Ils ont encore frappé! Qui? On ne le sait pas encore. Qui a planifié cet horrible attentat contre des agents de la garde présidentielle? Ca aussi on l'ignore à l'heure actuelle. Tout ce que l'on sait, c'est que ces terroristes veulent semer la mort et répandre la terreur dans le cœur des Tunisiens. Si les adultes ont été terrorisés, que dire des enfants ? Lina a 4 ans. Elle était en voiture avec ses parents aux alentours de Mohamed VI quand l'explosion a eu lieu. Pour la rassurer, son père lui a expliqué que ce bruit sourd qu'elle a entendu était le tonnerre. Mais la petite n'est pas dupe surtout que des débris ont été éjectés près du véhicule familial et qu'elle a vu des ses propres yeux des personnes tomber à terre sous le coup de la déflagration. Depuis, Lina est terrorisée et n'arrête pas de crier. Au lendemain du drame, elle n'a pas voulu aller au jardin d'enfants car elle a peur « qu'une nouvelle bombe explose. » Khalil, lui, a 7 ans. Il a appris la terrible nouvelle alors qu'il était chez lui. Sur une feuille blanche, il a dessiné un soldat tout sourire tenant à la main un drapeau tunisien. Khalil a écrit quelques phrases en arabe pour exprimer son amour pour sa patrie. Des mots simples, enfantins mais infiniment touchants. Youssef est collégien. Avant-hier, avant de sortir de chez lui, il a glissé un drapeau tunisien dans son sac à dos. Il a expliqué à sa mère qu'il le brandira lors du salut matinal du drapeau dans mon collège. Il estime que « les terroriste doivent savoir qu'on n'a pas peur d'eux et que nous aimons notre pays plus que tout. » Il est bien loin le temps de l'insouciance. En perpétrant leurs odieux actes un peu partout dans le monde, les terroristes violent à chaque fois l'innocence des enfants et leur volent une part de leur bonheur. Malgré les efforts de leurs familles pour leur épargner le choc des images violentes représentant des cadavres et des victimes ensanglantées, les petits subissent malgré eux et d'une manière chronique, les tragédies du terrorisme. Contrer l'horreur par le dialogue En France, au lendemain des attentats de Paris, une lettre a été adressée par Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, à tous les parents pour les rassurer et leur expliquer les mesures qui allaient être prises dans l'ensemble des établissements scolaires français. On peut lire dans ce document : « En tant que parents, soyez assurés que l'ensemble des équipes pédagogiques et éducatives seront à vos côtés dans ce moment douloureux, prêtes à vous aider et à vous informer. Des cellules psychologiques sont ainsi déployées dans les écoles, collèges, lycées et établissements d'enseignement supérieur. » La ministre annonce ensuite qu'une minute de silence sera observée en hommage aux victimes. Ce temps de recueillement sera précédé d'un échange entre les élèves et les enseignants. Elle affirme aux parents que: « Ce dialogue permettra de soutenir vos enfants et vos adolescents. Il sera l'occasion pour eux de s'exprimer, d'être écoutés par leurs enseignants, et d'échanger avec eux sur ces événements particulièrement violents et horribles.» Qu'en est-t-il de nos établissements scolaires et de nos enseignants? A part de rares exceptions, le sujet des attentats a été passé sous silence dans les écoles, collèges et lycées tunisiens. Aucune cellule de soutien n'a été créée pour venir en aide aux enfants traumatisés par ce drame, et plus particulièrement ceux qui étaient présents sur place à l'heure des faits. Dans les médias, différents sujets relatifs à cet attentat ont été évoqués mais pas celui des enfants qui y ont assisté et aucun conseil n'a été prodigué aux parents pour rassurer leurs petits et leur éviter un traumatisme durable. Pourtant, les experts estiment qu'il ne faut pas sombrer dans le déni et refuser d'en parler avec les enfants. Pour Najla Boukhriss, psychologue, il faut commencer la conversation en leur demandant ce qu'ils ont entendu comme informations ou vu comme images et vidéos, en particulier sur les médias sociaux, en leur demandant ce que leurs amis à l'école en pensent. En parlant des faits, ils extérioriseront ainsi leurs craintes et leurs doutes et dans ce cas, il faut les rassurer, leur rappeler que la majorité des gens sont bons et que les policiers et les militaires sont là pour nous protéger et protéger le pays. De même, il faut répondre à toutes leurs questions par des réponses à la fois rassurantes et convaincantes. Par contre, la spécialiste estime que si l'enfant ou le jeune ne désire pas évoquer ce sujet, il ne faut pas lui forcer la main et respecter sa décision. Pupilles de la nation Si l'attentat de mardi en plein cœur de Tunis a traumatisé de nombreux enfants tunisiens, il a aussi fait pire. En effet, la plupart des agents de la garde présidentielle étaient pères ou allaient bientôt l'être comme c'était le cas du regretté sergent-chef Amor Omri dont l'épouse, enceinte, a fait un malaise à l'annonce de sa mort dans ce terrible drame. Quel avenir pour ces orphelins? Seront-ils pris en charge et qui leur assurera une vie décente? Toujours en France, la secrétaire d'Etat en charge de la Famille a annoncé que les enfants des victimes des attentats de Paris pourront obtenir, s'ils le désirent, le statut de pupille de la nation. En plus d'un soutien psychologique, ils recevront des allocations et des subventions qui leur permettront de mener à bien leur scolarité et de faciliter leur entrée dans la vie professionnelle. Actuellement, ce statut n'existe pas en Tunisie mais avec la recrudescence des actes terroristes ciblant précisément les forces de l'ordre et des civils nécessiteux, il serait peut-être temps d'envisager pareille solution pour garantir une vie décente aux orphelins des martyrs de la nation.