Pourquoi avoir choisi, aujourd'hui, de donner le nom du leader Habib Bourguiba, à l'entrée-ouest de la ville d'Ariha (Jéricho)? Si ce n'est à cause de la force du symbole que cela véhicule, qui plus est maintenant que cette spirale de violences inouïs, entre Palestiniens et Israéliens, menace de s'amplifier davantage, faisant craindre le pire, dans une région minée depuis tellement longtemps par les conflits, qu'aspirer à en découdre, c'est un peu comme croire au père Noël quand on a largement dépassé l'âge, escomptant ainsi un miracle, qui ne peut venir. Le fameux discours de Jericho... Parce que Bourguiba avait une longueur d'avance sur tout le monde, sur la question, et qu'il en avait choqué plus d'un à l'époque, en donnant son avis, sans équivoque, sur la façon de régler ce conflit, en acceptant de contourner les obstacles, lorsqu'il n'y a pas moyen de faire autrement, et de temporiser si besoin est, jusqu'à parvenir à son but. Est-ce que ça avance à grand-chose, de le dire maintenant que bien de l'eau est passée sous les ponts? Peut-être pas pour refaire le chemin à rebours; ni pour recoller les morceaux, il y a trop de travail en perspective, et il faut viser les priorités. Mais le rappeler est certainement salutaire. Pour tout le monde. Ceux qui ont fait la sourde oreille, ou ceux qui ont tenu un discours aux antipodes. Tous sont logés à la même enseigne. Mais le plus important, ce sont les deux protagonistes d'une même histoire, laquelle ne pourra être réglée que lorsque les deux parties auront fini par comprendre que leur seul espoir réside dans le fait de s'entendre sur l'essentiel. A savoir qu'un peuple a été spolié de sa terre, au profit d'un autre peuple. Et qu'il n'est pas question, cependant, d'envisager de jeter qui que ce soit à la mer, sauf à trouver des solutions qui seraient viables et équitables, afin d'entrevoir fut-ce la possibilité, non pas d'un « vivre ensemble »: dans l'immédiat, ce serait trop utopique, mais de cultiver des relations de bon voisinage: Etat à Etat, un Etat à côté d'un autre Etat, en s'acceptant mutuellement, après avoir éliminé, une à une, les causes éternelles du conflit, en délimitant des frontières qui seraient solvables, et rendraient justice au peuple Palestinien, frustré de sa terre, et colonisé par l'entité sioniste, laquelle ne veut laisser aucune chance à la paix, de s'établir dans la région. Mais entre la politique israélienne, sans foi ni loi à l'encontre du peuple palestinien, il y a en étau, deux populations, qui n'ont d'autres choix que de fraterniser, pour pouvoir vivre sans peur et sans angoisse, les uns à côté des autres, parce que c'est leur humaine condition qui l'exige. Et qu'il ne sert à rien de le renier. Ni de remettre à plus tard, une paix qui est toujours possible entre les peuples, s'ils arrivaient à parler le même langage. Non pas celui du cœur: c'est parfois difficile et cela prend du temps. Mais bien celui de la raison. C'est le langage que Bourguiba avait tenu. Un certain 3 mars 1965 à Jericho...