Le film reçoit 24 prix, dont 5 nationaux et 19 internationaux. Pour le premier long métrage de Leyla Bouzid on s'attendait à un chef d'œuvre digne de « 12 hommes en colère » de Sidney Lumet. Même ce dernier, 12 hommes en colère, a reçu 3 prix en tout. Un tapage médiatique proche du harcèlement pas très loin du bourrage de crânes. Publicité radio, enseignes sur les routes principales, présent dans tous les programmes de cinéma tunisien, dans les réseaux sociaux, le film est partout ... On l'a compris, allez tous en cœur : «A peine j'ouvre les yeux, est un bon film qu'il faut absolument voir, il a reçu 24 prix, bon sang!!». A première vue, « A peine j'ouvre les yeux » est un bon film qu'on conseillerait d'aller voir. C'est en le revisionnant qu'on se rend compte de l'ineptie de certaines idées véhiculées. On est parfois même frappé par un jeu d'acteur approximatif. On est dans l'à peu près d'un jeu monté de toutes pièces. Sortie dans les salles de cinéma depuis le 13 janvier 2016, ce film nous ramène en 2010, juste avant la Révolution tunisienne. Farah (Baya Medhaffar) âgé de 18 ans vient d'obtenir son bac avec mention Très bien. Contre son gré, sa mère Hayet (Ghalia Ben Ali) l'inscrit pour étudier Médecine alors que la jeune fille ne rêve que d'études en musicologie. Farah est, par ailleurs, chanteuse dans un groupe de rock aux textes engagés. Elle nous emmène dans sa transition de la vie d'adolescente à la vie d'adulte, découvrant l'amour, la réalité brute ... Prenons un moment, focalisons-nous sur certains détails. L'interprétation des acteurs dans ce film est, disons, faible. Baya Medhaffar joue le rôle d'une bachelière assoiffée de musique, censée être une fille rebelle et révolutionnaire sauf qu'elle nous a livré une prestation assez limitée en émotions dans toutes les péripéties de sa vie d'adolescente : sa relation tendue avec sa mère, les ‘'je t'aime moi non plus'' avec son petit ami Borhène (Montassar Ayari). Par moment, on sent qu'elle est en train de jouer un rôle, le sentiment d'identification au personnage est manquant. Sans oublier, la fameuse scène dans la voiture, lorsque sa mère a décidé de mettre en péril leurs deux vies, dans le seul but que sa fille n'aille pas chanter au concert qu'elle donne le soir même. Cristina Còrdula dirait « ma chérie, ma chérie, ma chérie ça va pas du tout ! Mais ce n'est pas possible comme ça ! ». Et Cristina aurait raison, parce que dans la vraie vie ça ne se passe pas comme ça à moins que la personne soit sous l'effet de substances illicites. Une mère digne, ayant les pieds sur terre et la tête sur les épaules, ne ferait jamais cela. On citera aussi la scène où elle interprète la chanson que Borhène lui a écrite, et où elle donne l'impression de lire tel un soliloque plus proche d'une récitation des fables de la Fontaine, aucune émotion ne passe. La mention spéciale du film on la réserve à Najoua Mathlouthi qui incarne le personnage d'Ahlem la femme de ménage, avec ses blagues au ton sarcastique. Tout au long du film, Ahlem nous montre implicitement qu'en Tunisie les critères de beauté sont: être blonde aux yeux verts, avec une peau claire. Ce qui nous pousse à nous demander si c'est le seul moyen d'être accepté dans cette société et d'avoir la possibilité d'entamer une vie conjugale ? Nous saluons, par ailleurs, le travail fourni au niveau de la qualité d'image, le cadrage, la qualité de son et la musique signée de la griffe du musicien Irakien Khmayem Allami est attachante... Avec le décor et les costumes, nous appréhendons un cinéma qui touche la classe moyenne. Chose qui nous sort d'un cinéma à l'ambiance qui baigne dans la misère ou celle qui nous jette dans l'autre extrême, une bourgeoisie bon chic bon genre. La réalité est présente dans ce film. La classe moyenne s'y retrouvera.