Actuellement 31,4% des jeunes diplômés sont au chômage. Après les fausses promesses de Ben Ali qui disait qu'il comptait créer 300.000 postes d'emploi, d'après sa dernière déclaration, les gouvernements transitoires de la phase postrévolutionnaires n'ont pas concrètement avancé sur ce point, le taux de chômage des jeunes diplômés étant passé, en effet, de 26,9% en 2012 à plus que 30% en 2014. Organisations actives... Le seul corps actif à ce niveau, est l'union des diplômés chômeurs qui est une organisation syndicale dont les membres, eux-mêmes, jeunes chômeurs, ne cessent de lutter pour le droit d'être employés par l'Etat. Ceux-ci ont organisé de nombreuses manifestations partout dans les régions dans le but de remettre en question le problème du chômage. Aymen M'rad, membre de l'instance de décision de l'UDC, nous a fourni un témoignage sur les objectifs de l'organisation ainsi que sur la situation du jeune diplômé chômeur en Tunisie et ses principales revendications. Il a précisé que l'UDC a fait part de nombreuses protestations populaires pour le droit du diplômé à être recruté et employé par l'Etat. De plus, l'organisation s'est engagée à défendre les chômeurs dans tout le pays et à négocier avec l'Etat à plusieurs reprises, des propositions de solutions capables de remédier à ce problème. En effet, maintes solutions ont été prises en considération dans ce sens notamment dans certaines régions de l'intérieur, comme au sujet du mécanisme 16 relatif aux agents et ouvriers des chantiers. Barrières du marché de l'emploi Aymen a entre autres parlé de la responsabilité entière de l'Etat face à ce problème. En effet il a soulevé le point de l'employabilité des diplômés en disant que tant une telle ou telle spécialité est enseignée aux universités, il faudrait qu'en contre partie elle ait des horizons dans le marché de l'emploi. L'Etat ne prend pas en considération cela et ne fait qu'encombrer l'enseignement supérieur par des spécialités dont les diplômés n'ont pas d'avenir. D'après lui, soit on pense à une réelle employabilité de ces diplômes délivrés aux jeunes soit on change de stratégie et on restreint le champ des spécialités. D'une autre part, Aymen parle de la corruption. Il évoque des « mécanismes suspects » des recrutements au service public. Dans ce cas il n'est plus question d'employer des jeunes compétents et on consacre les dépassements commis par les responsables de recrutement. De même pour les concours nationaux, il n'y a pas de chances égales pour tous les diplômés, on exploite l'argent perçu de leurs inscriptions pour qu'à la fin on fasse des choix « suspects » et inexpliqués. Il a enfin indiqué que même pour les recrutements au secteur privé, il n'y a pas de lois imposées par l'Etat pour organiser le mode de recrutement et déterminer certains critères pouvant réellement résoudre le problème de chômage. On attend que l'Etat facilite aussi l'endettement pour les jeunes diplômés qui envisagent s'installer à leurs comptes. L'autre paire de manche... La responsabilité est majoritairement imputés à l'Etat, qui est appelé à minimiser le taux de chômage et éliminer ainsi l'un des facteurs principaux de la crise économique due au manque de productivité, d'une tranche de la société supposée être la plus productive. Cependant, on ne doit pas se passer de traiter un autre angle tout aussi marquant, la part de responsabilité qu'ont ces diplômés au chômage qui exigent parfois des conditions démesurées. Certains employeurs se plaignent justement du fait que « Les chômeurs sont bien là, mais ils ont choisi de n'accepter que du travail dans des conditions précises !», selon un article publié sur un débat entre politiciens et créateurs de projets. L'article ajoute au nom de l'un des employeurs disant que « Ils exigeaient tous des postes de chefs avec des avantages incroyables ». Une situation frustrante, un sentiment d'injustice... Ziadi Raja, psychologue indique qu'être chômeur tout en ayant un diplôme reconnu par l'Etat est, sans doute, beaucoup plus frustrant que de se trouver sans boulot et sans diplôme. Certains accusent ces diplômés, toujours en chômage depuis plusieurs années, de n'être pas suffisamment débrouillards et autonomes pour se créer une source d'argent autre que la fonction publique. Elle pense que cependant, nous estimons intéressant voire primordial, la compréhension de la dimension non seulement sociale mais aussi psychologique de ce phénomène. La psychologue explique qu'on ne doit pas oublier que ces chômeurs diplômés sont généralement issus d'un milieu socioéconomique plus ou moins défavorisé. Leurs études universitaires, particulièrement coûteuses pour leurs parents, deviennent l'équivalent d'un investissement. Elle précise qu'en effet, les parents s'attendent à ce qu'une fois son diplôme obtenu, leur fils ( ou fille) soit directement embauché par l'Etat afin de prendre par la suite toute la famille en charge. En outre, d'un point de vue psychologique, ces diplômés en chômage sont à la recherche d'une reconnaissance sociale, estimant qu'ils n'ont pas eu toutes les chances de leurs côtés pour poursuivre leurs études et qu'ils ont beaucoup souffert pour obtenir leurs diplômes, il s'agit d'un sentiment d'injustice. Raja ajoute que ces chômeurs diplômés réclament un statut social valorisant dans la recherche d'une sorte de compensation. Ce statut ne sera obtenu qu'en exerçant un métier valorisé à l'échelle sociale comme enseignant ou fonctionnaire de l'Etat, d'où le refus catégorique de certaines alternatives existant sur le marché. Elle conclut par dire que ce phénomène trouve donc son origine dans ce sentiment d'injustice renvoyant directement à la nécessité de garantir une certaine égalité des chances entre tous les citoyens tunisiens.