudra intégrer le tourisme dans son milieu, faire une continuité entre la ville et le touriste c'est aussi simple que ça. On n'est pas forcé à continuer à projeter des grands hôtels pour réussir le tourisme, le tourisme n'est pas les promoteurs touristiques. Intégrer le tourisme dans un concept de développement durable est susceptible d'assurer une meilleure gestion qui implique l'habitant même. Peut-être il faudrait changer de stratégie et attirer une nouvelle clientèle », dit-elle. Pour un réel échange entre le visiteur et le visité Dans leur quête d'exotisme, les touristes sont parfois à l'origine des dégradations irréversibles sur les populations locales. Ils arrivent souvent mal renseignés, des idéaux pleines la tête, à la recherche de folklore local. Devant cette demande s'organisent des visites à teneur folklorique. La population met en scène diverses cérémonies qui deviennent un véritable spectacle offert aux touristes. La culture locale se transforme en caricature et là Desmos Simon et Gerente Benjamin appellent à une consommation touristique responsable «un tourisme, disent ils, qui minimise les impacts négatifs de la pression touristique; qui maximalise les impacts positifs pour les populations hôtes; un tourisme de développement respectueux des Hommes, de leur environnement naturel, économique et social. Le tourisme autrement s'inscrit dans le développement durable. Il est socialement équitable, économiquement efficace et écologiquement tolérable. A Kélibia, nous avons été séduits par l'accueil de la population. Nous avons partagé avec eux des moments agréables. Ce tourisme participatif est une forme de tourisme s'adressant à un voyageur qui souhaite rencontrer les habitants au-delà de toute relation marchande, pour voir le pays de l'intérieur loin de ces palaces et leur all inclusive » et comme l'ont exprimé les universitaires Monique Gherardi et Frédéric Léon : « Il faudrait développer un tourisme permettant le rapprochement entre visiteurs et habitants. Bien entendu, cette participation est à appréhender dans les deux sens: le touriste qui participe à la vie des populations locales et les habitants eux-mêmes qui participent aux activités touristiques et qui en sont les véritables acteurs. L'objectif est bien d'installer une rencontre, un réel échange entre le visiteur et le visité, créant ainsi un bénéfice partagé, une situation de gagnant-gagnant » Bref, le tourisme de masse est devenu une réalité qui demande de nouvelles politiques d'aménagement, impliquant davantage les communautés locales afin d'optimiser les retombées et de mieux intégrer les enjeux environnementaux. Parmi les clés pour l'avenir, il convient de mieux prendre en compte les réalités environnementales humaines et biophysiques des espaces considérés. La recherche d'alternatives, impliquant les communautés locales, tant sur les formes de consommations touristiques que dans le renouvellement des sources de revenus, s'impose pour s'écarter d'un développement monolithique extraverti. « Le tourisme autrement a le vent en poupe », conclut Jean Marie Miossec « Parce que nous sommes de plus en plus nombreux à ne plus vouloir bronzer idiots. Et parce que nous aspirons à passer des vacances plus actives, plus enrichissantes et plus originales, qui nous permettent d'être hors des hordes, pour quelques jours ou pour quelques semaines. Le tourisme « autrement », c'est aussi la volonté d'occuper notre temps de loisirs de manière plus éthique, sans - trop - détruire la planète, tirer profit des inégalités Nord-Sud ou piétiner la culture de l'autre. Aujourd'hui il appartient aux Tunisiens de décider, s'ils souhaitent la continuité du système actuel avec un tourisme de masse dans les conditions que nous connaissons ou au contraire d'opter pour d'autres formes d'attraction c'est-à-dire de s'orienter vers un tourisme plus sélectif, de plus haute gamme plus rémunérateur mettant en valeur les atouts naturels et culturels mais avec des entrées touristiques importantes".